❂ Prologue

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Le monde peut être régit de la façon dont on le souhaite, si on le souhaite vraiment. Il y en a qui régissent leur vie grâce à des idées, d'autres par des ambitions et d'autre par passion. J'ai décidé de vivre ma vie par passion et non pas par choix. Connaissez-vous ce sentiment qui vous prend aux tripes lorsque vous voyez que vous arrivez à faire quelque chose que tout le monde ne sait pas faire ? Je le ressens, chaque fois que mes ballerines frôlent le parquet de danse. Chaque fois que je sens mon pouls s'accélérer. Je ressens tellement de choses quand je danse que vous décrire chacun de mes sentiments serait presque impossible. Cette vague de chaleur qui passe de mon estomac pour se blottir dans mes bras. Cette électricité qui parcoure mes jambes lorsque je me retrouve en pointe. Tous ces petits gestes viennent à me rendre folle. Folle de ce que je fais. Amnésique aussi. Adieux le divorce de mes parents, adieu l'absence de ma mère, adieu cet état de chagrin constant. Adieu le visage triste de papa chaque matin. Je danse chaque jour toujours un peu plus tôt et toujours un peu plus tard. Me vider la tête est essentiel si je ne veux pas sombrer autant que mon père. Je ne sais pas si j'y arrive, j'espère y arriver mieux que Julian. Julian... Ce virtuose de la musique, ce virtuose de la guitare qui joue constamment comme si son heure était venue. Qui chante comme si demain il ne ferait plus partis de ce monde. Julian Déziel est de loin l'artiste que j'aime le plus au monde. L'artiste qui m'accompagne lorsque je danse. J'aime entendre sa voix, entendre son souffle traverser les enceintes de mon tourne-disque. C'est comme s'il était avec moi, comme si je pouvais sentir ses mains sur mes hanches pour m'accompagner à chaque mouvement. Comme si sa voix venait murmurer à mon oreille une musique éphémère et imaginaire. En lisant sa biographie sur Internet, j'ai appris que lui aussi vivait loin d'un de ses deux parents, que lui aussi il vivait pour sa passion et pour rien d'autre. Seule une chose diffère de moi. Il est reconnu, son nom acclamé dans tous les recoins de Paris. C'est un saltimbanque des plus talentueux, des plus reconnus et moi, Léona Dunn, je ne suis qu'une étudiante en danse qu'on remarque à peine dans un couloir. Je suis comme cette ombre qui s'efface une fois la totale obscurité revenue. On me dit souvent « tu étais passée où Léo ? » et je réponds toujours que je suis là depuis un bout de temps. Un bout de temps qui s'essouffle et qui s'essouffle encore. Un bout de temps qui disparaît lorsqu'il n'est pas remarqué. Je ne fais pas partis de ce genre de fille qui aime se faire remarquer, qui aime exister, je suis ce genre de fille qui se plante là, qui regarde le monde tourner autour d'elle et puis qui finit par partir lorsqu'elle se rend compte que sa présence est  inutile. Il y a longtemps que j'ai compris que ma présence n'était utile que sur un parquet de danse, il y a longtemps que j'ai compris que même pour mon père ma présence est devenue quelque chose de difficile. Souvent il me dit que je ressemble à ma mère et je vois dans ces yeux cette peine et se reproche de « pourquoi tu nous as séparés ? Pourquoi a-t-il fallut que tu restes ici ? Il y a des tas d'écoles de danse en France. ». Je ne regarde jamais mon père dans les yeux. Souvent il me dit que j'ai fais le bon choix, qu'il m'accompagnera toujours dans la voie que j'ai décidé de suivre mais remarque-t-il que dans ses yeux, c'est tout le contraire qui s'en dégage ? Le soir, lorsque ma mère l'appelle, son regard est d'autant plus difficile à apprécier, trop de pression, trop d'amertume, trop de remords et de regrets, trop de non-dit et bien trop de mal à admettre que je suis l'élément déclencheur de l'explosion de ma famille. Ma sœur a tellement sut me rappeler que j'étais égoïste, que j'étais née pour séparer les gens et non pas les rapprocher. Ma sœur est tellement grande, est tellement parfaite hein ! Mais oui ! C'est ça, elle est tellement bien, tellement parfaite pour tout le monde tiens ! Elle a inventé les relations sociales et le monde ! Elle a inventé la solution à tous les problèmes. Elle est tellement parfaite, elle est tellement belle, elle est tellement. Tellement tout et rien à la fois, elle est tellement celle que je ne suis pas. Tellement celle que je voudrais être sans vraiment l'être vraiment. Ah oui Askya t'es tellement merveilleuse mais pas moi. Oui t'as un vrais boulot toi, avocate ça paye bien, ça donne tellement de reconnaissance. C'est ce que tu as toujours cherché toi ! Oui parce que si on ne voit pas madame alors on n'est pas assez bien pour elle ! Je n'ai pas choisis ça ! Je n'avais pas le choix. Je vis ma vie par rapport à ma passion. J'ai rien demandé moi ! J'ai rien demandé de tout ça, je n'ai pas demandée à papa de rester. Je n'ai pas demandé à maman de partir. Je ne t'ai pas demandé de m'aimer.

Je m'emporte parfois lorsque je parle de ma sœur parce qu'elle est celle que je ne serais jamais. Mes parents ne me regarderont jamais comme ils la regardent Elle est grande, fine, élancée avec des boucles blondes fines et relâchées, ses yeux verts et puis sa situation. Carriériste, bien sous tout rapport en couple avec un juge d'instruction. L'enfant parfait avec un avenir tout tracé. Je suis l'incertaine, je suis celle qui a choisis l'art et la passion à la sécurité et l'emploi certain. Je suis ce mouton noir, elle est cette brebis à la laine blanche comme la neige. Elle est elle et je suis moi.

En cette nuit d'hiver, je ne m'attends pas à ce qu'on me regarde différemment et pourtant leur regard va changer. Celui de mes parents va devenir compatissant, celui de ma sœur transpirera la pitié. Mon regard deviendra vide et ma vie ne deviendra qu'un méli-mélo de sentiments amers, lugubre et déprimant. Adieu le parquet de danse lorsque cette voiture perd le contrôle sur cette route verglacée. Adieu les ballerines quand je sens mes os craquer sous le poids des roues. Adieu liberté lorsque je ne sens plus mes jambes. Adieu la vie quand tout s'assombrit et que l'obscurité s'installe. Adieu.

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⏰ Dernière mise à jour : Jan 20, 2017 ⏰

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