Le Livre

87 6 1
                                    

-Rebecca! Descend!
  -J'arrive 'man
Je descendis les escaliers en courant. Je regardai une dernière fois ma montre en me préparant au sermon de mon meilleur ami en me rappelant qu'il n'avait pas que ça à faire que de m'attendre dans un café. Je passai dans le salon en courant quand ma mère me cria:
  - Et mon bisou?!
  - Pas le temps 'man, répliquai-je
J'ouvris la porte et me heurtai à une montagne de muscles ambulante remplie de pain frais et de fêta. Les traites, ils savaient que j'allai sortir et ont acheté ce fromage rien que pour m'inciter à rester.
  -Eh Becca, s'écria Alex. Regarde un peu où tu vas quand tu marches.
Je reculai et m'excusai:
  -Désolé Al, mais je suis pressée et bien plus qu'une orange.
  -Alors tu ne manges pas la fêta avec nous? demanda-t-il avec un sourire au coin des lèvres.
  -Ah Ah! Très drôle, dis-je. Vous saviez que je sortais et vous avez acheté mon fromage  préféré exprès. Bandes de traites, accusai-je en prenant ma besace.
  -Tchao Bella! s'exclama Alex
Je sortis de l'appartement et entrepris mon voyage jusqu'au Starsbucks à un pâté de maisons d'ici. Mon appartement était plutôt bien situé. Dans la partie rénovée du vieux Lyon -celle-ci coûtant moins chère-, l'endroit était calme et pour une belle journée de fin de printemps peu peuplé. Je tournai à droite et continuai ma course jusqu'au café. Lorsque que j'entrai, mon ami se retourna, secoua la tête, montra sa montre et soupira. Je me traînai jusqu'à mon fauteuil en patchwork en murmurant un "désolé" et prit le capuccino décaféiné qu'il m'avait commandé. J'en bus une gorgée et fis la grimace. Pas si décaféiné que ça tout compte fait. Je me redressai et déposai ma tasse sur la table basse en face de moi. Mon ami me fixait avec insistance.
  -Hey, Luky! Comment ça va aujourd'hui? tentai-je.
  -Tu es encore en retard.
  -Excuse-moi. J'allai sortir mais Alex m'a retenue et devine quoi? Il avait apporté de la fêta. Le traite.
  -Attend, je récapitule. Tu m'as fait attendre pour une histoire de fromage?
  -Oui... Enfin non... Peut être... Je sais pas... Je sais plus trop où j'en suis.
  -A cause de ta mère?
Depuis quelques mois, Sophie, ma mère semblait tendue et avait les nerfs à fleurs de peau.
  -Peut être. Bon je sais ce que tu vas me dire: "Ce n'est pas ma mère qui change, c'est moi qui de graine devient fleur puis fruit." ou encore "Telle la liane, tu pousses vers le soleil sans jamais l'atteindre" ou encore...
  -Non, me coupa-t-il. J'allais dire que je trouve ta mère un peu bizarre ces temps si mais ton imitation était plutôt pas mal. Tu sais le club théâtre recrute toujours.
  -Ah ah ah, très drôle. Sinon, mon décaféiné...
  -C'est le prix à payé parce que tu as été en retard.
  Je rigolai. J'adorais Luke. Depuis qu'on était enfant on se connaissait. Son père voyageait beaucoup et le mien était mort avant que je naisse dans un accident de voiture. Nos mères allaient au cours de cuisine ensemble et donc nous laissaient ensemble avec la nounou. Lori, qu'est ce qu'elle avait souffert avec nous. Je n'avais pas beaucoup d'amis à l'école seulement Luke et lui seulement moi. Je me rappelle de quand nous avions vu les trois mousquetaires ensemble. Lorsqu'ils avaient prononcés leur: "Un pour tous et tous pour un." , Luke m'avait regardait et m'avait dit: "En faites nous sommes comme ces mousquetaires. C'est nous deux contre le monde entier.". J'avais souri. C'était vrai, nous deux contre le monde entier. Une serveuse arriva et me fit sortir de ma torpeur.
  -Ce sera tout monsieur?  gloussa-t-elle sans me calculer.
  -Oui merci bien, nous avons presque terminé, dit Luke dans un sourire.
  -D'accord, prenez tout votre temps
Et elle repartit comme si de rien n'était.
  -Waouh! soufflai-je.
