one shot

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La fête battait son plein. Mais la jeune femme brune craignait le pire. Sur la musique qui rythmait son flamenco, elle s'avança en dansant vers la barrière où se jouait la corrida. Elle n'entendait que son propre souffle, et celui du taureau que l'on avait préalablement énervé dans le seul but de le tuer à la fin. Pauvre animal. Il ne le méritais pas. La matin même, la jeune femme avait supplié le combattant humain de ne pas y prendre part. C'est inhumain. Elle avait eu beau plaider, jamais elle n'eut gain de cause. Maintenant elle le savait, si le taureau le blessait, l'animal serait seul responsable de sa mort. Pourtant il n'aurait fait que suivre la volonté humaine. Tout en continuant son flamenco, la jeune femme priait. La musique, les rires, les cris s'intensifiaient. Le taureau fonça dans la barrière. Une fois. Puis deux. L'homme au chapeau tricorne évitait l'animal de justesse. Le maltraitait. Le mal menait. Le bruit s'intensifia encore un peu plus a chaque action, si bien que la jeune femme s'en trouva abasourdie. Elle dansait encore, priait, faisait voler sa robe blanche sans jamais quitter la piste des yeux. Priant encore et toujours, inlassablement pour que les deux combattants s'en sortent vivants et sans blessures. Plus elle dansait, plus elle s'inquiétait. Plus elle s'inquiétait, plus les battements de son coeur s'accélérait, plus celui ci cognait fort dans sa cage thoracique. Bientôt elle fut inquiète au point que sa vue se brouilla, et que la piste se vit remplacer par un champ de fleurs. Mais cette impression ne dura pas longtemps . Autour d'elle tout semblait si distant . Les bruits de la corrida ne suffisaient a masquer les battements de son coeur . Un. Deux. Trois. Toujours plus rapide. Un rythme si soutenu allant de pair avec le rythme soutenu des taureaux, des danseurs de flamenco, le rythme de la musique qui peu a peu s'élevait dans les airs. Puis plus rien, juste un bruit sourd, le bruit d'un choc. Le taureau avait frappé son adversaire humain de plein fouet. L'homme habillé de rouge vola a travers la piste, s'écrasa contre les barrières. Un. Deux. Trois. La musique s'arrêta soudainement. Le silence. Les cris. Le sable qui prenait la couleur de l'habit rouge. Mais ce n'était ni du tissus, ni de la teinture. A mesure que le sang giclait de la blessure de l'homme, les gradins se vidaient. Seule elle restait, comme paralysée par une émotion soudaine. Les souvenirs affluaient a mesure qu'elle voyait l'homme se vider de son sang. Les roses rouges. Leur premier flamenco. Les yeux bruns de l'homme se fermèrent, mais ses lèvres remuaient encore. Cours! Elle tomba a genoux auprès de lui. "Je t'aime". Le dernier. Y alors que les yeux bleus de la femme s'embuaient et tournaient au jaune, l'homme, dans un dernier effort, fouilla sa poche et y trouva une bague. De sa main ensanglantée il la passa au doigt de la femme, avant de s'endormir a jamais. Elle, effondrée, s'autorisa enfin a hurler son prénom, sa rage, sa peur de le perdre, en prenant violemment le corps inanimé de son bien aimé dans les bras, tachant sa belle robe blanche de rouge sanglant.

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