Fighter

3.

- Bonjour Quinn.

Recroquevillée près de la fenêtre, je tourne la tête au son de sa voix. Il est déjà venu me voir trois fois depuis mon arrivée ici mais je n'ai jamais ouvert la bouche. Il me pose des questions mais je n'y réponds pas, je n'en vois pas l'intérêt. Je n'ai rien à lui dire et je ne raconte pas ma vie à n'importe qui. Il s'assoit sur le bord du lit sans me lâcher du regard. Ses cheveux blonds sont en désordre mais bizarrement ça lui va bien. Sa chemise blanche laisse ressortir les quelques poils présents sur son torse.

- Tu ne t'es toujours pas décidée à parler ? me dit-il.

À ton avis ? Il se lève du lit, s'approche de moi et s'assoit sur le sol à mes côtés. Je n'aime pas cette proximité... Il m'intimide bien qu'il n'ait rien d'effrayant. Il ne dit rien et me regarde en attente d'une réponse. Je ne le lâche pas non plus du regard, totalement déstabilisée par le bleu gris de ses yeux. Ça peut paraître absurde, mais la façon qu'il a de me regarder comme s'il était capable de lire dans mes pensées me perturbe. J'ai l'impression qu'il essaye de scanner mon esprit d'un simple regard. Il brise la glace au bout de quelques secondes en soupirant.

- Il faut que tu me parles, Quinn. Tu ne sortiras pas plus vite d'ici en restant silencieuse. Je ne cherche qu'à t'aider tu sais, je ne te jugerais pas, dit-il calmement.

Je baisse la tête. J'ai l'impression d'être une enfant que l'on sermonne car elle a fait une bêtise. Pourquoi veut-il absolument que je m'exprime ? Je n'ai rien à lui dire. Et si je ne parle toujours pas, que vont-ils faire ? M'envoyer dans un asile ? J'ai l'impression d'y être déjà... J'ai l'impression qu'on me prend pour une folle.

- Quinn, il faut te soigner. N'aie pas peur de ta maladie, affronte-la.

Ma maladie ?! Mais je ne suis pas malade ! Quand vont-ils enfin le comprendre ?! Des larmes de rage coulent le long de mes joues. Je me mets à hurler. Ils croient qu'ils peuvent me changer mais c'est faux ! Un psychologue ne changera rien à ce que je suis ! C'est des conneries tout ça...

Niall pose ses mains sur mes bras pour me calmer mais je le frappe de toutes mes forces. Je n'en peux plus, je ne les supporte plus, tous autant qu'ils sont. J'entends plusieurs personnes entrer dans la chambre mais Niall leur demande de partir tout en évitant les coups que je lui donne. Je ne comprends pas pourquoi il reste calme alors que je m'acharne sur lui, alors que j'évacue toute ma colère.

- Quinn, calme-toi s'il-te-plaît.

Je ne l'écoute pas mais il attrape mes bras pour les immobiliser. J'essaye de me débattre mais il est plus fort que moi. Je continue de hurler à m'en péter les cordes vocales. Je n'en ai plus rien à faire de toute façon.
J'arrête de me débattre et je sens la prise de mon psychologue se relâcher. Il tire doucement dessus et me rapproche de lui pour me prendre dans ses bras. Son geste n'a rien de déplacé, il se veut seulement rassurant, malgré que ce ne soit pas très professionnel. Je ne dis rien et souffle un bon coup pour me calmer.

J'ai honte d'avoir craqué devant lui, d'avoir fait une "crise" comme disent mes parents. Je ne réalise pas ce que je fais lorsque ma colère prend le dessus. Tellement de sentiments se mélangent en moi que je ne sais plus ce qui est bien de ce qui est mal ; des "troubles de l'humeur" m'avait dit le médecin. Mais je ne suis pas malade, il faut simplement que je me calme. Je sens mes paupières s'alourdirent lorsque des bruits de pas résonnent dans la chambre. La seule chose que j'entends avant de m'endormir c'est...

- Vous voyez qu'il n'y a pas besoin de sédatifs pour la calmer.