  -Quoi? J'ai de la mousse sur le nez? me demanda-t-il en prenant sa serviette en papier.
  -Non, mais la serveuse. Elle te draguait ouvertement.
  -Quoi?! Mais non c'était juste une jeune serveuse rempli de vitalité.
  Mouais... Bon allons nous en avant qu'elle ne t'arrache ta chemise.
Nous rigolâmes de concert. Pendant que mon ami payait, je décidai de passer à la librairie à côté. En entrant, je sentis toute de suite l'atmosphère de la pièce saturée de poussière. Les livres étaient empilés les uns sur les autres comme de mini-immeuble. Je passais mes doigts sur chaque rayons en quête d'une découverte surprenante.
  -Vous cherchez quelque chose? susurra une voix chaude à mon oreille.
Je me retournai et découvris derrière moi un jeune homme. Il ne devait pas avoir plus de seize, avec son jean trop lâche et son T-shirt d'un groupe de métal allemand. Un frisson me pris et je me dis que ce garçon ressemblait à tout sauf à un humain. J'osai ouvrir la bouche:
  -Euh, oui... Enfin je ne cherche pas un livre en particulier mais juste un peu de lecture pour passer le temps.
  -Et bien suivez-moi alors.
Je suivis l'homme jusqu'à la réserve et regardai dans tout les coins. On se serait cru dans la caverne d'Ali Baba. Le garçon prit la parole:
  -Voici la sélection des meilleurs livres de cette librairie, dit-il en pointant une étagère qui menaçait de s'écrouler tellement elle portait de livres. Choisissez.
Je m'approchai de l'étagère et passai mon doigt sur le dos des livres, plein de poussières. Je m'arrêtai et fixai un livre. Bizarrement, lui seul, avait été épargné de la poussière. Je le pris et m'exclamai devant sa magnifique reliure. Blanche et dorée. Je le voulais mais mon instinct me dictait de le reposer. Je rangeai le livre et me retournai  vers le vendeur.
  -Désolé mais il n'y rien qui m'intéresse. Merci beaucoup.
  -Ce fut avec plaisir mademoiselle. Repassez quand vous le voudrez.
Une chose était sûre. Je ne repasserai jamais ici. Je quittai la minuscule réserve et entrai dans la boutique. Un homme portant un grand manteau noir attendait là. Il avait des cheveux noirs qui se fondaient dans son manteau. Il tourna la tête vers moi et son regard gris me transperça. Je réprimai un frisson, plus jamais je ne rentrerai dans cette boutique, même la clientèle avait une drôle d'allure. En sortant j'attendis le début de la conversation, animée, du vendeur et de son interlocuteur:
  -Où est le livre Stéphane ? demanda l'homme inconnu.
  -Quel livre ? dit le vendeur.
Son interlocuteur saisit son T-shirt et le souleva.
  -Tu sais très bien de quel livre je parle sale vamp...
Et la porte se referma. C'était décidé, plus jamais je n'irais dans cette boutique. En sortant, la lumière me fit mal aux yeux. Ce n'est qu'à ce moment que je me rendais compte de l'obscurité de la librairie... et que j'étais rentrée dans quelqu'un. Je relevai la tête et m'écartai. Un grand jeune homme blond me fixait de ses grands yeux verts.
  -Euh... Excusez-moi monsieur... Je... Je ne vous avez pas vu ! Bafouillai-je.
Il se frotta la tête.
    -Pas grave, dit-il. Vous... Vous sortez de la librairie?
  -Euh... Oui, je sors de... je me retournai...de la librairie. Je ne vous la conseille pas en passant, elle est vraiment lugubre et le vendeur est très bizarre.
Il sourit et dit:
  -Ne vous inquiétez pas pour moi, j'attends juste un ami.
  -C'est bon Pitt? Tu as fini de draguer? dit une voix féminine.
