Petit Ange

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Le vent soufflait, si fort que les arbres dansaient et leurs feuilles chantaient, claquant les unes contre les autres. Il tremblait et grelottait d'amertume.

Que faisait-il là ? Il s'était redressé sur ses coudes, avait cligné plusieurs fois des yeux avant de tenter de se relever au milieux de branches, moisies et bouffées par les insectes environnants. Il ne comprenait pas.

Pourquoi était-il là ? L'air était froid, glacial. Sa peau tout autant. Il avait échoué à sa tâche et était retombé lamentablement sur ce sol terreux si humide.

Depuis combien de temps était-il là ? Il avait tenté une nouvelle fois et était parvenu à s'accrocher au tronc calleux d'un arbre plutôt proche, plongeant ses orteils nus dans les profondeurs terrestre, goûtant à cette chair naturelle.

Comment était-il arrivé là ? Il n'y avait rien aux alentours. Une unique forêt à perte de vue s'étalant probablement sur plusieurs milliers de kilomètres. Il avait décidé d'avancer de quelques pas, sans encombre.

Les secondes interminables s'étaient rapidement muées en minutes déterminantes. Il avait débouché dans une clairière ensoleillée après avoir lutté contre marrais et bestioles sauvages. Une renarde le guettait de ses pupilles âcres. Son pelage roux flottait au gré du vent en cet instant plus reposé.

Il enjamba quelques foulées de blé, et perdit la vue un certain temps. Une fois recouverte, il vit un enfant, allongé près d'une rive. L'air paraissait plus distingué, agréable à sentir. Il le rejoignit, trouvant l'espoir attribué. Il clôt les paupières.

L'instant d'après, le bel animal au regard argenté était assis, face à lui. Sa fourrure était recouverte d'un voile satiné. Seule sa gueule était encore originaire. Il se voyait reflété dans ses pupilles. Un jeune enfant aux boucles blondes, à la peau pâle et aux yeux immaculés. Ses pommettes avaient rosi sous la glace l'entourant. Le paysage d'été avait laissé la place à un hiver frigorifiant. Il venait de réaliser qu'il n'était vêtu que d'une tunique de soie blanche et d'une fute de même tissu. Il avait secoué la tête. Le beau chêne sur lequel il avait dormi ne possédait plus une feuille. Ses branches étaient nues.

Il avait fait le tour de l'arbre, un creux s'y trouvait. Aucun flocon ne s'y était déposé, contrairement au sol enneigé laissant transparaître ses empreintes ainsi que celles de l'animal, qui le suivait et avait plongé à son tour dans l'abri. La renarde s'était allongée contre lui avec une habitude remarquable. Elle n'était pas effrayée. Elle avait reniflé le sol jusqu'à le gratter. Elle y avait déniché une marguerite et s'était mise à s'acharner contre le tronc. L'enfant la fixait en silence. Elle creusait toujours plus.

Un faible rayon avait pénétré leur antre. La renarde s'était retournée vers son ami, l'avait sondé comme une indication avant de plonger dans le trou qu'elle avait découvert. Il s'était de nouveau retrouvé à voir par ses yeux. Un fleuve détournait l'attention principale des fleurs de champ toutes fraîches éclosent. Puis sentir par son museau, les bouquets l'émerveillaient tant leur odeur était plaisante, enivrante. Tout ses sens étaient multipliés, plus à l'affût.

Il était encore propulsé dans son corps, et était sorti de l'arbre gigantesque qui surplombait la colline. De nombreuses fleurs peuplaient le gazon vert, et les feuillages d'arbre voisins n'étaient que verdure, des bourgeons naissant ça et là.

Il avait trébuché contre un galet et chuté à quelques centimètres de la marre. Il percevait son reflet et s'était examiné un peu plus. Aucune trace d'imperfection, ses traits étaient simplement sans défaut. Il avait crut percevoir une lueur pâle dans son dos. Le dessus de sa tête s'était illuminé, l'éblouissant. Son reflet s'était métamorphosé en celui de la renarde.

- Lèves-toi, petit ange... chuchotait une voix lointaine, très lointaine.

Il se sentit happé, doucement, par une délicate chaleur. Une femme rousse, au teint blanc et au regard glaçant de tendresse le fixait, le berçait entre ses bras fins.

- Tu as rêvé de maman cette nuit ?

L'enfant gazouilla quelques sons du fond de sa gorge.

- Tu as les cheveux de ton papa.

Elle caressait ses petites boucles blondes, souriant d'un amour naturellement maternelle.

- Tu as rêvé de lui, aussi ?

Il lui répondit une nouvelle fois par un "Gzouha" fraîchement né.

- C'est bien, mon ange, c'est bien...

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