5 septembre 2017
C'est la rentrée. Une date que je redoutais depuis des semaines.
Le réveil a sonné trop tôt ce matin. Pourtant, je me suis levée sans traîner, une boule au ventre. J'ai pris le temps de choisir ma tenue : un pull blanc moelleux, confortable, mais chic, que j'ai assorti à une jupe camel et une paire de talons sobres. Une tenue qui disait : je suis nouvelle, mais pas invisible.
Avant de partir, j'ai vérifié mon carré dans le miroir de ma chambre. Une retouche rapide pour que mes cheveux soient bien en place : une apparence impeccable, presque une armure pour cette journée.
Dans le couloir menant aux casiers, j'ai senti les regards. Tous. Chaque visage semblait se tourner vers moi, des expressions oscillant entre curiosité et jugement. J'ai tenté de garder la tête haute, mes talons résonnant sur le sol, une cadence régulière malgré mon cœur qui battait la chamade.
La salle E015, mon premier cours. J'avais imaginé une classe ordinaire, mais non : c'était un amphithéâtre. Les murs gris, austères, le sol noir... et les regards. Encore ces regards. Comme si j'étais une anomalie au milieu de leur quotidien parfaitement réglé.
Heureusement, Anaïs m'a rapidement rejointe. Elle est ma colocataire et, pour l'instant, ma seule alliée ici. Je lui ai murmuré :
— Pourquoi est-ce que tout le monde me dévisage ?Elle a ri doucement, sans moquerie.
— Tu es la seule nouvelle cette année, c'est normal qu'ils te remarquent.La seule nouvelle. Je n'avais pas mesuré l'ampleur de cette étiquette. Ici, les places sont rares, quasiment inaccessibles. Tous les élèves se connaissent déjà, un petit écosystème fermé. Et moi ? Une intruse.
Alors que le cours s'apprêtait à commencer, un garçon a fait irruption. En retard, il s'est excusé, d'une voix calme mais assurée.
Grand, athlétique, avec des cheveux châtains coiffés négligemment et des yeux verts si captivants qu'on aurait dit qu'ils brillaient sous la lumière artificielle de l'amphithéâtre. Il m'a lancé un bref regard. Deux secondes, pas plus. Puis il s'est dirigé vers une fille à qui il a déposé un baiser léger sur la joue avant de s'asseoir à ses côtés.
— C'est qui ? ai-je demandé à Anaïs, curieuse malgré moi.
— Steven Baker, a-t-elle répondu. Capitaine de l'équipe de foot de l'université.
Elle m'a jeté un coup d'œil en coin, anticipant ma prochaine question.
— Et oui, sa copine, c'est bien la capitaine des pom-pom girls. Ils sont le couple. Toujours ensemble, toujours parfaits.
Je n'ai rien dit, mais une pensée m'a traversé l'esprit : On est à l'université, pas au lycée. Ici, chacun est censé être libre de ses choix, peu importe les clichés ou les "classes sociales".
Steven m'a regardée plusieurs fois pendant le cours, mais je me suis efforcée de l'ignorer. Pourquoi prêter attention à un garçon qui incarne toutes les histoires clichées ?
Quand le cours s'est terminé, je suis sortie en direction du bureau de la directrice pour finaliser mon inscription. À mi-chemin, je l'ai aperçu, Steven, debout devant son casier. Ses yeux ont croisé les miens.
Il ne se contentait pas de regarder ; il m'observait, comme s'il essayait de me déchiffrer.
Je l'ai ignoré. J'ai continué ma route, déterminée à ne pas devenir une de ces filles qui tombent sous le charme d'un sourire enjôleur.
Mais il m'a interceptée.
— Salut, a-t-il commencé, son ton léger, presque charmeur.
Il s'est lancé dans un discours qui avait tout l'air d'un numéro bien rodé : compliments subtils, sourire ravageur, un éclat malicieux dans les yeux.
Quand il a fini, j'ai pris une grande inspiration et répondu d'un ton sec mais calme :
— Désolée, mais je ne suis pas intéressée. Tu devrais peut-être essayer ça avec ta copine, plutôt que de perdre ton temps à draguer les nouvelles.Je l'ai planté là, abasourdi, avec son sourire figé. La satisfaction de le voir désarçonné m'a donné un regain de confiance.
Dans le bureau de la directrice, l'atmosphère était bien plus chaleureuse. Elle était bienveillante, presque maternelle, et m'a mise à l'aise en quelques minutes. Nous avons réglé les formalités rapidement. En sortant, elle m'a attribué un casier : le C-008.
Je l'ai trouvé sans difficulté et y ai installé mes affaires. En refermant la porte, j'ai remarqué quelque chose : un casier à côté du mien. Celui de Steven.
Une fille venait de glisser une lettre dedans. Elle s'est éloignée avec un sourire rêveur, sans m'apercevoir.
J'ai secoué la tête, un mélange d'amusement et d'exaspération. Une chose était sûre : je ne comptais pas devenir une autre enveloppe dans sa collection de groupies.
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Alice et le Pays des Mensonges.
FantasyInspiré du jeu vidéo " Alice Retour au Pays de la Folie" À 21 ans, Alice Liddell reçoit un cadeau inattendu : un vieux coffret scellé, datant de son enfance. Ce coffret appartenait à son père, et il devait lui être remis à sa majorité, mais un drame...