1543, Holborn, Royaume-Uni,
Une jeune femme, possédant de longs cheveux bruns lui tombant au niveau du dos, se balade, pieds nus, dans les rues de la petite bourgade. Elle vagabonde, et tend ses bras, laissant voir ses habits déchirés, ainsi que sa peau pale. Ses yeux, d'une clarté presque divine, se baladent de droite à gauche, à la recherche de son frère, Gregory. Elle panique, impuissante, et le cherche désespérément, passant surement à la vue des passants comme une folle furieuse.
Elle ne peux pas l'abandonner, même si elle exagère, et que peut être il n'est pas bien loin, elle ne peut s'empêcher d'être à l'affut de toute possibilité. Il est la seule famille qu'il lui reste. Elle ne pourrait pas vivre sans lui, vivre sans but. L'année passée, le froid avait pénétré la maison des Grumford, emportant avec lui Edward et Mary, les parents respectifs de cette chère Élizabeth et de son petit frère Gregory.
Son regard se portant sur un étalage du marché qui avait lieu sur la place, elle aperçut ces cheveux noirs ébène qu'elle reconnaîtrait entre mille. Ceux de Gregory. Elle se précipita alors vers le jeune garçon, en bousculant pendant sa course quelques passants. Elle se jeta sur lui, et le serra fort, comme s'il ne l'avait pas vu depuis des lustres.
"-Gregory..." Chuchota t-elle dans le creux de son oreille, les larmes aux yeux.
Elle releva la tête vers son frère, le regard désorienté, et sourit.
"-J'ai...J'ai cru ne jamais te revoir."
Son frère, ouvrit la bouche comme pour dire quelque chose, mais se ravisa, et serra plus fortement sa soeur. Cela lui faisait mal de voir sa soeur dans un état comme cela. Depuis la mort de leurs parents, elle avait changé. La petite fille joyeuse, souriante, et pleine d'espoir avait disparu, pour laisser place à une jeune femme seule, au coeur rempli de tristesse. Certes, les temps étaient durs, mais il ne supportait pas de voir sa soeur se battre ainsi avec la vie pour subvenir à leurs besoins respectifs. Il trouvait ça injuste. Pourquoi une si jeune femme devait elle endosser le poids d'un tel fardeau ?
Elle qui avait toujours été endurante, forte, il la sentait partir, petit à petit. Son âme, semblait s'envoler. Il savait qu'elle n'était pas heureuse avec lui. Même si elle lui disait le contraire, qu'elle souriait de temps en temps, il voyait que son sourire était faux, et cachait une profonde tristesse. Malheureusement, il ne pouvait rien faire pour la soulager. Il lui devait tout, mais il ne pouvait rien faire pour elle.
Elle se détacha de son frère, et lui caressa doucement le visage, comme l'aurait fait une mère à son fils. C'était bien le rôle qu'elle jouait... Le rôle de mère, de père. Mais le rôle de femme, où était il passé ? Elle ne trouvait plus le temps pour elle, elle ne faisait que de s'occuper de son frère. Son rôle de femme, son rôle d'épouse, elle les laissait partir. Elle savait qu'elle ne serait jamais mère, et c'est cela qui la détruisait. Elle avait été privée à une vie heureuse, à une famille, elle avait été privée de donner la vie...
Son frère, soucieux de vouloir l'aider, ne pouvait remplacer la sensation d'être une mère, et de pouvoir voir ses enfants grandir, les voir sourire. Rien, absolument rien ne pouvait remplacer cette sensation inédite.
"-Rentrons à la maison je te prie. Te savoir seul ainsi dans les rues bondées qui ne sont pas sûres ne me rassure pas le moins du monde."
Gregory acquiesça, et suivit sa soeur jusqu'au chemin menant à la maison, les mains dans ses poches.
Une fois arrivés, Élizabeth s'éclipsa dans la cuisine, tournant le dos à son frère. Lui, baissa la tête, et se mit à réfléchir pendant qu'Élizabeth s'activait pour leur cuisiner le peu de nourriture qu'elle avait déniché ce matin. C'est alors qu'il releva la tête, et, les yeux larmoyants, murmura ces mots si bas, qu'elle crut les avoir imaginés:
"Ils vont venir. Dans la soirée."Gregory se rapprocha alors d'Élisabeth, jusqu'à l'enlacer, et nicha sa tête dans le cou de la jeune femme.
La femme, se décala alors, puis se tourna pour faire face à son frère bien aimé.C'est alors, qu'une larme tomba doucement de sa joue, continuant sa descente sur sa bouche charnue. Son frère se rapprocha d'elle, en tendant la main, mais elle resta immobile, le regard dans le vide, des larmes ravageant son si joli minois. Son frère, inquiet, pouvait percevoir la peine de sa soeur, et cela lui déchirait le coeur de ne pouvoir rien faire, il savait ce qu'elle faisait; elle faisait son deuil. Elle sentait que lui on arrachait le coeur, que l'on lui plantait une dague en plein coeur. Après avoir perdu sa mère, puis son père, elle allait alors perdre la dernière personne qui comptait pour elle. Elle allait perdre son frère. Car elle savait, ce que l'on faisait aux voleurs comme lui. La pitié et la famine ne comptait pas pour eux. Seule la justice importait. Même pour un minuscule morceau de pain.Et il allait être une énième victime de cette injustice malheureuse.
Elle se rapprocha alors de son frère, le regard ailleurs. Elle tendit les bras à son tour, et se reposa sur son frère, laissant ainsi exprimer toute sa profonde tristesse. Elle commença à crier, des cris de souffrances, des cris de désespération, des cris d'aide. Elle n'attendait plus rien des hommes, et priait pour qu'un miracle ne se produise. Il caressa les cheveux de sa soeur, qui s'était blottie contre son épaule, et pleurait une rivière. Il pouvait voir ses épaules tremblantes, sa tête se balancer du à ses pleurs, et sentir ses spasmes.
Il savait pourquoi Élizabeth avait alors réagit ainsi. Et cela lui fit mal. Pas autant qu'elle...
Elle serra encore une dernière fois son frère dans les bras, sachant que ça allait peut être la dernière fois qu'elle le ferait. Elle avait pourtant tout fait pour vivre correctement, du moins essayer, mais, il fallait croire que ce n'était peut être pas assez. Tout ce qu'elle savait,c'est que c'était de sa faute, et elle ne le pardonnera jamais.
Ce soir, elle verrait son frère pour la dernière fois.
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King's Pet
RomanceEn 1543, en plein règne des Tudors, Élizabeth, une jeune paysanne de la bourgade d'Holborn,près de Londres, se noie, elle et sa famille, dans la famine. Par un moyen astucieux, aussi farfelu que presque impossible, elle trouvera un moyen de nourrir...