"Comment ça non ? Vous plaisantez ?
Je n'en crois plus mes oreilles et j'ai comme l'impression que mon visage traduit l'expression de l'incompréhension, puisqu'il ajoute :
- Non, ça ne m'intéresse pas. Pourquoi offrir du plaisir aux autres alors que j'ai déjà tout ce qu'il me faut ? Vos promesses de richesse sont bien belles, mais je suis déjà multi-milliardaire... Non, vraiment vous êtes très naïve, ma petite ! achève-t-il en souriant.
Il me provoque... Je suis assez mature pour ne pas répondre à ses viles paroles. Je me contente simplement de lui apposer, comme une adulte responsable, un fait qu'il parait avoir oublié :
- Il me semble pourtant que vous autorisez le tabac et la drogue : cela procure un bref sentiment de répit aux consommateurs et vous, vous tirez du profit. N'est-ce pas le même schéma que je vous propose ? Un schéma moins nocif pour leur santé qui plus est.
Jeune Ministre Idiot est soudainement pris par un éclat de rire si violent que Garde n°12 est contraint de lui apporter un verre d'eau. Une fois ses esprits repris, il se contente de susurrer :
- Sélection naturelle, ma douce !"
C'est alors que mon côté totalement immature refait surface -au bon moment je dois bien l'avouer- et je tourne les talons sans même prendre la peine de le saluer.
Claquer cette porte -toujours aussi dorée- m'a fait un bien fou. Un seul problème se pose à moi actuellement. Enfin non, plutôt deux en réalité : déjà, j'ai oublié mon tailleur dans le bureau du ministère. Vous aurez sûrement deviné la nature de mon second contre temps : je porte toujours la blouse d'hôpital hideuse, en pleine rue. Certains passants me dévisagent ; les autres jouent à Pokémon Go.
Et je n'ai pas le permis. Et je n'ai pas une clochette pour me payer un taxi. Et je vais devoir rentrer en marchant... Après réflexion, ça fait bien plus que deux problèmes.
Même s'il pleut, je dois positiver ; c'est pourquoi je rejoins mon petit appartement le plus vite possible, en pensant qu'il faut toujours compter les arc-en-ciel et non pas les averses. D'ailleurs mon échec n'est que passager, j'en suis convaincue.
Changée et réchauffée, je me décide enfin à faire le point. Dans ma tête, j'imagine un peu ça comme un récapitulatif de bataille :
Enjeu(x) : obtenir des fonds pour un projet révolutionnairement fabuleux pour la population.
Victimes à déplorer : mon amour propre. C'est déjà beaucoup...
Synthèse : mon humiliation a été vaine, et ma visite au ministère tout autant. Le ministre à refusé mon offre. Je suis contrainte de me débrouiller par mes propres moyens. Il me faut bien commencer quelque part : me trouver un travail, c'est le minimum. Ensuite... Pourquoi ne pas télécharger Pokémon, comme tout le monde ?
Tout est désormais clair. Passons aux actes : le CV. Depuis maintenant un an, j'envoie ce formulaire à n'importe qui. Après un bac S spé' Chimie Très Renforcée, je m'imaginais déjà riche dans une maison en bord de mer, je pensais sauver des milliers de vies par jour dans le cadre de mon travail... C'est pourquoi, j'avais commencé par envoyer mon CV -réalisé avec le plus grand soin- à des entreprises très prestigieuses dans le domaine de la chimie médicale. Elles m'ont toutes répondu par une lettre de refus.
La réalité a bien ralenti mes ardeurs... À tel point que je distribue aujourd'hui mon CV dans toutes les boîtes aux lettres du quartier ! Les gens me trouvent étrange, mais ils ne savent pas à quel point je suis désespérée.
Le projet Pelouse Consommation traine dans ma tête depuis ma sixième année d'étude : l'année de la thèse. J'avais présenté un système à peu près équivalent et il avait eu du succès ; mes professeurs avaient adoré. Et maintenant que je tente de le mettre en application, il semble que plus personne ne se décide à me soutenir... C'est triste. Par contre, je crois que j'aurais eu beaucoup de succès si j'avais voulu rédiger ma biographie absolument captivante !
Revenons aux choses sérieuses : il ne me reste qu'un endroit dans lequel je n'ai pas encore postulé pour un poste. Ça me répugne de l'avouer mais je vais devoir passer un entretien pour un travail de... prof.
En un sens, je suis plutôt rassurée : il y aura des vacances... Parfait alors ! J'entreprends de me lever de mon canapé tout petit pour me diriger vers mon bureau tout aussi petit lorsqu'une pensée m'interrompt : avant toute chose, je dois télécharger cette application.
C'est ainsi que j'attrapai mon premier pokémon, un soir d'août pluvieux.
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Je. Ne. Suis. Pas. Fan. De. Pokémon. Go. (Je ne fais que rendre mon personnage un peu plus sensible aux modes qui l'entourent ~) (Accessoirement, c'est peut être le seul élément de technologie actuelle qui apparaîtra dans ce... récit, puisqu'Internet et ses dérivés n'existent pas. Bon ok, je justifie juste mon incohérence...)
En fait, j'aime les chapitres courts.
J'espère que ça ne part pas trop loin pour la santé de votre cerveau huhu...Vala'
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Pelouse consommation
HumorInternet n'existe pas, et tout ce qui touche au plaisir non plus dans ce monde intrigant, en quelques sortes futuriste. Pour quitter la réalité, il faut parfois se montrer ingénieux ~ De nombreuses tentatives ont déjà été proposées à l'Illustre Min...