Chapitre 25.1

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Chelsea n'avait pas envie de se confronter à l'inspecteur Daniels une fois de plus. Elle se sentait fatiguée ce matin et elle ne voulait pas se disputer avec qui que ce soit. Elle n'en n'avait plus la force. Elle voulait juste rester dans l'appartement de sa sœur pour ne rien faire et ne penser à rien.

Elle savait qu'elle aurait dû parler de son excursion à l'inspecteur et qu'elle devait retourner au département de police pour poursuivre l'enquête. Mais ce matin-là, elle avait une toute autre idée en tête.

Elle voulait aller à Bridgeport. Ce nom l'avait hanté toute la nuit. Qu'est-ce qu'il avait là-bas qui fascinait tant April ? Pourquoi y allait-elle souvent ? Qu'est-ce que Vallone avait tenté de lui dire avec ses sous-entendus ?

Elle était furieuse à présent. Elle avait l'impression qu'on jouait avec ses nerfs, qu'on lui donnait un petit indice qui, au final, cachait un autre mystère beaucoup plus grand que le précédent. Mais il était hors de question qu'elle abandonne !

Elle feuilleta rapidement le croquis à dessin d'April. Elle l'avait déjà regardé à plusieurs reprises, par nostalgie. Et elle se souvenait d'avoir lu le nom de Bridgeport derrière certains de ses dessins. April avait hérité du don de leur mère, Elisabeth. Elle dessinait merveilleusement bien et notait chaque dessin avec son nom, la date et le lieu qu'elle avait dessiné.

Il y avait un bâtiment en particulier. Une sorte de club à en juger la devanture. April l'avait dessiné à deux reprises. Pourquoi ? Peut-être que Chelsea devenait paranoïaque et qu'elle voyait des coïncidences partout mais elle connaissait suffisamment bien April pour savoir qu'elle ne faisait jamais rien au hasard.

- Cherches-tu à me dire quelque chose ou est-ce moi qui deviens folle à force de chercher ton meurtrier ? Chuchota-t-elle.

Elle se leva et rangea précieusement le carnet à dessin de sa sœur, n'en gardant que celui du bâtiment qui semblait tant intéresser sa sœur. Elle le glissa dans son sac, enfila son manteau le plus chaud et sortit dans la rue.

Pour la première fois depuis des jours, les nuages s'étaient éclipsés, laissant place à l'azure du ciel. Les pâles rayons du soleil ne suffisaient pas à la réchauffer mais c'était agréable de se promener dans les rues.

Elle héla un taxi et lui demanda de s'arrêter dans le quartier de Bridgeport. Le chauffeur de taxi la conduisit jusqu'à sa destination, elle paya la course et ressortit le dessin de son sac. Elle ne savait pas où se situait ce bâtiment dans ce vaste quartier.

"J'ai meilleur temps de demander autour de moi." Songea-t-elle.

Il y avait beaucoup d'animation autour d'elle. Le quartier semblait convivial et les passants se saluaient quand ils se croisaient, comme si tout le monde se connaissaient.

"Serait-ce un de ces fameux quartier communautaires ?" Se demanda-t-elle.

Alma lui avait déjà parlé de ces quartiers quand elle était petite. Avant d'être engagée dans la famille Russell, Alma lui avait dit qu'elle habitait un de ces quartiers, pauvres mais si conviviaux. Tout le monde se connaissaient et tout le monde se saluaient par son nom. Il n'y avait que des personnes qui venaient du même pays, immigrants aux Etats-Unis avec l'espoir d'une vie meilleure.

C'était la première fois que Chelsea mettait les pieds dans un de ces quartiers. C'était étonnant.

Elle s'approcha d'une vieille dame qui rentrait chez elle et l'aborda :

- Excusez-moi de vous déranger, mais j'aurais une question à vous poser. Dit-elle d'une voix douce et polie.

La vieille dame la regarda d'un air dénué de bienveillance.

- Vous venez de m'en poser une, de question. Rétorqua-t-elle en grinçant des dents.

Chelsea marqua un temps d'arrêt mais ne se laissa pas démonter part le ton froid de la vieille dame.

- Vous avez raison. Sourit-elle. Dites-moi, savez-vous où je peux trouver ce bâtiment ? Ajouta-t-elle en lui montrant le dessin d'April.

Les yeux de la vieille dame se plissèrent.

- Vous feriez mieux de partir, jeune fille. Ici, on n'aime pas les personnes qui posent trop de questions.

Elle lui tourna résolument le dos et claqua la porte derrière elle, laissant Chelsea sur le trottoir, désemparée. Elle ne s'attendait pas du tout à ce comportement. Elle préféra mettre ça sur le compte de son âge avancé et qu'elle n'aimait pas être dérangée avec des questions aussi futiles.

Mais au bout d'une heure, elle ne pouvait plus se le cacher : c'était tout le quartier qui l'avait prise en grippe.

A chaque fois qu'elle abordait quelqu'un et qu'elle montrait le dessin, soit la personne se détournait d'elle le plus vite possible, soit elle prenait peur et balbutiait qu'elle n'en savait rien, soit elle lui répondait dans une langue qu'elle ne parvenait pas à comprendre mais en devinait facilement le sens à cause du ton agressif.

- De plus en plus bizarre. Marmonna-t-elle. Dans quel Univers suis-je encore tombé ?

Sa curiosité était piquée au vif. Il se passait des choses bizarres dans ce quartier et le bâtiment qu'avait dessiné sa sœur n'y était pas étranger, elle le savait. Elle devait le trouver !

Elle allait poursuivre sa route lorsque quelqu'un l'empoigna fermement par les épaules et la poussa dans une ruelle adjacente. Elle voulut pousser un cri mais une main se plaqua sur sa bouche et elle sentit la pointe froide et tranchante d'un couteau sur son cou. Elle s'immobilisa, tétanisée par la peur. 

Deux SoeursOù les histoires vivent. Découvrez maintenant