Harcelée

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Je me présente. Jeune femme de 21 ans, étudiante, optimiste et très créative.

Pourtant, ça n'a pas été toujours comme ça. Parce qu'il y a un temps, pas si lointain que ça, où j'étais dépressive. J'ai été harcelée scolairement du CE1 à la 3ème.

Tout a commencé à la fin de mon année de CP. J'ai déménagé, et donc j'ai changé d'école. Je suis arrivée en CE1 sans connaître personne, là où eux se connaissaient tous. J'ai tout de suite été mise à l'écart. Je passais mes récréations assise contre un mur, à lire des bouquins. Pendant deux/trois mois, on m'a foutu la paix, personne me parlait. Sauf que j'étais une tête de classe à l'époque. Et donc dans l'esprit de ces abrutis, quand tu as un minimum de connaissances, tu es une "salope", "connasse" et autres jolis mots dans le genre qu'on a pu me lancer au visage.

CE2. Ils prennent confiance en eux. C'est le début des crachats à mes pieds, des jets de billes à la tête. J'ai toujours été assez distante des gens. Un psy, que je voyais déjà à ce moment là, avait même des doutes sur le fait que je sois autiste, ce qui n'était pas le cas. J'aimais juste pas me mêler aux autres. Et bah ça ne s'est pas arrangé. La seule chose qui me permettait de tenir, c'était les cours. J'avais une prof géniale, et j'adorais apprendre. Sauf que ça les énervait, eux, quelqu'un qui aime l'école. On a commencé à écrire des insultes sur ma table, à me jeter des bouts de gomme, à écrire sur mes cahiers. C'est à cette époque que j'ai commencé à me réfugier dans l'écriture, pour les fuir eux.

CM1. On a eu un nouveau garçon dans la classe. Il a subi le même sort que moi. Alors on s'est rapproché, assez naturellement. Si moi j'étais devenue insensible aux insultes, lui avait du mal à les encaisser. En plus, il n'était pas "typé européen", et donc les insultes racistes allaient bon train. On s'est soutenu mutuellement, toute l'année, et c'est devenu un rempart assez important pour moi. Sauf qu'il en pouvait tellement plus, que dès la fin de l'année, il a changé d'établissement.

CM2. Putain, j'aurais du le suivre. Vraiment. Maintenant que j'étais de nouveau seule, j'étais une proie facile. Et le pire, c'est que je le savais. C'est là que j'ai commencé à déprimer et à développer de l'anxiété. La perte de mon ami m'a totalement détruite, pour tout dire, et j'ai été incapable de remonter la pente. Alors je me suis refermée sur moi-même. J'ai commencé à écrire des textes très sombres, et à devenir agressive vis à vis des personnes de mon établissement.

6ème. J'ai la malchance d'être dans un petit village. J'ai retrouvé les même connards au collège. Quelle joie, j'ai adoré ce changement d'établissement ! La magnifique époque où les mecs découvrent qu'ils ont des couilles et décident de se lancer des défis. L'un d'eux, c'était de m'embrasser et de m'humilier publiquement. Il l'a fait. Sauf que ce qu'il avait pas prévu, c'était ma réaction. Je suis entrée dans une colère noire. Mon pied est parti tout seul, et alors qu'il était à terre, je me suis défoulée. Il y a eu un long silence. Lui il était en train de chialer, à terre. Je sais que c'est mal, mais moi je me suis jamais sentie aussi bien qu'à ce moment là. Je lui ai pété le nez d'ailleurs.

Maintenant que je savais que j'avais le courage de me défendre, j'ai remonté la pente. J'étais toujours fermée à tout contact, on me l'a même reproché, mais les gens me foutaient la paix. Je n'étais plus une proie intéressante maintenant que je savais répliquer. Le psy a diagnostiqué la fin de ma dépression en début de Seconde. Dès lors, j'ai décidé que j'allais envoyer le monde entier se faire foutre, j'ai repris les rênes de ma vie, et j'ai fini par devenir celle que je suis aujourd'hui.

Si vous êtes harcelés, ne vous inquiétez pas. Tenez le coup, l'orage finit toujours par passer. Trouvez une activité que vous aimez, créative, pour laisser parler votre haine. Et ne baissez jamais les bras. J'ai pensé au suicide, une fois, mais quand j'ai vu tout le mal que ça aurait fait à ma famille, j'ai renoncé. Des gens vous aiment, parfois là où vous l'attendez le moins. Tournez vous vers les réseaux sociaux, vers votre famille, peu importe tant que vous savez que quelqu'un vous aidera. Et si vous êtes harceleur, j'espère de tout mon coeur que vous aurez assez de matière grise pour vous rendre compte que ce que vous faites détruit les gens, et que la mort d'une personne, vous l'avez pour toujours sur la conscience, il faudra vivre avec. Seriez-vous capable de vous regarder dans un miroir après avoir provoqué le suicide de quelqu'un ?

Réveillez-vous. Réfléchissez.

HarceléeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant