Planet Fleed - Pour une raison politique avant tout

Chapitre 14

Kruspiac, préfecture de la région du PicBleu était en effervescence en cette période de fête du Renouveau, comme dans toutes les grandes villes de la planète. Pendant une semaine, la population assistera à des spectacles de danse, de musique, de voltige aérienne, de combat jusqu'au final, sept jours après. Ce dernier jour sera le point culminant : en effet, cette année, le mariage entre le prince héritier d'Euphor et la princesse Végalia fera la clôture en apothéose.

Cette ville, située à la frontière des Grands Lacs, vivait un peu en autarcie et recevait les informations sur les événements planétaires assez tardivement. Les citoyens entendaient les rumeurs d'une guerre galactique sans pour autant craindre pour leur vie. Ils ne connaissaient pas toute l'importance diplomatique de ce mariage. Ils avaient eu l'occasion de voir le portrait officiel des fiancés et la joliesse de leur visage leur faisait imaginer toute une romance. Ils étaient jeunes, ils étaient beaux, ils allaient assurer avec brio l'avenir de la planète en leur apportant des alliés. De longues années de paix étaient donc assurées.

Les habitants qui n'avaient pas pu se déplacer directement dans la Capitale, allaient participer aux réjouissances par l'intermédiaire des panneaux lumineux placés dans la place centrale de chaque banlieue afin de retransmettre le mariage en direct. C'était un tour de force majeure car les communications satellites avaient toujours eu des difficultés dans cette partie reculée. Le premier test serait la diffusion des premiers pas de la princesse sur le sol euphorien.

Les gens s'installaient sur l'herbe avec leur panier de pique-nique, les enfants courraient les uns derrière les autres en attendant les premières images. Un groupe de musique folklorique jouait sur l'estrade installée pour la semaine. Des marchands de boissons et de friandises vendaient leurs produits dans des paniers, d'autres proposaient des drapeaux, des masques, des colliers de fleurs. Le soleil brillait de mille feux, un léger vent atténuait la chaleur. L'ambiance était détendue et insouciante. Euphor, par le mariage du jeune héritier, allait entrer dans une nouvelle ère.

Baleth, le gouverneur de Kruspiac s'avança sur l'estrade.

- Mes chers compatriotes. Nous avons reçu un message d'Euphor, la Capitale. L'escorte de la Princesse Végalia est dans notre stratosphère. Elle devrait entrer dans notre atmosphère d'ici une heure. Nous allons brancher les écrans afin de pouvoir suivre cette arrivée. J'espère que vous pourrez profiter de cette belle...

Un tonnerre retentit au loin suivi de près par une explosion. Le sol trembla et une obscurité envahit soudain la grande place, coupant la parole au gouverneur. Levant la tête, il ouvrit de grands yeux et lâcha le micro de frayeur. Il recula, trébucha sur les instruments de musique et les musiciens restés sur scène. La population suivit son regard et poussa un cri commun. Ce fut la débandade lorsque tout le monde se mit à courir dans tous les sens. Les femmes tentaient de rassembler leurs progénitures, sans regarder si les enfants qu'elles attrapaient étaient bien les leurs. Certains hommes les regroupaient, essayant de les protéger de leurs corps, d'autres courraient vers la réserve d'armes et de munitions à l'autre bout de la ville.

Des jets lumineux jaillirent des soucoupes qui venaient d'envahir l'espace aérien de la région du PicBleu.

***

Au même instant.

Le grand jour était là. Végalia allait fouler pour la première fois le sol euphorien et je perdrais définitivement, d'ici une semaine, ma liberté. Une semaine de festivité, où tous les soucis des derniers mois seraient oubliés momentanément. J'avais assez mal dormi. Non, en fait, je n'avais pas du tout dormi. La veille, je participais à une soirée en mon honneur à la taverne de L'Oiseau bleu, enfin, plutôt en l'honneur de la fin de mon célibat. J'étais rentré assez tard, avais essayé de me reposer mais n'avais pas trouvé le sommeil. Une sombre menace reposait sur mes épaules. Cette sensation ne me quittait pas depuis mon attentat quinze jours auparavant. Les recherches n'avaient rien donné pour retrouver Octavius, les survols aériens non plus. Personne ne comprenait, même les imminents chercheurs scientifiques, sur ce qui s'était passé. Les radars se taisaient, comme si un voile était projeté autour de la planète.