Je tournai la tête vers la voix en question et remarquai une superbe jeune fille blonde au yeux bleus qui ressemblait étrangement à... Pitt? Ils devaient être jumeaux. Cette jeune fille avec ses grands yeux bleus me dévisageait avec un air de dégoût . On aurait dit que je lui donnait envie de vomir. Elle portait un pantalon slim et un top noir. Ses bottes en cuir était de la même couleur. C'est à cet instant que je remarquai. Ils étaient tous les deux vêtus de noir. Comme l'homme dans la boutique. Ce pourrait-il que l'ami en question soit...? Je me dépêchai de reprendre mes esprits et je pris mes jambes à mon coup. Il fallait vraiment que je retrouve Luke. Je retournai dans le café où il m'attendait patiemment. Quand j'entrai, il se retourna vers moi et me sourit. Il prit mon bras et m'entraîna jusqu'au cinéma juste à temps pour notre séance. Arriver dans la salle de cinéma j'avais du mal à me concentrer sur le film. Je ne cessai de penser au petit groupe que j'avais rencontré devant la librairie. Luke était assis à côté de moi et ne semblait remarquer mon malaise. Il me regarda et me sourit. J'aimais beaucoup son sourire. Il me mettait en confiance. Mon ami s'approcha de moi et me chuchota à l'oreille:
  -Becca? J'ai un truc important à te dire. Je sais que ça va peut être difficile à encaisser mais sache que je suis le même...
Il continua de parler mais je ne l'écoutai plus. Mon regard avait été attiré vers un homme aux cheveux noirs et aux yeux bleus. Lui. L'homme de la librairie. Il me sourit se leva et quitta la salle.
  -Reb? Tu es sûre que ça va?
  -Je... Il faut que...
Je me levai de mon siège et sortis à mon tour de la salle. Il m'attendait sous un lampadaire. La lumière envoyait de magnifiques rayons dorés dans ses cheveux et donnait à ses yeux gris un air de malice. Il se redressa à mon approche.
  -Qui êtes-vous? demandai-je. Pourquoi vous me suivez?
L'étranger ne répondit rien. Il saisit mon poignet droit le retourna dans tout les sens puis fit de même avec le gauche.
-Où est-elle? chuchota l'homme. Mais où est cette foutue marque?
  -Quelle marque de quoi vous parlez, et, je retirai mon poignet de sa main, ne me touchez pas. Qui êtes-vous? que me voulez vous?
  -Oh, ses yeux s'éclairèrent. Excuse-moi, je m'appelle Will, dit-il en faisant une petite courbette.
  -D'accord Will. Que me voulez-vous?
Il ouvrit la bouche pour répondre lorsque mon téléphone bipa.
  -Je crois que tu devrais répondre.
Je sortis mon téléphone de ma poche et consultai mes messages. J'en avais trois de ma mère:
Le premier: Rentre à la maison. Toute de suite.
Le deuxième: En faite ça peut attendre. D'ailleurs tu devrais dormir chez Luke ce soir. Je t'ai fait un sac tu passeras le prendre demain.
Et le troisième: Ne rentre pas à la maison ce soir. Je t'aime. Maman
Je regardai mon téléphone tout en tremblant. Je relevai la tête et vis Will me regardant de ses yeux gris.
  -Tu devrais rentrer chez toi.
  J'acquiesçai d'un signe de tête et me mis en route. La tête me tournait, je ne comprenais plus rien. Lorsque que j'arrivai au pied de mon immeuble, j'ouvris la porte et gravis les marches quatre par quatre jusqu'au troisième étage. Je dus m'y reprendre à trois fois avant de faire entrer la clé dans la serrure. L'appartement était désert. C'était comme si le temps si était arrêté. La tasse de thé, maintenant froide, de ma mère était posée sur le bar. Les factures était éparpillées à même le sol. J'allumai la lumière et découvrit une lettre sur la table basse avec écrit mon nom. Je l'ouvris et reconnu la délicate écrite de ma mère.
  Ma chérie, j'ai dû m'absenter un moment. Je pense revenir sûrement la semaine prochaine. Je ne serai malheureusement pas ici pour ton anniversaire. Ne m'appelle pas, mon téléphone est rester à la maison car je n'avais plus de batterie et là où je suis il n'y a pas d'électricité.
Je t'aime Becca.
Maman
  Je m'assis lourdement sur le canapé et laissai libre court à mes larmes. Ma mère, la seule personne qui n'est jamais autant compter pour moi, ne serait pas là pour mon anniversaire. Je savais que ce n'était pas une blague. Elle n'utilisait le surnom "Becca" que lorsque qu'elle voulait atténuer les choses, qu'en tant d'euphémisme. Je me mis en boule sur le canapé et fermai les yeux.

EwinaOù les histoires vivent. Découvrez maintenant