Chapitre 9: Partie 1

2.3K 214 29
                                    

Bonne Lecture ~♡

Tout me semble compliqué.

Tobias et moi reparlons comme avant, mais à chaque fois que je le regarde, je dois me reprendre pour arrêter de fantasmer. Je lutte contre moi-même pour ne pas me leurrer. J'ai l'impression de constamment devoir me taper sur les doigts.

Être si proche de lui et à la fois aussi éloignée est une vraie torture. Comment fait-on pour oublier ses sentiments au juste ?

On nous explique toujours comment se sociabiliser, comment aimer, mais jamais comment se recentrer. L'amour, wow, un sacré mot que je vais bannir de ma vie ! Une expérience me suffit amplement. Ça m'a menée à la déception et je me surprends à râler constamment.

Nous sommes à la Médiathèque, c'est mercredi, il me reste 12 jours avant que l'année soit terminée. Mais il y a un énorme problème, (je veux dire par là, un encore plus embarrassant que les autres) je n'arrive pas à réviser.

Ça n'a pourtant jamais été un problème. Avant, il me suffisait de m'asseoir à mon bureau et je me plongeais dans les études facilement, mais tout a changé.

C'est insupportable, je subis tellement de changements en ce moment que je perds complètement le contrôle de la situation. Oui, moi, Scarlett, reine du contrôle, toutes épreuves confondues, je suis incapable de tout résoudre.

C'est navrant. J'écris, je gomme, j'écris à nouveau, je relis les mots, je gomme, froisse la feuille dans un excès de découragement.

J'en ai marre.

Je jette un coup d'œil furtif à Tobias, ça m'étonne toujours autant de le voir étudier avec autant de facilités. Loin du Tobias dont il donne l'image, l'espèce de perdu à l'écart, il se trouve être un vrai intellectuel.

Je soupire, je connais mes leçons, mais j'ai tellement la pression que je perds tous mes moyens. J'ai impérativement besoin d'être première à ce fichu examen. Je dois sauver un des deux mois de mes vacances, je ne tiendrais pas le choc autrement. 

Je regarde la mine de mon critérium, c'est vraiment crevant comme situation.  Je m'arrête de penser en un instant: je suis en train de déprimer ?!

Je présente tous les symptômes de la dépression... Et je les présente depuis un bout de temps... Un an ? Deux ? Je ne me souviens plus.

Cette impression que la vie ne m'apporte rien, qu'un boulet m'entraîne irrémédiablement vers le fond. Cette tristesse constante. Oui, récemment le sentiment c'était atténué, mais ma « déception amoureuse » a remis les choses sur le tapis.

Je dois me détendre et relativiser, je ne veux pas rester comme ça.

- Scarlett, on fait une pause ? Je sature, rigole Tobias.

Moi aussi. Je lève les yeux. Je réfléchirai ce soir. Nous allons boire un coup et nous nous remettons à travailler une trentaine de minutes plus tard. A 21 heures, je me résous à rentrer, embrasse Tobias et file.

C'est quoi ma motivation au juste ? A part le fait de faire plaisir à ma famille ?

Je ne peux pas rester comme ça, j'avance sur place. Et moi qui pensais m'en être sortie !

La soirée est une longue réflexion inutile et comme si ce n'était pas suffisant, je suis de nouveau confronté au problème le lendemain dans l'après-midi. Convoquée chez l'assistante d'orientation, je franchis timidement le pas de la porte et découvre une petite femme potelée assise derrière un grand bureau de bois passablement massif.

Elle me fait signe de m'asseoir, ce que je fais.

- Mademoiselle, je vous ai convoquée étant donnée que vous n'avez toujours pas fait parvenir vos vœux d'orientation, lance-t-elle un sourire contrit flanqué au visage.

- Je m'excuse, je n'ai pas encore eu le temps d'en parler avec mes parents, avouai-je à contre cœur. Je dois vous le rendre quand ?

- Au plus tard, jeudi prochain.

Je sors blanche du bureau, tu cherchais un but ? Commence par trouver ton orientation...

Énervée contre moi-même, je rejoins Tobias au refuge, prends ma pochette dans mon sac et sors la feuille en question. Bien sûr que je l'ai et remplie par mes parents! Je regarde les trois noms d'universités inscrits dans les cases. Je ne peux pas me résoudre à rendre cette feuille.

Je n'arrive pas à réfléchir, il me semble limpide que ce qui est inscrit, ne me représente pas. Je ne veux pas de ces grandes universités, ni de ces bling-bling. J'ai assez vu de strass et paillettes comme ça. J'aimerais juste réellement découvrir ce que j'entrevois de temps à autre.

Cette chose que j'aperçois des fois. Difficile à atteindre, compliquée à garder et en constante fuite. Les conditions nécessaires semblent improbables à réunir.

La quête du bonheur est-elle donc si inaccessible ?

Je ne suis pas dans les bonnes conditions, tout ce qui me stimule c'est le semblant de liberté que je recherche. Je déchire le papier en petits bouts et le jette dans la première poubelle que je vois.

Le temps passe dans un drôle de brouillard et j'ouvre enfin les yeux en glissant les clés dans la serrure de la porte d'entrée. Toujours dans mon étrange réflexion, j'aperçois des valises.

Interloquée, je monte à l'étage. Un silence de mort règne dans la maison.

Dans le couloir, la lumière jaillie de la chambre de Sean et éclaire le mur en face d'où elle est projetée.

Je reste immobile un instant. Ça fait maintenant deux mois et demi que Sean est parti...

Pourquoi personne ne m'a prévenu de son retour ?! J'avance d'un pas incertain jusqu'à la chambre et pleine d'espoir, je vois la silhouette de Sean se dessiner. Il est là, en train de s'étirer tel le plus gros fainéant du coin et quand il se retourne, je sens mon cœur rater un battement.

Depuis nos discussions, je n'ai pas pu m'empêcher de languir son retour. L'inconnu est devenu un vrai grand frère dont l'absence ne se ressent que trop.

- J'ai cru que tu ne rentrerais jamais ! dit-il finalement en souriant.

Je n'ose bouger de peur de le voir disparaître. Je le regarde bêtement. Et le soulagement m'envahit, ça y est les choses vont rentrer dans l'ordre.

L'aiguilleur est de retour.

DrownedOù les histoires vivent. Découvrez maintenant