Des chauves-souris et des hommes

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Pendant ce temps ...

Une chauve-souris fendait l'air de ses ailes noires, un papillon entre les mâchoires. Elle volait haut dans le ciel, côtoyant les nuages avant de redescendre soudainement dans une vrille frénétique vers les hautes cimes des pins. Elle ouvrit les ailes et plana entre les arbres. Lorsque les hautes tours de sa maison furent en vue, elle ralentit et amorça une longue descente précautionneuse. Elle tourna autour de la plus haute des tours et s'engouffra dans une des alcôves abritant les fragiles fenêtres en vitrail.  

Paf ! La pauvre bête tomba en arrière en chute libre. Visiblement la fenêtre était fermée ... Elle bâtit des ailes vainement et vit sa proie s'échapper au loin. Elle tenta de se retourner, y arriva finalement, mais trop tard pour éviter la cime du grand pin noir qui bordait le jardin du château. Après une longue et douloureuse dégringolade, elle finit par arriver à terre, et rampa vers le pont-levis. L'étrange mammifère était presque arrivé lorsque la roue d'une charrette vint la percuter en pleine face. Elle mit quelques minutes pour se remettre du choc et continua à ramper. Arrivée au niveau de la herse, elle murmura une formule. C'est alors que ses ailes se raccourcirent, son corps s'allongea et la chauve-souris noire se transforma en un être humain à la peau pâle comme la craie.


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La charrette s'engagea sur un vieux pont-levis. La herse rouillée, levée, laissait transparaitre ses pics émoussés par le temps et les intempéries. La carne passa sans être effrayée pour un sou et fit claquer ses sabots ferrés sur les dalles de la basse-cour. Arrivés vers ce qui semblait être une étable, Rainfield ordonna l'arrêt à la pauvre bête à l'aide d'une pression brève sur les guides de cuir. Il descendit d'un bond et atterrit dans un bruit sourd. Après avoir attaché l'animal, le bossu se dirigea vers l'arrière de la carriole pour prendre les vivres fraichement acquis. Il s'en saisit pour se diriger vers le cellier avant d'interrompre son mouvement et de se retourner vers son passager. Celui-ci était stoïque, vide de tout sursaut de conscience. Le vieux domestique finit par se demander s'il ne s'était pas figé sur place. Il le héla sans obtenir de réponse en retour. Puis après d'interminables minutes d'attente, une lueur passa sur les yeux d'Hector. Rainfield en profita :

- « Voulez-vous bien venir ou préférez-vous donc rester dans la charrette comme un vulgaire sac de pommes de terre ? »

- « Oh ! Oui, bien sûr ! Je viens, Je viens ... »

- « Bon. Suivez-moi. Je vais vous indiquer le chemin. »

Tandis que le vieillard s'avançait vers la grille menant à la haute-cour, un bruit soudain - ressemblant au feulement d'un chat mouillé très en colère - se fit entendre. Rainfield se crispa en pensant aux coups de bâton qui allaient bientôt s'abattre sur lui. Il avait encore commis une bêtise.


Les rocambolesques péripéties de Darkula et son acolyte RainfieldOù les histoires vivent. Découvrez maintenant