Racontez-moi.

29 1 3
                                    




Il marchait, tournait en rond plutôt, dans la salle. Ses pas claquaient durement sur le sol bien lissé, la lumière peinait à éclairer cette  petite pièce grisâtre. Elle, elle était attachée, pieds et poings liés, devant une table.

Bon, ben elle allait attendre qu'il ait finit, c'est pas comme si y'avait des tonnes de trucs à faire sans l'usage de ses mains et de ses jambes.

Il finit par se tourner vers elle, la mine grave. Ses traits étaient marqués par la fatigue, l'attente, la tristesse, la dépression peut être, la frustration de n'être jamais devenu ce qu'il aurait voulu être, et peut-être même l'alcool... Si elle laissait vagabonder son imagination. Il frappa la table de ses poings. Elle ne sursauta même pas, en habituée.

"Parlez.

-Non."

Elle le fixa droit dans les yeux. Nope. C'est tout. Fin de l'histoire. Il soupira. Il se massa les tempes d'un geste las, et vint s'asseoir sur le bord de la table. Il la fixa sans vraiment la regarder.

- Pensez. Réfléchissez, ouvrez-vous, ouvrez-moi vos secrets.

- Pourquoi je ferais ça ? Réfléchissez ; Quels bénéfices y aurait-je ?

- Le bénéfice de ne pas crever, peut être ? Ou alors de sauver des millions de personnes ? Des enfants, vous tueriez des enfants ? Vous devez bien avoir une famille.

Elle déglutit.

-Non. Je n'ai pas de famille. Je n'en ai jamais eue.

- Le monde a besoin de gens comme vous. Des capables de les sauver.

Elle sourit de toutes ses dents, et répliqua :

- Le problème serait plutôt de savoir si il en ont envie ou pas...

Il ne tint plus.

- Mais on s'en fout ! (il soupira) Vous n'allez vraiment pas vous livrer, n'est-ce pas ?

- (elle fit un grand sourire) Aucunes chances.

La porte claqua subitement derrière l'agent. Il se retourna vers l'arrivant. L'agent se leva et adressa un hochement de tête respectueux vers celui-ci.

Un homme assez grand apparut à la jeune fille. Il portait des lunettes rectangulaires miroitante, ses cheveux blonds étaient plaqués sur sa tête avec du gel. Il sirotait à la paille ce qui semblait être un soda.

- Oh qui si, elle va se livrer.

Un bruit de succion sortit de son verre, et frustré, il le lança à travers la pièce sans s'en soucier.

- Il suffit pour cela que je ne lui dise que quelques mots.

La jeune fille se redressa sur son siège, curieuse de savoir ces quelques mots qui, d'après l'agent, allait la faire cracher le morceau. Impossible. Rien ne pouvait la faire parler, elle serait muette. Pas même la torture. Il tira une chaise par son dossier, et s'assit dessus à l'envers. Il pencha la tête sur le côté. Elle plissa les yeux. L'homme enleva ses lunettes, les plia, et les glissa dans sa poche. Il avait des yeux gris, mais pas gris froids, de dureté comme elle s'y serait attendue, non, ils étaient d'un gris bleuté étrangement doux. Ilse fixèrent l'un et l'autre, yeux plissés. Qui es-tu, homme de l'ombre ? Qui es-tu, jeune fille aux milles secrets ?

Elle se prit à imaginer sa vie. Allait-il rentrer chez lui, après le travail ? Sera-t-il seul ? Sortira-t-il avec des amis, ou préfèrera-t-il une soirée près de sa femme si il en a une ? Y a-t'il une petite fille aux grands gris qui attend son père ?

Elle secoua la tête. Il n'obtiendrait rien d'elle. Rien.

Il lui sourit, comme devinant ses pensées.

"Hazard voit tout."

Nooon...

Il sait.

Elle devint livide, et fut secouée de frissons et de tremblements. Non... Non, non, non, non, non, non... Comment il savait ça, lui ?! Non... Non, c'est pas possible... Non... ! Pourtant...

Le fait de savoir. Il n'y avait que ça pour allumer cette lueur qui brillait dans ses yeux. Elle ne voulait, ne pouvait pas l'admettre, mais il savait.

Elle avala sa salive, humidifiant sa gorge sèche et nouée. Elle fixa son regard sur la pointe de ses chaussures.

- Alors, miss ?

Il pencha de nouveau la tête sur le côté, amusé de la situation.

Elle inspira à fond, et commença son récit.

.Hazard.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant