Songe dément

Est-ce réel?

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Néant. Le monde est sombre et sans lumière. J'entends un écho. Quelque chose. Un bruit. Un crissement; comme des lames de verre sur un tableau. C'est aigu et effroyable. Ma tête. Je ne peux plus bouger. Tout est noir depuis trop longtemps. Des années. Une décharge glacée se coule lentement au fond de moi; comme une vague lorsque le crissement recommence à nouveau. Et encore. Et encore. Toujours le silence, puis ce hurlement de verre incessant. Je ne comprend plus. Je n'ai jamais compris. Ça a toujours été comme ça. Mais après le bruit, un silence assourdissant. Tout se tait, comme si le monde venait de mourir. Je suis seule. Ce silence me murmure des voix, des hurlements, des chuchotements. Je les entends. Ils sont là. Dans ma tête. Dans cette cellule. Cette pièce. Entre ces barreaux. Ces monstres veulent me dévorer. Je les sens en moi, dans cette noirceur. Et je panique. Mes membres semblent être encrés quelque part, comme du marbre, je suis immobile. Si seule...

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Je sursaute. Je sens quelque chose. Ça sent mauvais. C'est chaud. On dirait du métal séché, et je hais cette odeur. Je hurle. Je crie. J'ai une voix? Mes cris se perdent, j'ouvre les yeux. Je savais que je ne devais pas le faire. Je panique, tout mon sang se glace. Une fille est devant moi. Assise. En sang. Elle est apeurée dirait-on. Je ne suis pas seule. Je le savais. Je la regarde.

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Elle ne parle pas. Elle a la bouche grande ouverte. Non. Elle ne parle pas. Elle hurle. Ses cris résonnent dans mes oreilles. Comme le verre. C'est pareil. Elle a des marques sur les épaules. Sur les jambes. Partout sur le corps. Des striures en sang. Elle sourie maintenant. Elle me fait peur. Je crie encore plus fort, mais rien n'arrive. C'est atroce. On dirait un démon. Ses cheveux sales sont emmêlés au sommet de son crâne. Elle n'en a plus beaucoup. Une partie a été arrachée. Ça se voit. Elle a une blessure béante en plein visage. Des lambeaux de peau ensanglantées virevoltent atrocement à chacune de ses expirations. Et ses yeux sont jaunes. Lorsqu'ils me fixent je me sens reculer. Elle est affreuse, démoniaque.

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Malgré moi, je m'approche. Elle me regarde comme une bête sauvage, curieuse, prête à me tuer. Ses pupilles sont dilatées et elle me fixe les yeux grands ouverts, comme des lumières. Elle tient un bout de verre dans sa main sale. C'est elle qui fait ça. Ce bruit. Ce supplice. Cette torture. Elle a les mains ensanglantées et poisseuses. Elle tient ce morceau de verre dans ses doigts nus. Ce verre vient d'un miroir. On voit sa peau se refléter dedans. Sa chair a pourri autour des coupures, nettes et profondes. Je m'avance encore, elle aussi. Nous avons peur toutes les deux, et je la hais. C'est comme si tout mon être était poursuivi par une meute de choses voulant me torturer. Je la regarde. Elle me sourit. D'un sourire immonde. Je tend mon bras ankylosé et tremblant, puis je la touche.

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Je la touche. Elle est froide. Comme du verre. Comme son bout de miroir. Et la douleur me prend aux côtes. Violente et innommable. Vicieuse et immense. Sourde et terriblement puissante. J'ai mal. Partout. Je saigne. Et en regardant mieux cette fille, je vois quelque chose...elle n'est pas réelle c'est une image. C'est un miroir. Et je me rend compte que...c'est moi.