Le bruit fut épouvantable. La balle luisante et tachée de sang traversa sa tête pour venir s'encastrer dans un pied du lit. Isabelle ôta la balle avec un couteau suisse et détacha mes sangles. Elle extrait un débardeur et un short de l'imposante armoire et les jeta sur le lit.
- Habille-toi.
J'étais tellement secouée, bouleversée par ce que je venais de voir que j'en restais quasi-immobile. Elle me tourna la tête pour la regarder dans les yeux.
- Ecoute, je sais que ce que tu viens de voir est affreux, mais dis-toi que je l'ai fait plein de fois, et pour nourrir ma tribu. Et il allait te violer ! Je t'ai sortie d'un mauvais pas, alors maintenant, bouge tes fesses. Et plus vite que ça.
Elle me tendit des sous-vêtements. Je me dépêchais autant que je pouvais. Et vu son impatience, je n'étais pas certaine si ce serait du luxe de lui demander des chaussures.
Elle m'entraîna avec elle. Elle avait un carquois et un arc qu'elle ramassa dans le couloir. Celui-ci était tout aussi luxueux que la chambre. Mais elle et moi courûmes si vite que je n'eus pas le temps de tout regarder. On dû prendre les escaliers au lieu de l'ascenseur. Nous sortîmes en trombe, bousculant des gardes au passage. Les débris de verre et les cannettes de soda m'écorchaient les pieds, mais je n'avais pas d'autre choix. Isabelle me distançait de quelques mètres et avait une endurance d'athlète. J'eus du mal à la suivre, même si nous courions plus vite que les humains. Les gardes étaient sur nos talons. Au bout d'une course effrénée sans fin, Irène-Isabelle s'arrêta d'un coup. Je faillis lui rentrer dedans.
- Qu'est-ce que tu fous ?!
- Cours. Je vais essayer de les stopper.
- Tu vas te faire tuer !
En effet, les gardes avaient sortis des pistolets semi-automatiques pas très rassurants...
- Cours, Sienna ! Fais-ce que je te dis !
Les gardes nous avaient dans le collimateur, et ce n'était pas pour négocier ou nous inviter à prendre le thé. Ils pointaient déjà les armes vers nous.
Irène sortis une flèche de son carquois et tendis son arc. A cette heure-ci – au milieu de la nuit – il n'y avait pas grand monde. Elle ne risquait pas de faire de dommages collatéraux ; elle visa dans le cœur d'un, dans la tête d'un autre en moins de temps qu'il n'en fallu pour le dire. Sauf qu'avant de s'effondrer au sol, un garde eut le temps de tirer. Une balle vint frapper ma jambe, et deux autres l'abdomen d'Irène. Elle s'écroula. Ma blessure se referma presque immédiatement. Je courus vers Irène.
Le sang abondait.
- Extrais les balles, réussit-elle à dire.
- Avec quoi ?
Elle sortit son couteau suisse.
- Avec ça.
- Mais...
- Les balles ne se sont pas enfoncées trop profondément, tu devrais pouvoir y arriver.
J'hésitais.
- Tu vas souffrir comme une dingue !
- Marche ou crève. Et je veux encore marcher.
La volonté d'Isabelle pour ne pas mourir m'époustouflait. Elle semblait ne pas avoir mal, mais je savais que c'était le contraire.
Je plantais délicatement le couteau dans la plaie et remuai le plus doucement possible. Irène gémit, grogna, puis émit de faibles cris, inaudibles mais puissants. Elle eut des spasmes dans la jambe, comme pour concentrer la douleur ailleurs. Elle fermait les yeux. Isabelle était forte. J'avais déjà entendu parler des Amazones, des femmes libres. Elles se perçaient le sein droit pour ne pas qu'il les gêne pour le tir à l'arc. Quand elles avaient des garçons, elles les abandonnaient dans la forêt. Une tribu entièrement féminine, redoutable.
Je touchais quelque chose de dur. Je plaquais la lame contre l'objet et le fit remonter en équilibre sur la pointe. Je dus faire extrêmement attention pour qu'elle ne retombe pas dans la blessure. Je la pris entre mes doigts et la jetai sur la route.
- Encore une.
Je tremblais.
- Tu te débrouilles très bien. Si tu arrives à l'extraire assez vite, tu m'auras sauvé la vie.
- Si je l'extrais assez vite ?
- Je t'expliquerai plus tard – s'il nous reste du temps.
Notre délai venait d'être raccourci. Bon. Rester calme. Respirer. Rester calme. Respirer. Planter le couteau.
Je remuais une seconde fois, et Isabelle n'hésita pas à hurler de toutes ses forces. La lame entière était enfoncée dans la blessure, près du diaphragme, et j'avais beau mouliner, je ne trouvais rien du tout.
- Cherche ici, murmura-t-elle.
Elle avait en effet, un impact dans le nombril.
Je retirais la lame d'argent. Il y avait énormément de sang qui coulait et atterrissait en plaques rondes et liquides sur le ventre d'Isabelle-Irène. Pourvu que je n'aie pas sectionné une artère...
- Vite...
Je me dépêchais. Cette fois, plus le moment de faire attention. Il fallait agir, rapidement, consciente que la vie d'Isabelle était entre mes mains. Je tâtai sa peau de mon autre main tachée de sang. Un sang noir, obscur, sombre. Je ne captais rien d'anormal ou de dur.
- Je ne sens rien...
- Laisse tomber. Reste auprès de moi. Ne me laisse pas.
C'était trop tard.
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Energie
RomanceUne étrange marque. Un homme troublant et délicieusement mystérieux. Une menace pesante et présente. Des secrets jamais soupçonnés. Des révélations bouleversantes. Des changements qui détermineront sa vie à jamais... 2012