Les Ailes de l'Ensorceleuse

~CHAPITRE 10~

Le trajet passe rapidement et heureusement car je manque de me faire percuter plusieurs fois par d'autres automobilistes tellement je suis perdu dans mes réflexions.

Arrivé chez moi, je marmonne un vague salut à ma mère et ma sœur, gravis les marches qui mènent à l'étage et m'enferme dans ma chambre.

Me laissant tomber lourdement sur mon lit, je pousse un profond soupir et enfouis ma tête dans mon oreiller, tentant de remettre de l'ordre dans le fil de mes pensées.

C'est cet instant précis que choisit ma très chère génitrice pour faire irruption dans ma chambre, l'air surexcitée.

- Tu étais chez Esmérya ? Me demande-t-elle la voix mielleuse.

- Euh...Ouais pour récupérer des cours.

- Menteur ! Hurle mon insupportable petite sœur depuis le couloir, Jasounet est passé tout à l'heure pour te les laisser !

Je jette un regard noir vers la porte qui semble avoir les oreilles un peu trop longues puis observe ma mère qui arbore un sourire triomphant aux lèvres.

Elle se lève d'un bond et tapote dans ses mains d'un air satisfait.

- Et bien quoiqu'il en soit, il semblerait que cette jeune fille t'ait remis sur pieds ! Plus de fièvre à ce que je vois !

Je grimace mais suis contraint d'acquiescer.

Ma mère me fait un clin d'œil, pivote pour rejoindre la sortie et alors que je pense être tiré d'affaire, elle s'arrête et se retourne vers moi, les sourcils froncés.

- Tu te protèges j'espère ?

Je manque de m'étouffer d'effroi, ce que ma mère interprète très mal et prend pour un aveu.

- Enzo, me sermonne-t-elle, c'est très important de se protéger ! Tu sais, ce n'est pas uniquement pour t'éviter d'être papa précocement ! Tu peux attraper pleins de cochonneries comme...

- Non mais t'inquiète maman, je sais, la coupé-je précipitamment avant qu'elle ne m'énumère une liste horrible de toutes les MST existantes. Mais, euh...Tu vois on a pas...Hrum...Euh voilà quoi.

- Oh, je vois ! S'exclame ma mère pas le moins du monde embarrassée par la tournure de la conversation, et bien si jamais tu as besoin de conseils...

- ...Tu es là, oui maman je sais, je n'y manquerai pas, assuré-je en la poussant dehors. Maintenant, oust, je vais faire mes devoirs !

- Bien-sûr mon poussin, je te laisse tranquille !

Je lève les yeux au ciel devant l'emploi de ce surnom débile mais ne dis rien.

Au fond, je suis plutôt content que ma mère vienne m'embêter avec des histoires pareilles. Ça prouve qu'elle est de bonne humeur et ce n'est pas souvent le cas depuis le décès de mon père.

D'ailleurs je me demande bien pourquoi elle est dans une si bonne passe, nous sommes pourtant en avril et mon père est décédé le 27. Aurait-elle enfin accepté de consulter un psy pour se libérer de ce poids ?

A moins qu'elle ait rencontré quelqu'un d'autre ?

Ma poitrine se compresse à l'idée que ma dernière hypothèse soit juste. Je balaye cette pensée en secouant la tête mais un goût amer me reste en bouche. Je ne peux imaginer ma mère avec un autre. Je crois que je me sentirais trahi ou que j'aurais peur qu'il remplace mon père, me volant le peu de souvenirs qu'il me reste de lui.

Tentant d'effacer ces mauvaises réflexions de mon esprit, je me penche sur mon carnet de rêves et entreprends de le relire en diagonale.

Il n'y a pas grand chose d'intéressant, ni de complet à part deux rêves qui semblent se passer au même endroit. C'est d'ailleurs très étonnant parce que je me souviens assez nettement de dialogues. Néanmoins, je n'ai aucune piste pour interpréter ces songes, je décide donc de les laisser de côté pour l'instant et de me concentrer sur le reste de mes notes, aussi imprécises soient-elles. D'ailleurs quand je me relis, je me dis que je ne suis pas tout à fait normal :