J'étais attablé à mon bureau, une nuit chaude, comme à mon habitude. Dos voûté, tête penchée, main qui s'agitait, je dessinais. Les formes me venaient d'elles mêmes. Les couleurs s'ajoutaient dans mon esprit, et j'allais joindre pensée et réalité.
Je suis en train de créer, comme toujours depuis que je suis sur cette planète.
Mais alors que je m'étais attaquée à la couleur, tout s'effaça et un seul mot me vient à l'esprit.
"Pourquoi"
C'est vrai ça. Pourquoi continuai-je perpétuellement à m'obstiner, voulant ne serait-ce qu'effleurer la perfection artistique. Pourquoi continuai-je à griffouiller des suites de traits sur une feuille blanche. Pourquoi continuai-je à donner image à des personnages qui n'existe uniquement dans ma tête. Pourquoi faisais-je tout ça.
Je n'avais qu'une envie, c'est de lâcher mon marqueur. De tout plaquer, de tout laisser tomber ce dans quoi j'ai investi tant de temps. J'avais envie de tout déchirer, de jeter mes feuilles par ma fenêtre et de mettre mon matériel à la poubelle. J'en avais marre. Je ne voulais plus inventer, je ne voulais plus imaginer.
Je ne voulais plus créer.
Mais, malgré cette envie qui me tiraillait de tout mon être, mon marqueur continuait de glisser. Il continuait de faire son travail de colorieur malgré que je lui intimait l'ordre d'arrêter. Il continuait de dessiner, impassible à mon torrent d'émotion.
Alors je laissai faire, impuissante. Je me disais être faite pour ça. Je me disais que si j'arrêtais, j'en mourrai. Mais est-ce vraiment la vérité ?Pourtant, le marqueur continue de glisser.