Chapitre 26 : Comme Elhra

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-C'est bon, madame, votre ami est guéri, avertit le chirurgien.

-Merci. Je vais aller le voir, répondit Féline.

-J'irais le voir après, je suis en pleine préparation d'un remède pour que les blessures cicatrisent plus vite, informa Flamme.

-D'accord, j'y vais seule alors.

Et Féline disparut au détour d'un dédale.

Lorsqu'elle arriva dans la chambre où reposait son ami, Féline le vit allongé dans le lit, les yeux fermés. Elle s'approcha et s'assit sur le lit, à côté de ses jambes enfouies sous l'épaisse couverture.

-Chasseur, tu vas bien ? Demanda-t-elle d'une voix douce.

Le jeune homme ouvrit les yeux, et sourit en constatant qu'elle était à son chevet, anxieuse, qu'elle s'inquiétait pour lui.

-Oui, on peut dire ça. J'ai encore un peu mal, mais je pense que le chirurgien a bien travaillé.

-Flamme te prépare un remède, pour que tu cicatrise plus vite, précisa Féline.

-Comme ça j'irais encore mieux, sourit-il.

Féline ne répondit pas. Son ami allait bien. Il souriait, il était heureux.

-J'ai quand même pas eu de chance. J'ai été blessé beaucoup de fois ! Mais je suis toujours vivant. J'ai de la chance et de la malchance, ça s'annule.

-Je suis désolée... C'est par ma faute que tu cours un tel danger... Avant, tu menait une vie paisible, près des tiens, à étudier, maintenant, tu mènes une vie de danger, tu es recherché... à cause de moi...

-Féline, je ne regrette pas du tout de t'avoir rencontrée, quels que soient les risques...

-Pourquoi ? Tu ne tiens pas plus à ta vie ? Je suis la voleuse la plus recherchée du monde, et toi, tu l'as accepté, tu m'as suivie... Tu aurais pu, tu aurais dû en tant que citoyen, me dénoncer, mais tu ne l'as pas fait, tu m'as suivie... Tu n'aurais pas dû... Autour de moi règne une atmosphère de mort... Tu le sais, j'ai peur pour toi, après... Tu n'aurais pas dû...

-Bien sûr que si.

-Mais pourquoi ?

Le jeune homme se redressa. La couverture qui le couvrait jusqu'au cou quelques secondes plutôt ne couvrait désormais plus que ses jambes, laissant paraître son torse en partie couvert de bandages. Il se trouvait désormais très près de Féline, ce qui la mettait mal à l'aise. Sa gêne s'apparentait à ses oreilles qui se courbèrent soudainement vers l'arrière. Elle ne put soutenir son regard, qui était intense. Elle avait envie de se lever, de quitter la salle avec une excuse bidon, qu'importe ! Pourquoi Flamme n'avait-elle pas pu venir avec elle, déjà ? Elle préparait un remède. La respiration de Chasseur s'intensifiait, elle sentait presque son souffle chaud. Le visage du jeune homme s'avançait très lentement d'elle. Il murmura alors, d'une voix douce et réconfortante :

-Parce que je t'aime.

Féline n'eut pas le temps d'évoquer sa surprise que les lèvres du jeune homme vinrent se poser sur les siennes. Elle était comme paralysée, elle n'osait pas, ou ne pouvait pas bouger. Une sensation étrange envahit tout son corps, et la jeune femme ne savait plus que faire. Alors comme ça, Chasseur était amoureux d'elle ? Comme ses parents l'étaient dans le temps ? Pour une femme comme elle, qui n'avait connu d'amour que de sa mère, qui avait grandi dans la haine, dans la guerre, dans la tristesse, dans la mort, c'était inespéré. Comment pouvait-on tomber amoureux d'un voleur ? Chasseur et Elhra avaient un point commun.

Lorsque Chasseur se retira, Féline était toujours incapable de bouger, ni de dire quoi que ce soit. Elle haletait, toujours surprise.

-Ça va, Féline ? Demanda Chasseur. Je... je suis désolé, je ne voulais pas te mettre dans cet état-là...

-Ce n'est rien, assura Féline qui avait retrouvé sa parole. Je... je suis juste surprise, je ne m'y attendais pas...

-Et... sinon, ça veut dire que tu m'aimes ?

-Je ne sais pas...

Féline osa alors le regarder dans les yeux. Intensément bleus, bleus comme l'azur du ciel dépourvu de nuages. Il semblait à la jeune femme qu'elle allait imploser. Son cœur battait la chamade tandis qu'elle inspirait à pleines bouffées, à un rythme effréné, et qu'elle ne savait même pas répondre à la question de son ami, bien que simple.

-Je ne sais pas... s'égosilla-t-elle, presque en larmes.

-Ne t'en fais pas, calmes-toi, l'apaisa-t-il en posant sa main sur son épaule.

-Tu es gentil, Chasseur, sourit Féline.

-C'est parce que je t'aime, répondit-il en se penchant vers elle pour l'embrasser de nouveau.

Féline ressentit la même sensation que la fois précédente, la surprise en moins. La main de Chasseur qui se trouvait sur son épaule avait glissé sur son cou et ses longs cheveux lui effleuraient le front. Elle se rendit alors compte qu'elle était presque heureuse ainsi. Presque ? Pourquoi presque ? Elle était heureuse ainsi.

Lorsque Chasseur la relâcha pour la seconde fois, elle lui répondit, d'une voix légèrement timide :

-Je crois que je t'aime aussi, Chasseur.

Le jeune homme, qui l'avait écoutée parler avec sérieux, esquissa un sourire de satisfaction qu'il ne tenta pas une seconde de dissimuler avant d'ajouter :

-Et bien tant mieux, Féline.

Celle-ci, sans plus attendre, pris sa tête entre ses mains, et l'embrassa avec joie.


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