Futur anticipé

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Et l'on courra le long des voies ferrées, nos corps tremblant d'anticipation à l'arrivée de ces monstres de fer. Et l'on rira de s'être effrayée à en claquer des dents, et l'on rira d'avoir frôler de trop près le danger. Le froid viendra nous trouver allonger dans l'herbe délavée, et l'on tremblera de s'être trop découverte. Nos regards enfin croisés réchaufferont nos corps délaissés. Les tissus de nos hauts abîmés, le jean usé couvrant nos jambes, les baskets tachées de boue et de vert de ce lit improvisé. Nous parlerons de ces choses qui n'ont de sens qu'après les désastres partagés, on parlera de cette vie que l'on voudrait rêver. On parlera à n'en plus finir, nous ferons ces promesses que l'on sait déjà brisées, nous rêverons de ces choses passagères. Sous le toit d'une même maison l'on soupira que la vie est souvent trop dure. On se plaindra que le temps nous manque et doucement nous dériverons. Nous nous séparerons et des années après l'on se manquera, des années après l'on regrettera. Telles des folles on se demandera ce qui a mal tourné et l'on se souviendra de cette herbe délavée, de ces trains qui nous ont si souvent caressés. On regardera le ciel et l'on se rappelera du temps passé, on pleura un soir assise dans l'herbe. On abîmera notre haut, on salira nos chaussures et on enfilera ce jean délaissé. Seules dans l'intimité on se souviendra de ces promesses brisées, de ces moments gâchés et l'on se plaindra du temps qui passe lentement. On se manquera pour l'éternité tu sais. On se manquera pour la vie et à la fin de celle-ci on rêvera de cette herbe délavée. On rêvera d'être réunis et enfin on sourira. Enfin on sera ces deux filles perdues au milieu des voies ferrées, enfin on retrouvera notre liberté. Ça aurait été notre histoire tu sais. Ça aurait été notre histoire si tu ne nous avais pas quitté. Ça aurait été notre destinée.

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