Partie 1

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Elle l'avait vu. Elle en était sûre. Cela faisait déjà une lune qu'elle l'avait surpris lorsqu'il l'espionnait. Leila tourna la tête et continua à traverser les bois, nue.

- Rose! Arrête de courir comme cela, tu vas finir par te faire mal!

Cette dernière regarda par dessus son épaule et se mit à rire, d'un joli rire cristallin, si pur et joyeux, en voyant sa sœur lui courir après hors d'haleine. Elle daigna enfin s'arrêter. Son sourire était encore présent sur son visage lorsque sa sœur arriva à sa hauteur.

- Il faut rentrer, on nous attend. Ce ne sont pas des façons de courir ainsi pour de grandes dames telles que nous.

Rose s'exécuta, non sans tirer la langue à sa sœur Leila d'une moue moqueuse. Elles étaient toutes deux les plus jolies et les plus riches partis du royaume et étaient très courtisées. « De grandes dames » comme il était coutume de les appeler. Mais Rose ne pensait pas ainsi. Pour elle, les femmes étaient des créatures merveilleuses et pour cela, elles avaient le droit de faire ce que bon leur semblait. Leila, l'aînée, se contentait de faire ce qu'on attendait d'elle. Sur le parvis du manoir, elle dit à sa benjamine:

- « Ma chère sœur, qu'allons-nous devoir faire de vous? »

Lorsqu'elles arrivèrent au manoir, le majordome les jaugea. Il avait dû les apercevoir par la fenêtre du boudoir, courir comme des enfants.

Il appela Lisette et Charlotte, les deux femmes de chambres :

- « Ces dames ont sûrement besoin d'un bain, ainsi que d'une nouvelle toilette. »

Honteuse, Leila remarqua des accros dans sa robe bleue. Les ronces avaient dû emporter des pièces de tissus. Elles montèrent toutes deux, secondées par leurs femmes de chambre. Ces dernières firent couler deux bains et lorsqu'ils furent assez chauds, les deux jeunes dames y entrèrent. La tête en arrière, Leila laissait l'eau brûlante réchauffer son visage. Elle se redressa et Charlotte lui frotta le dos. L'heure du bain était agréable. Se laisser dorloter par les mains expertes de femmes qui semblaient avoir fait ça toute leur vie était extrêmement plaisant.

Il était l'heure du souper. Les deux sœurs vinrent à la table familiale. Leur mère n'était malheureusement plus de ce monde, alors seul leur père était présent. Un portrait de l'ancienne maîtresse de maison trônait au dessus de la place de la grande table qui fut la sienne autrefois. De son vivant, elle dirigeait cette demeure d'une main sévère. Pourtant, tout le monde savait bien qu'elle avait un cœur énorme, débordant d'amour pour ses filles. Le père se leva, les deux jeunes filles firent de même. Il était l'heure de la prière, puis, on entama le repas.

Le repas terminé, Leila et Rose regagnèrent hâtivement leur chambre respective.

- « Ne viens pas me voir ce soir Rose. Surtout pas. » supplia Leila.

Elle devait retrouver qui était cet étrange homme qui l'avait vue il y a deux nuits et sa petite sœur ne devrait pas être là. Comme à son habitude, elle attendit sur son lit que Charlotte la rejoigne.

La porte s'ouvrit enfin sur cette dernière.

- « Veuillez m'excuser maîtresse de mon retard. » Chuchota-t-elle, embarrassée.

Leila, rit discrètement et l'interrompit :

- « Voyons, pas de ça ici, je vous en prie. Nous ne sommes pas priées de faire bonne figure dans ma chambre. Allons, aidez-moi. »

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