Avez-vous déjà eu l'impression que le monde entier est contre vous ? Que vous aurez beau crier aussi fort que vous le pouvez, personne ne viendra vous aider ? Je crois que c'est la pire chose qui puisse nous arriver, et je ne souhaite à personne de vivre cela. Je sais de quoi je parle, j'ai l'impression de hurler depuis des mois ! Peut-être parce que c'est le cas... J'ai complètement perdue la notion du temps. J'en ai marre de voir toutes ces personnes passer sans même prendre la peine de me regarder. C'est comme si...je n'existais pas. Où plutôt, que je n'existais plus. Avant j'avais plein d'amis, une mère aimante et un père attentionné. Tout le monde m'aimait et j'aimais tout le monde. Et puis un jour, nous sommes allés nous baigner à la rivière. Elle est très connue d'ailleurs, en été, il est presque impossible de trouver une place où poser sa serviette. Et cette journée là était particulièrement chaude, je n'avais jamais vu autant de monde réuni dans un seul endroit. Le problème quand il y a tant de personnes, c'est qu'on perd vite notre famille de vue. Je n'oublierai jamais cette journée, celle où toute ma vie a basculé.
Au début, je n'ai pas tout compris. Tout le monde me regardait, mais on aurait dit qu'ils ne me voyaient pas. Ils avaient des têtes affolées, comme s'ils avaient vu un mort. Et c'est en baissant les yeux, que je me suis rendue compte que c'était le cas. A mes pieds, une jeune fille d'environ 16ans, comme moi, flottait le visage dans l'eau. Elle ne bougeait pas, aucune bulle ne sortait, signe qu'elle ne respirait plus. Ces longs cheveux bruns, son maillot deux pièces orange, on aurait vraiment dit que...c'était moi. Je me rappelle avoir entendu un homme crier :
"Mais allez y ! Faites quelque chose !"
Il n'avait pas encore compris, mais moi si. Je suppose que les autres aussi, vu qu'ils n'ont rien fait. Normal, il n'y avait plus rien à faire. Elle était morte depuis longtemps. L'homme qui avait crié s'avança pour retirer la jeune fille de l'eau, deux autres vinrent vite l'aider. Tout le monde les suivaient du regard, les yeux vides. Je crois que le moment le plus traumatisant, c'est quand les trois hommes ont retourné la noyée, et que j'ai pu voir son visage. Ce n'était pas possible, ça ne pouvait pas être vrai ! Hélas, ça l'était. Je ne ressemblait pas étrangement à cette fille, non c'était plus que ça. J'étais elle, et elle était moi. C'était mon corps. Moi, je n'étais qu'un simple esprit, transparent et inexistant aux yeux des autres personnes. La panique me gagnait de plus en plus. Je commençais à appeler mes parents, puis je me mis à crier, avant de hurler à m'en déchirer la gorge. Personne ne m'entendait, personne ne voyait, personne ne me connaissait. Quand enfin je vis ma mère arriver, je voulu la serrer dans mes bras mais...je suis passée à travers elle. Elle ne m'a même pas senti, elle s'est juste mis à pleurer en voyant mon corps. Idem pour mon père, il est arrivé en courant, il m'a traversé comme si je n'étais rien. Je sentis les larmes me monter aux yeux, ils ne m'ont pas vu ! Je me remis à hurler dans leur direction :
"Je suis là ! Papa, maman, s'il vous plait ! Ecoutez moi ! Je suis juste là"
Même pas un regard, ils continuaient de pleurer. Pas une seule personne ne me voyait, non, ils préféraient me voir les yeux bouffis, la peau froide et le teins pale. Ils me préféraient noyée.
Depuis ce jour, je haire à la rivière. Elle est toujours autant populaire, mais ils ont rajouté un maitre nageur. Si seulement ils l'avaient mis avant celui là ! Je ne suis pas sûre, mais je crois que ça fait un an que je suis là. J'ai déjà essayé de partir, mais c'est comme si j'étais enchainée à cette endroit. Du coup je reste assise à coté des bouquets fanés que personne ne vient changer. Avant, ma mère le faisait, mais au bout d'un moment, elle n'est plus venue. Je crois qu'elle oublie, comme tous les autres. Avant, les gens qui passaient devant moi avaient un air triste et compatissant, maintenant, ils ne font que passer comme s'y il n'y avait rien à cette endroit. Mes parents m'ont oublié, mes amis m'ont oublié, ils m'ont tous oublié. Assise ici tous les jours à regarder les autres s'amuser, j'ai l'impression de n'être personne. Je suis personne.
FIN
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La rive aux souvenirs
Short StoryC'est fou comme la vie est éphémère. Comme tout peut partir en poussière, en seulement quelques secondes.