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- Feryel ? FERYEL ?

Ma sœur faisait tout pour me rendre folle, se cachant une fois de plus dans notre petit appartement de la rue Baudelaire. J'avais réussi à obtenir une chambre chez l'habitant et c'était tout ce que je pouvais me permettre avec mes fins de semaine chez Macdo et le peu d'allocations qu'on nous donnait. Malgré cela, ma petite sœur de 6 ans trouvait tout de même le moyen de me rendre chèvre et de me forcer à la chercher dans ce 30m2.

- Feryel, il est l'heure de partir à l'école. Si tu ne viens pas, je te laisserais seule et le loup te mangera.
Eh, cette technique à fait ses preuves. Ni une, ni deux; cette peureuse a surgi de la penderie en couinant et en s'accrochant à ma jambe.

- Mais Az, je veux pas y aller, je veux rester avec toi. La bas, ils sont méchants et ils ont dit que j'avais même pas de parents et que mes goûters étaient degueu. M'a-t-elle dit en baissant les yeux et en froissant sa robe.
- Feryel..., ai-je commencé en m'abaissant à son niveau, tu ne dois pas les écouter... S'ils disent ça, c'est parce qu'ils sont jaloux de toi, parce que tu es la petite fille la plus mignonne du monde et que tu as la plus cool des grandes sœurs sur terre.

J'ai fini ma phrase en lui tirant la langue, et elle s'est esclaffé avant de me faire un câlin. J'ai ri puis l'ai pris dans mes bras mais au fond de moi, je me suis dit que les enfants étaient toujours aussi cruels.

🔸🔸🔸

- Je comprends, mademoiselle. Mais vous savez comment sont les enfants entre eux. C'est difficile pour eux de se dire que les parents de Feryel "n'existent" pas. C'est un besoin de materia...
Ça faisait deja 15 minutes que la maîtresse de ma petite sœur déblatérait toute seule sans que je ne l'écoute réellement. Non seulement, c'est le matin mais en plus la psychologie infantile, tout ça, c'est pas pour moi. Je l'ai laisser finir, lui ai demander de faire de son mieux et me suis dirigée vers la porte. J'ai salué mon garnement avant de repartir en sens inverse, bousculant un homme au passage.
- Tu peux pas regarder où tu vas ?
- Pas besoin de m'agresser, tu vas pas en mourir. Lui ai-je répondu en levant les yeux aux ciels. Les français exagèrent en permanence.

Il est reparti en me lançant un regard noir, suivant un grand garcon sur le chemin du primaire. Pff, il est encore en CM2 ou quoi.
Oubliant ce gros con, je suis sortie de l'école et je me suis dirigée vers la gare.

J'en ai marre de prendre le RER, puis le métro. Presque 2 heures de transport tous les jours, c'est plus vivable. La solution serait de passer mon permis mais j'ai vraiment pas les moyens. Je pourrais arrêter les études et me trouver un boulot mais ce que je fais me plaît et je ne peux pas penser à moi, maintenant je suis tutrice, je dois penser pour deux.
Si seulement j'avais les moyens d'avoir un appartement sur Paris, ce serait mieux pour nous mais je peux à peine acheter de quoi manger et se vêtir donc l'appart parisien ne sera pas pour tout de suite.
Je me suis assise dans un strapontin à côté des portes, question d'expérience, avec le RER D, mieux vaut être proche de la sortie.
J'ai regarder le paysage de mon Essonne natale défilée et j'ai soufflée, lassée de cette vie lourde. Plus que 3 ans, et on sera libres.

🔸🔸🔸

Une fois de plus, j'avais récupéré Feryel en pleurs, avec un nouveau bleu sur la tempe. Sa maîtresse avait bafouillé et je me suis dis que lui crier dessus ne me mènerait à rien. Si ça ne tenait qu'à elle, je suis sûre qu'elle les bafferait deja tous de toute façon.

- T'as faim ?
- Non... Asrar ?
- Je t'ai déjà dit de pas m'appelée comme ça...
J'aime pas ce prénom. J'ai jamais aimé ce prénom. Tous mes amis - comme si j'en avais 30 - m'appelle Az, j'en oublie mon vrai prénom. Et tant mieux.
- Désolée Az... Tu n'es pas fâchée contre moi ?
- Non bébé. Mais on en parlera plus tard. Il faut qu'on aille faire quelques courses.

Loin des hommes - PNLOù les histoires vivent. Découvrez maintenant