Le soleil matinal avait enfin décidé de pointer le bout de son nez, offrant à tous les londoniens le plaisir de ressentir ces petits rayons chauds et agréables leur chatouiller le visage. C'était un temps sympathique pour sortir dans le parc d'à côté, pour dévorer une glace ou encore pour bouquiner avec un petit pull fin sur une terrasse de café.
Loly Tempel était assise sur la table d'auscultation dans le cabinet du médecin qu'elle venait voir plusieurs fois par mois. Ce dernier venait tout juste de finir de vérifier sa peau recouverte de ces petites cicatrices. Il avait fait glisser ses fins doigts de part et d'autres de son visage, afin de pouvoir capter la moindre chose qui aurait pu lui paraître suspecte. Il avait donc fini par lui annoncer qu'il n'y avait rien d'important à signaler et rien d'alarmant dans la progression de sa guérison. Le docteur Ross venait donc de quitter la pièce, demandant à la mère de la jeune fille de bien vouloir le suivre tout en prévenant la rouquine qu'ils seraient de retour une poignée de minutes plus tard. Kate se leva alors de la chaise sur laquelle elle était installée et marcha jusqu'à l'entrée où l'attendait déjà le médecin.
_ J'arrive, Loly.
La rouquine acquiesça, et elle profita de l'occasion pour se mettre plus à l'aise sur la petite table sur laquelle elle se sentait mal assise.
_ Monsieur, cria-t-elle quelque peu pour se faire entendre.
Le docteur se retourna et passa sa tête par la porte d'entrée de son bureau qu'il venait de quitter une poignée de secondes plus tôt.
_ Oui ?
_ Est-ce que vous pouvez me dire où il y a une machine à café ici ?
_Oh. Oui, bien-sûr. Erm. Sors de cette pièce et c'est juste au bout du couloir à droite, tu y es à vingt mètres à peine.
_ D'accord, merci.
Sa génitrice était aux talons du docteur, écoutant ce qu'ils se disaient.
_ Tu veux que je t'y accompagne, peut-être ? Lui demanda-t-elle.
_ Non, allez-y, on se rejoint plus dans le couloir.
_ Très bien.
N'entendant plus de bruit à côté d'elle, la jeune fille en conclut qu'ils étaient donc partis. Elle tâta alors la table, en y posant ses mains pour avoir un meilleur appui. Et le plus doucement possible, elle se laissa glisser sur le sol. Elle avait désormais l'habitude de produire ce genre de gestes. Ceux qui la levaient de son lit, entre autres. Ou ceux qui l'aidaient à descendre de la voiture. Ce genre de choses. Oui.
Comme à son habitude, elle plaça ses mains devant elle, de manière à pouvoir capter tout obstacle capable de la faire tomber. Elle avançait à petits pas, pas encore habituée à marcher plus vite ou assez confiante pour faire des grandes foulées.
Elle était incapable de mesurer la distance qu'il y avait entre la porte et l'endroit où elle était. Et à chaque fois qu'elle était seule dans un endroit qu'elle ne connaissait pas, ses plus grandes peurs étaient de se retrouver totalement perdue, ne sachant où elle était et perdant tout contrôle. Cette fois-ci, elle sentit bien vite la clinche de la porte de sortie. Et elle souffla de satisfaction en sortant de la pièce.
Il y avait désormais plus de bruit à l'extérieur, et elle se sentait mal à l'aise à cause de ce genre de choses futiles. Elle marchait doucement, et ne voulait pas être dans les pieds de qui que ce soit. Elle ne voulait pas être confrontée à une alerte face à laquelle elle ne pourrait rien faire. Pour Loly, elle était juste une tâche dans le décor. Présente, mais apte à ne rien faire. Et c'était comme ça qu'elle pensait, lorsqu'elle était à l'hôpital. Je ne sers à rien. Je suis juste malade, et je ne peux rien faire.