Chapitre 3

24 1 1
                                    

3.
- Driiiiiing !
La sonnerie stridente de l'école retentit, annonçant enfin la fin de cette journée de cours. Comme je n'étais pas avec Maya lors de cette dernière heure, je l'attendais tranquillement dans la cour regardent les allées et venues des élèves. Je patienta ainsi de longues minutes avant de la voir enfin apparaître sortant du haut bâtiment. Ses longs cheveux brun foncé se balançaient dans le vent printanier qui soufflait depuis ce matin.
- Te voilà enfin !
- Désolé j'avais une interrogation très longue en anglais, un savoir écrire.
- Mince, ça a été ?
Mon amie fit la grimace, elle détestait les langues, alors un savoir écrire a du lui pourrir la journée. Aussi décidais-je de ne plus en parler et de vite changer de sujet.
Nous marchions côte à côte. On avait décidé de passer notre fin d'après-midi à faire du lèche-vitre sur la longue route de Brompton dans le Kensington. Mais d'abord, halte au Starbucks au coin de la rue. Je pris un capuccino comme à mon habitude et Maya un chocolat agrémenté d'un petit spéculos à grignoter. Je sirotais mon café tout en racontant les derniers ragots sur Sisi Malone, la fille populaire du lycée. Je finis par sécher et Maya ne semblait de toute façon plus vraiment m'écouter. Je perdis connexion avec la réalité en rêvassant. J'espérais bientôt recevoir ma nouvelle carte, mes parents me manquaient énormément. Mon amie me sortit de ma rêverie :
- Et toi ? m'interrogea-t-elle, ça a été ta journée ?
- Oui, je n'avais heureusement pas d'interrogations mais un gros devoir à remettre à Mr Bin.
Il ne s'appelait pas réellement Bin mais Bino. Les élèves avaient préféré raccourcir le nom pour donner Bin, la poubelle en anglais. Avec sa bedaine et ses poils noirs qu'on voyaient parfois dépasser de son pull vert foncé miteux, ses grosses lunettes rondes qui lui donnait des yeux de mouches, ses quelques cheveux toujours gras et sa moustache noir, ça lui convenait parfaitement. Ce type en dégoûtait plus d'un autant physiquement que psychologiquement, c'était vraiment un professeur horrible.
- Aie, il est pas cool lui !
- Ça tu peux le dire, un texte de 10 pages à analyser ! Et en 2 jours bien sur, soupirai-je.
- Ah oui quand même. Bon je reviens, je vais à la toilette.
Je la vis s'éloigner et me replongeais dans mon café que je finis. Je chipais un petit bout de biscuit de l'assiette de Maya lorsqu'une dame à la peau basanée et aux cheveux blonds s'approcha de ma table.
- Excusez-moi.
Je relevais la tête.
- Oui ?
- Auriez-vous une minute à m'accorder ?
Je lorgnai à l'intérieur du café mais Maya n'avait pas l'air de revenir malheureusement. Je n'avais pas vraiment envie de parler seule à seule à cette jeune femme mais je n'avais pas trop le choix on dirait.
- D'accord, que voulez-vous ? dis-je avec nonchalance tout en la regardant de plus près. Sans que je puisse m'expliquer pourquoi, elle me disait vaguement quelque chose.
- Voilà, en fait je suis journaliste et j'aimerais interroger une citadine. Je vous ai vu et me suis dit que vous seriez le modèle parfait ! dit-elle grand sourire.
- Moi ? demandai-je, interloquée, le sourcil droit relevé en signe d'incompréhension.
En quoi moi plutôt que la jolie blonde sur la terrasse en face ? Ou le beau mec à côté de son quatre quatre là-bas plus loin ?
- Vous savez, argumentais-je, je suis ce qu'il y a de plus banal.
La femme leva ses sourcils et ouvrit la bouche pour parler mais sembla changer d'avis et la referma.
- Eh bien, justement, dit-elle en se raclant la gorge, il me faut quelqu'un qui représente un peu tout le monde, qui se fond dans la foule, finit-elle en souriant.
- Ok ... Où, quand ? dis-je, toujours un peu perturbée.
- Demain dès que vous aurez fini vos cours.
- Vers 15h30 alors, dis-je pensive.
- Parfait ! Voici ma carte.
Elle me tendit une carte bleu clair avec un numéro de téléphone et l'endroit où je devrais sans doute me rendre.
- Voilà, rendez-vous à cette adresse et demandez à la réception le bureau B.
- Le bureau B, ça marche, répondis-je même si j'hésitais encore.
C'était peut-être un traquenard. Avec tout ce qu'on entendait à la radio ou à la télé ces temps-ci, rien n'était moins sur.
À peine la jeune femme était partie que Maya revenait tout en la dévisageant.
- C'était qui elle ?
- Elle, c'est une journaliste qui veut apparemment m'interviewer.
- Waouh ! Trop bien ! s'enthousiasma mon amie.
- Tu trouves ? Je ne sais pas si je vais y aller.
- Comment ? Mais c'est trop bien Kila ! Tu passeras peut-être à la radio ou même, qui sait, à la télé !
Maya avait l'air tellement heureuse pour moi que j'esquissai un sourire et lui répondis que j'irai donc.
- C'est quand ?
- Demain après les cours.
- Et où ?
Je lui indiquais la carte toujours sur la table.
- Connais pas.
- Je crois que je vois où c'est. Près de la gare.
- Ah oui ! Maintenant que tu le dis ça me rappelle quelque chose. Un grand bâtiment non ?
- Oui, je crois. Tu m'accompagneras ? demandai-je tout en prenant la petite carte avec l'adresse, la glissant dans la poche de mon jeans.
- Non, désolée. J'ai rendez-vous chez le coiffeur. J'ai pleins de fourches en ce moment. Tu n'imagines pas ! répondit mon amie tout en regardant désespérément ses cheveux qui me semblaient pourtant parfait.
- Oh pas grave, t'inquiète pas, je te raconterai tout en détail.
- Tu as intérêt !
Nous terminions notre boisson et payions. Nous nous baladions un peu sur la route, nous faufilant entre les nombreux passants. Enfin arrivées près des boutiques nous commencions le magasinage. Je n'avais pas besoin de vêtements spécialement mais j'ai tout de même essayé plusieurs robes sous les demandes insistantes de Maya. Je réussis malgré tout à ne rien acheter contrairement à mon amie qui s'en donna à cœur joie, comme d'habitude. À chaque fois qu'on allait faire du shopping elle finissait toujours par se vider les poches, je ne comprenais pas comment elle faisait pour trouver tous ses vêtements. Pour ma part, lorsque j'achetais quelque chose, Maya était tout en fête !
Elle acheta donc une petite robe rouge qui lui allait à merveille et un pull assorti. On rentra ensuite chacune de notre côté.
Je travaillai un peu, mangeai et partis me coucher de bonne heure. Demain serait une grosse journée.

Graphonne [en pause]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant