Chapitre 8 - Partie 1

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J'avais beaucoup de difficultés à imaginer que Sam puisse être autre chose que Sam, qu'il puisse être capable de clouer à terre un homme d'un simple regard. Était-ce seulement possible ? Je refusai tellement d'y croire que j'émis mille éventualités et explications plausibles à toute cette histoire. Tout cela ne pouvait être qu'une coïncidence. Charles Acido avait peut-être simplement fait une crise d'épilepsie. Sam n'y était peut-être pour rien... Allez, soyons honnêtes, les chances pour que ce soit le cas étaient infimes, de l'ordre de l'improbable même. Dans ce cas, pensai-je, comment se faisait-il que Charles soit mort de peur devant Sam ? Et ses yeux ? Non, là, il n'y avait pas d'explication logique à ça. J'avais assisté à ce changement et jamais je ne pourrais l'oublier.

Sam plongea ses yeux fraîchement redevenus verts dans les miens, mais n'osa prononcer un mot.

- Est-ce que c'est toi qui as fait ça ? réitérai-je ma question.

- Oui ! répondit-il enfin.

Sam ne pouvait pas me mentir, il était d'une franchise incroyable. Néanmoins, bien qu'il revendique les faits, il paraissait honteux.

- Comment ?

- Je ne sais pas !

- Ah non tu ne vas pas recommencer, haussai-je le ton. Comment as-tu fait pour l'immobiliser sur le sol ?

- Comment tu marches ? Comment tu parles ? Comment tu fais pour rêver la nuit ou pour penser ? s'agaça-t-il légèrement. Tu n'en sais rien ?

- Non, c'est comme ça, c'est tout !

- Et bien moi c'est pareil, me convint-il. Ce que j'ai fait, je l'ai fait, c'est tout. Je ne peux pas te dire comment ni pourquoi j'en suis capable, mais je l'ai fait.

- Et qu'est-ce que c'était au juste ? me radoucis-je en m'appuyant contre le dossier du fauteuil.

- J'ai manipulé ses ondes cérébrales pour faire croire à son cerveau qu'il était en train de souffrir.

J'étais fatiguée. Je venais de réchapper d'une agression qui aurait pu très mal tourner. Je m'enfonçai dans mon fauteuil et pris ma tête entre mes mains, encore choquée par ce que Sam me racontait. Il vint s'asseoir près de moi, son corps encore tout emmitouflé dans son manteau.

- Tu veux dire qu'il ne souffrait pas pour de vrai ? m'enquis-je.

- Si ! La douleur n'est que le résultat de tout un tas de signaux que le cerveau traduit de cette manière. Je reproduis ces signaux mais pour le corps la douleur paraît bien réelle.

- Depuis quand tu es au courant que tu sais faire ça ?

- Depuis que j'ai vu cet homme s'en prendre à toi ! avoua-t-il en plongeant ses beaux yeux pleins de compassions dans les miens. C'est venu tout seul, je voulais seulement te protéger.

- Je ne sais pas si tu t'en rends compte, mais dans mon monde c'est le genre de truc totalement impossible à faire.

- Oui, je l'ai remarqué quand j'ai vu ta réaction. Tu es fâchée contre moi ?

- Moi ? fis-je ahurie qu'il puisse penser que je lui en veuille. Non, bien sûr que non. Tu m'as sauvé d'une situation... compliquée, réussis-je enfin à faire sortir de ma bouche même si ce mot n'était qu'un dixième de ce que je pensai vraiment.

Comment pouvait-il croire que j'étais en colère contre lui ? Décidément, Sam se souciait toujours plus de ce que je pensais à son sujet que de lui. Il ne voulait pas me décevoir ou qu'il puisse perdre le moindre crédit à mes yeux. La vérité, c'était qu'avec ce qu'il avait fait pour moi aujourd'hui, je lui en serai reconnaissante toue ma vie. J'étais charmée qu'il m'ait défendu, qu'il soit intervenu pour me libérer des bras dégoûtants de Monsieur Acido. Si Sam n'avait pas été là, qui sait ce qui serait arrivé.

Sam se défit enfin de son manteau et alla le poser sur le dossier d'une chaise. Il n'était plus très à l'aise tout à coup. Les questions l'embarrassaient terriblement et malheureusement pour lui je n'en avais pas terminé.

- Sam ! l'interpellai-je alors qu'il prenait soin de rester dans mon dos pour que j'en oublie sa présence.

- Hum ?

- J'ai vu tes yeux se changer en d'autres yeux et je ne parle pas simplement de leur couleur, insistai-je bien sur ce dernier point. Tu avais son regard, plus le tiens.

- Ce n'est pas une question, remarqua-t-il.

- Non parce que je sais ce que j'ai vu.

Je n'avais pas besoin de me retourner pour savoir qu'il était anxieux. Je pouvais le sentir dans sa voix. S'il avait plus ou moins honte de manipuler les ondes cérébrales de quelqu'un, il semblait en être autrement pour cette particularité-ci.

- Que veux-tu savoir ? se contenta-t-il de me demander.

- Tu as pris les yeux de Monsieur Acido ?

- Non, se braqua-t-il. Je ne lui ai pas pris ses yeux, je les ai reproduits c'est tout.

- Tu sais faire ça ?

- Je sais faire bien plus que de reproduire le regard d'une personne, souffla-t-il.

Cette fois je ne pus m'empêcher de l'observer. Il s'était assis sur une chaise dans mon dos, un coude appuyé contre la table et le front reposant dans la paume de sa main. Qu'allait-il m'avouer qui le mettait si mal à l'aise ?

- Tu sais faire quoi d'autres ? 


S.A.MOù les histoires vivent. Découvrez maintenant