AUSTIN
Son regard était atrocement vide. Ses larmes dévalaient sur ses joues. Ses yeux se déplaçaient rapidement vers moi et la main que l'homme portait sur son cou. Elle semblait connaitre la suite de l'histoire. Mais je ne me résolvais pas à la suivre. Elle était différente, elle était dotée de cette chose indescriptible qui la rendait spéciale. Pourquoi devait-elle payer pour les erreurs qu'avait fait son père ? Elle était si jeune, si fragile mais pourtant tellement encrée dans une vision du monde qui la détruisait. Elle, qui, quand elle entrait dans une pièce, illuminait notre journée rien qu'avec son sourire. Elle, qui, quand un rire sortait de sa bouche, pouvait faire en sorte de vous faire rire, vous aussi. Ambre était un rayon de soleil. Mais ce soleil ne brillait plus depuis bien longtemps. Elle était comme les étoiles, se cachant derrière les nuages. Elle encaissait sa misère avec un courage que je ne savais expliquer. Elle ressentait des choses profondes, des sentiments que j'ignorai moi-même. Elle me parlait de sa vie, comme si j'en faisais parti. Elle ne cessait de me parler de ses envies de voyages, pourtant, elle ne voulait qu'une seule chose auprès d'elle, sa famille et ses amis. Elle était brisée, je le savais. Elle avait tout perdu. Ambre avait des bleus partout sur les jambes, comme des constellations obscures sur les cuisses. Mais elle ne se plaignait jamais des coups qu'elle avait enduré. Elle se contentait de les observer avec dégoût. Elle disait qu'elle les trouvait hideuses, je trouvais que ces marques représentaient sa vie, elles faisaient parties de tout son être. Et puis elle avait maigrit, vraiment maigrit. Ses os se sentaient sous sa chair autrefois laiteuse. Son visage tellement jeune était en train de changer, pour devenir fade et sans vie, doucement, comme le soleil finit par disparaître avant même qu'on l'eût remarqué. Elle était un ange qui pleurait silencieusement. Le silence était désormais son seul moyen de s'exprimer. Et je l'entendais. Elle était semblable au vent qui faisait frissonner les feuilles des arbres : intemporelle. On ne savait jamais ce qu'il pouvait lui arriver. Il se pouvait qu'elle parte loin, sans que personne ne le sache. Il se pouvait qu'elle sauve le monde de ses petits bras. Il se pouvait qu'elle devienne si cruelle qu'elle n'aurait pas hésité à tuer sur son passage. Cependant, elle n'était pas comme ça, elle était bien trop gentille. Elle basculait souvent entre terre et mer. Elle aimait faire plaisir. Elle aimait les étoiles, beaucoup. Elle aimait la façon dont sa curiosité l'emportait. Elle aimait les défauts de tout le monde. Mais elle détestait les armes. La même arme qui était pointée sur sa tempe. Ce regard vide qu'elle m'adressait me dévastait l'âme, plus rapidement qu'une tornade. Elle m'observait dans l'impuissance la plus totale.
L'homme possédait un sourire machiavélique plaqué sur son visage. Son air était mauvais, son attitude l'était aussi. Ses cheveux gras, cuivrés, lui tombaient mèches par mèches devant ses yeux sombres. Des trous sur chaque parcelle de ses bras, il ne s'en cachait pas. Sa respiration était saccadée, autant que celle d'Ambre, se trouvant entre les mains de ce bourreau. Sa veste militaire était couverte de tâches jaunâtres semblables à de l'huile. L'homme semblait dans les vapes, défoncé, drogué par les piqûres qui lui trouaient les bras. Homme dont la vie l'avait fait prisonnier, aurait finit ses jours enfermé. Il la regardait, le regard méprisant. Elle n'osait plus bouger, terrifiée. J'aurais aimé savoir à quoi elle pensait, la vie était étrange parfois. J'aurais écrasé les souffrances qu'elle ne voyait pas, j'aurais entouré mes bras autour d'elle, tout en roulant vers le soleil. Mes yeux restaient figés sur la peur visible sur son visage.
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Il est temps de décrocher la lune [TOME 1]
Roman pour AdolescentsLe monde d'Ambre a toujours tourné autour d'un mystérieux secret qui hante sa vie. Quoi qu'il arrive, ce secret est présent dans sa vie, pour le meilleur et pour le pire. Sauf qu'Ambre, ignore ce qu'est ce fameux secret dont personne ne doit parler...