Lorsque Jimin ouvrit sa boîte au lettre ce matin-là, la bouche encore pâteuse de sommeil et frissonnant de la brise d'automne qui s'infiltrait sans accord aucun à travers le tissus de ses vêtements de nuit, il eut la surprise d'apercevoir une enveloppe. Une enveloppe teintée de bleu qui trônait fièrement au dessus de la pile de magazines publicitaires journaliers qu'il se prenait souvent à feuilleter en sirotant son café dont il noyait l'amertume dans un nuage de lait frais et ceci dans la tiédeur confortable de sa grande cuisine. Il l'attrapa du bout des doigts, prenant soin de ne pas frôler les rebords salis de la boîte au lettre et de son autre main, vida tout son contenu publicitaire avant de refermer le caisson frais et de ramasser ses magazines.
Il s'arrêta un instant sur le perron de sa modeste maison d'un village campagnard dont il avait intentionnellement laissé la porte ouverte juste le temps de récupérer son courrier. Ainsi stoppé en dehors, il examina l'enveloppe, incrédule, se demandant ce qu'elle pouvait bien contenir. Frissonnant à nouveau alors qu'un nouveau vent frais le frappait de plein fouet, il remit ses pensées à plus tard et se désintéressa momentanément de cette enveloppe bleuté le temps de retrouver la chaleur accueillante de son intérieur.
D'un geste agile qui traduisait sa routine, il ôta ses chaussures dans l'entrée sans même se baisser et rejoignit sa cuisine rapidement dans la hâte de consommer la boisson qui lui maintiendrait ses paupières lourdes de sommeil bien ouvertes. Il déposa la pile de courrier sur la table centrale pour qu'elle l'attende bien sagement pendant que lui disposait déjà une tasse sur sa machine à café. Pendant que le breuvage coulait bruyamment, coupant le silence qui enveloppait la pièce dans son discours, Jimin s'en alla chercher la brique de lait dans le petit frigo, toujours rangée à la même place. Il en versa l'équivalent d'un verre d'eau dans le récipient désormais rempli de moitié, peu enclin à goûter l'amertume écoeurante qu'il exécrait et s'attabla enfin, posant la tasse sur la table et gardant une main contre celle-ci afin de la laisser se réchauffer.
De sa main libre, il attrapa l'enveloppe qui l'intriguait depuis peu et la retourna dans tous les sens, pas encore pressé de découvrir son contenu. Il était déjà rassuré que sa couleur soit peu anodine et que l'adresse soit écrite de façon manuscrite, lui indiquant qu'il ne s'agissait pas d'une facture onéreuse. Son regard s'attarda un instant sur les lettres tracées d'une écriture distinguée et qui épelait son adresse. L'écriture lui était totalement inconnue et ceci continua de l'intriguer. Il passa prudemment son pouce sur les lignes écrites, ressentant les creux créés par l'appui du stylo sur le papier puis retourna l'enveloppe pour connaître son expéditeur dont l'adresse était notée au dos. Ce n'est que lorsqu'il eut lu l'adresse à deux reprises qu'il comprit enfin.
Son coeur rata un battement, puis deux et peut-être même trois dans une excitation nouvelle et un émoi que la lecture de l'adresse d'expédition avait provoqué chez lui. Tout comme l'écriture, elle lui était inconnue mais restait cependant si familière. La lettre venait de l'une des bases militaires du pays où nombres de jeunes hommes étaient appelés chaque année afin d"effectuer leur service militaire pour une durée approximative de deux ans. Et il savait pertinemment de qui cette lettre pouvait provenir.
Hoseok y séjournait depuis déjà un an en dépit de Jimin, son conjoint, qui avait cessé d'espérer quelque nouvelle de sa part depuis un certain temps déjà. Du moins, jusqu'à la réception de cette lettre porteuse d'espoir en cette journée. Lorsque Hoseok était parti pour Sinchon, ils savaient tous les deux pertinemment qu'ils n'auraient plus l'occasion de prendre contact pendant toute la durée de son service, ceci n'étant pas permis. Jimin savait ce qui l'attendait alors que Hoseok partait pour la base, seulement, vivre seul dans l'idée de ne plus revoir son amour qui trimerait à la tâche pendant deux ans l'avait plongé dans une mélancolie morose. Mais alors qu'il tenait cette lettre entre ses mains, il avait l'impression de renaître de ses cendres. A tel point que ses mains tremblaient d'appréhension, secouant le papier entre elles.