VIII

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L'histoire aurait pu s'arrêter là.

Mia aurait été emmenée à Seattle part le père d'Isabella.

Ou bien, il aurait pu l'emmener à Lynnwood.

Seulement voilà, son esprit de père lui avait dit d'aider le plus possible cette jeune fille en quête d'existence.

"Vous avez dépassé Lynnwood! Cria Mia

-Je sais. Le père de famille souri légèrement. Je dois faire une course à Bellingham. Je te déposerais là-bas, ça te va ?

-Pourquoi faites-vous ça?

-Tu as les yeux brillants de l'espoir. Et l'espoir est-ce qui fait vivre le monde. Les gens des alentours n'iront pas chercher à comprendre ta théorie. Peut-être certain. Mais je préfère t'avancer de ton but. Dis-toi que c'est un coup de pouce. Lorsque tu me parlais du Canada, j'y voyais en toi l'envie d'aller au bout de ton voyage. Alors si je t'accompagne à la frontière ce n'est pas pour toi, mais pour ta mère. Jamais tu ne rentreras tant que ton voyage n'est pas fini. Plus vite tu arriveras là-bas, plus vite tu rentreras.

-Malin.

-J'ai une fille. Ton histoire aurait pu se finir maintenant, je t'aurais raccompagné jusqu'à Seattle et...

-Vous ne l'avez pas fait."

Mia regardait le profil dessiné à la perfection de l'homme. S'il avait été un dessin, le contour de son visage au trait noir aurait pu s'envoler que son visage n'en aurait pas été déformé.

"Je peux vous posez une question ? Mia posa son visage contre la vitre froide.

-Bien sûr, nous avons deux heures devant nous."

Alors la jeune brunette commença à conter :

"Je crois que la vie a tué le rêve. Le rêve que j'ai fait.

-Quel rêve Mia?

-J'ai rêvé que je partais à la conquête du monde, que je traversais les montagnes, les mers, les océans et les rivières. J'ai rêvé des champs d'or, du bruissement de la vie dans le vent. J'ai rêvé que je réussissais ce que j'ai entrepris. J'ai rêvé que je pouvais faire quelque chose de ma vie. Pauvre petite fille que je suis, bête et naïve. Je pense que de simples paroles peuvent sauver des vies. J'ai à la fois l'impression d'être une adulte parfois, des souvenirs me reviennent, des souvenirs que je n'ai jamais vécus. Le soir, je me souviens des mains de cet homme sur mon corps dans ce motel. La journée, je me souviens du visage enfantin de ce garçon qui m'a sauvé des griffes de Seattle. Tant de choses se bousculent dans ma tête, même mes paroles ne concordent pas. "

La route était déserte. Le père d'Isabella ouvrit le toit de la voiture. Instinctivement, Mia se leva, le vent se prenait dans ses cheveux.

Tout va changer

"Il y a quelques années, j'ai rencontré la mère de Bella sur un camp de réfugiés en France, elle donnait des cours d'anglais tandis que je faisais la cuisine et le ménage. Un soir, alors que tout le monde dormait. Dans la nuit, j'ai vu dans ses yeux la tristesse, la honte, la peur. Je l'avais toujours vue riante, souriante. Elle m'avait dit que devant ces personnes, elle le serait toujours parce qu'ils en ont besoin. Le soir, elle s'effondrait. La fatigue, l'empathie. Une nuit, elle m'a raconté qu'un homme était devenu fou. Sa famille tuée, il avait tenté de passer en Angleterre avec son meilleur ami sous un camion. Son meilleur ami avait lâché et s'était fait découper sous ses yeux. C'est une personne très sensible. C'est ce qui fait son génie. Tu es très sensible aussi, beaucoup de choses te préoccupent, tu es une jeune fille intelligente, mais qui n'est hélas jamais sortie de chez elle. Seule du moins. Au lieu de vouloir prouver ta théorie en disant qu'elle est LA bonne, pars, pars juste à la découverte du monde de ses injustices et ses miracles.

La théorie des gens brisés [Réécriture]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant