Au cœur d'un océan céleste, les nuages se fondaient peu à peu en un immense bâtiment d'albâtre et d'onyx. La lumière mauve du soleil se reflétait sur les murs d'une blancheur extraordinaire, offrant à tous les passants une vision splendide de la Grande Demeure Divine.
De l'autre côté de cet océan, une silhouette observait le glorieux bâtiment, tapie dans les ténèbres, portant en écharpe les ombres projetées de l'humanité toute entière. Ses yeux étaient vides, si vides qu'ils resplendissaient par leur absence. Et pourtant, il voyait tout.
Son regard voyait au-delà de l'océan, au-delà de la Demeure, au-delà du Domaine des Dieux. Vers un Ailleurs. Proche. Lointain. Vers des personnes qui avaient oublié jusqu'à son existence-même, et ce depuis des millénaires.
Des gens qui avaient oublié ce qu'était la peur.
A ses poignets, d'étranges symboles luisaient légèrement en émettant un léger vrombissement.
« Il est temps. »
La voix avait résonné directement dans sa substance, comme si elle avait toujours fait partie de sa personne. La voix poursuivit :
« Iels nous attendent. »
Tout autour, le monde sembla se renverser. L'océan déborda peu à peu, engloutissant tout sur son passage. Au loin, toujours immobile, la Demeure toisait le reste du monde, imperturbable.
Aux côtés de l'ombre, une seconde silhouette apparut. Elle semblait humaine, si ce n'était pour son visage, semblable à un masque finement ouvragé et aux traits délicats. Ce visage si étrange changeait encore et toujours, lentement, assurément, mais jamais ses lèvres ne bougeaient.
Le ciel leur venait désormais jusqu'aux chevilles, offrant l'illusion de les voir tenir dans le vide, comme toutes les créatures qui les entouraient. Il s'agissait d'une foule hétéroclite, où chaque apparence était plus étrange que la dernière. Là, un immense lion flânait nonchalamment sur une statue à sa propre image, sculptée dans la chair argileuse de ses ennemis. Ici, un humanoïde se paraît d'un voile de larmes. A la lumière d'un soleil désormais vert, l'odeur âcre du sang embaumait l'air.
Ainsi venait le jour de son exécution.
En silence, iels le déshabillèrent.
En silence, iels le firent s'agenouiller devant la Tapisserie d'Acier.
Le bourreau, une petite créature étrange, aux yeux recouverts par des ailes, et à l'apparence diaphane, tenait entre les mains une lame nue recouverte de runes. Du sang coulait de ses mains, un liquide noir et huileux qui tombait dans le ciel en une pluie sombre recouvrant peu à peu le ciel pour faire place à la nuit.
« Ta faute est trop grave pour être ignorée. Le Haut Conseil a jugé. A compter de ce jour, plus jamais tu ne seras tel que tu es aujourd'hui. Lorsque tu baigneras dans les ténèbres de notre soleil, tu seras à jamais transformé. Il n'y aura plus que moi pour me souvenir de ton existence passée. Une dernière parole ? Une dernière parole ? »
En l'absence de réponse, le bourreau s'approcha lentement du mur recouvert de milliers de chaînes, longues, fines, épaisses, courtes, en acier ou en cuivre, en or ou en améthyste. Entre ses mains délicates, une chaîne d'obsidienne coulait lentement, glissant entre ses doigts à la façon d'un serpent.
Puis il n'y eut plus que la douleur.
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[Apocryphe] (Improctobre 2016)
FantasíaSérie de nouvelles, chacune écrite en un jour tout au long du mois d'octobre et se déroulant toutes dans l'univers d'[Apothéose]. Sera sûrement retravaillé par la suite. Titre non-définitif aussi.