Chapitre cinq

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  Dimanche fut une journée longue. Je sus enfin ce qu'étais la gueule de bois, et c'était loin d'être reposant. Eden était passé. Je lui avais tout raconté.
   - Comment ça, il a refusé ?
   - On n’était pas loin de le faire, mais il n’a pas voulu. Parce que j'étais ivre.
   - Qu'avez-vous fait après ?
   - Il m'a sorti un discours comme quoi j'étais la femme de sa vie.
   Elle ne cacha pas sa surprise.
   - Que lui as-tu répondu ?
   - Rien. Je l'ai brièvement embrassé et je suis partie.
   Elle considéra la situation.
   - Soit. Peut-être qu'il ne s'attendait pas à ce que tu sois sous l'emprise de l'alcool.
   Je restais silencieuse.
   - C'est une possibilité.

   Dans les jours qui suivirent, je sentis la terrible culpabilité de Maxime s'accroître. Il s'en voulait toujours pour ce qui s'était passé, jusqu'à organiser plusieurs dîners aux chandelles. À chaque fois, je m'enfuyais avant d'avoir atteint la chambre romantique qu'il avait prévu à cet effet. Il vouait vraiment se rattraper.
   Tout allait bien.
   Enfin, sauf pour un.
   Eliott filait un mauvais coton ; il devenait coléreux, agressif et belliqueux. Son comportement désinvolte lui avait valu un nombre inimaginable d'heures de colle. En quelques semaines, il avait battu tout les records comme le lycée n'en avait jamais vu. Ses notes avaient fait une chute vertigineuse. Mais elles n'étaient pas assez basses pour lui assurer le redoublement. Il ne parlait plus à personne tellement il était énervé. Mais cela n'empêchait pas aux filles de se damner pour lui, totalement accro à son côté "Bad Boy". J'avais surpris Eden plusieurs fois à parlé avec lui, à l'écart des autres. Quand je lui en parlais, elle niait tout en bloc. Il y avait anguille sous roche. Il se passait quelque chose entre eux, j'en étais certaine.
   Je fus tellement préoccupée par de telles futilités - qui se révélaient être un super divertissement pour les personnes normales - que j'en avais oublié ma soi-disant nature d'Immortelle. En y repensant, je fus assaillie par le doute : et si Eliott avait vu ma marque, lors de notre dernière altercation ? D'autres questions surgissaient, bizarrement toutes reliées à lui : pourquoi n'avouait-il pas que l'on se soit déjà vu ? Pourquoi rencontrais-je une obscurité absolue lorsque que j'entrais dans sa tête ? Etait-il dépourvu de cerveau ? Ou est-ce son aura (ça y est, je me mets à croire des trucs idiots) qui reflétait les ténèbres ?
   Ressentait-il ce que je ressentais en sa présence ? Sentait-il cette sorte de fluide qui passait par nos deux êtres ?
   Où bien est-ce moi qui perde la raison par un amour imaginaire ?

   - Sentinelle, dis-je un dimanche matin à la bibliothécaire.
   Chaque week-end, je m'enfermais dans ma chambre ou allait à la bibliothèque municipale pour chercher des informations sur l'Immortalité. J'avais déniché un vieux carnet, où je rédigeais toutes mes informations, rudement protégées par deux imposants cadenas. Personne ne pouvait y accéder à part moi. J'avais déjà écrit quatre chapitres sur Les Origines, La Transformation, Les Symptômes, et le dernier en date que j'avais nommé "Définitive ou Momentanée ?" qui expliquait comment différencier la Transformation Momentanée de la Définitive par les symptômes que l'on pouvait avoir. Et aussi par nos gestes : par exemple, si on mangeait trop de prunes dans un délai trop court, on pouvait être Transformés, sans le savoir, Momentanément, de deux à quatre mois, suivant la quantité de prunes avalées. Cela peut paraître fou, mais c'est vrai.

   Pourquoi "sentinelle" comme code ? Il se reflétait directement sur la bibliothécaire, qui était justement la sentinelle des lieux.

   Elle fouilla dans un tiroir et en sortit une vieille clé dorée.

   - Au fond à gauche, près de la porte de secours, comme d'habitude.

   Ce n'était pas la première fois que je venais.

   En fait, l'histoire de comment j'ai pu avoir ce code qui me permettait d'accéder aux documents nécessaires est assez simple : j'ai juste entendu un homme dire ce code. Mais tout de suite j'ai su que c'était un Immortel.

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