11 - AMBER

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Je marchais rapidement pour prendre mon métro et me casser au plus vite possible de ce lieu déplaisant, quand on me prit l'épaule. Je me retournai et vis Ana. Mon coeur fit un bond, même si ça me tue de l'avouer.

- Amber, dit-elle difficilement.

Choquée de la voir et d'oser m'adresser la parole, je ne dis rien et la laissai parler, espérant des excuses et espérant qu'elle veuille continuer à me voir.

- Si ça te dérange pas... Est-ce que tu pourrais me passer le début du cours de 8h ? S'il te plaît ?

Mon égo prit un coup, un énorme coup. Moi qui m'attendais à ce qu'elle me parle d'hier, elle me demande les cours. Je suis déçue. Pourtant, il y avait quelque chose de suppliant dans sa voix. Un genre de sous entendu. Comme si elle cherchait à cacher son envie de me parler à travers cette excuse merdique.

- Ah, dis-je sur un ton neutre.

J'essayais de rester le plus neutre possible, même si dans ma tête, c'est le foutoir.

- Tu... tu peux ? S'il te plaît.

Son visage innocent est si adorable que je me sens désarmée pendant un instant.

- Et je te promets que je te laisserai tranquille, après, dit-elle en me suppliant presque.

Je ne sais pas où elle a vu que je voulais qu'elle me laisse tranquille. Ah, si, peut être qu'hier elle l'a vu comme ça quand je suis partie sans faire de gros commentaire. Puis surtout quand je lui ai dit qu'elle était chiante, et que je préférais des plans culs à une vraie amitié avec elle. Je suis peut être la fautive, finalement. Mais je préfère qu'elle se sente coupable et qu'elle me supplie.

- Si c'est comme ça, non.
- Pardon ?
- Je te passerai pas le cours.

Si elle me dit que, si je lui donne le cours, elle ne me parlera plus, je refuse de lui donner mon cours. Et ce qui m'arrange en même dans dans le fait de refuser, c'est que de son point de vue, c'est comme si justement, je voulais qu'elle me foute la paix. Et je préfère qu'elle croit ça. Comme ça, elle reviendra de plus belle.
Je vis son visage se décomposer.

- Bon... et bien, merci quand même.

Elle avait presque les larmes aux yeux. Elle allait s'en aller, mais, énervée, je la retenue.

- Je vais te le donner ton cours. Mais ne me laisse pas tranquille pour autant.

Sans la regarder, je lui donnai mes feuilles. Mon égo est déjà assez touché comme ça, alors je vais pas en rajouter en regardant ses yeux reconnaissants.

- Tu es sûre ?
- Ouais, dépêche toi de les prendre avant que je change d'avis.
- Merci... merci.

Je me retenais de sourire et gardais mon visage sérieux.

- C'est rien. Rends-le moi demain.

Et je partis. Je ne veux pas entendre sa réponse. Je rentrai chez moi et déposai mes affaires de cours. Je me regardai dans le miroir de la salle de bain et soupirai. Je fous quoi de ma vie ? Pourquoi rien ne me plait ? Personne ne m'aime et je n'aime personne. Je couche juste de droite à gauche en croyant naïvement à chaque fois que ça va m'aider à reprendre goût à la vie. Mon cul, ouais. Pourtant je continue, comme une conne. C'est d'ailleurs ce que je vais aller faire cet après midi. Ces histoires avec Ana m'ont énervées. Je ne comprends pas pourquoi pour la première fois de ma vie, j'ai envie d'essayer d'avoir une relation cool avec quelqu'un. Je sais pas pourquoi ça m'énerve tant d'ailleurs.
J'arrivais dans le bar de Karen et la saluai.

- Hey ma belle ! dit-elle en commençant déjà à me servir un verre.
- Une blonde, comme d'habitude ? dit-elle.
- Non, je veux un alcool fort.

Elle m'avait posé la question en pensant connaître la réponse -puisqu'elle est d'habitude toujours la même.

- Alors toi, ça va pas.
- Si, si. Je fais que passer.
- Tu cherches une meuf ?
- Mh, ouais. Sûrement.

Elle soupira, comme si elle partageait mon mal-être.

- Je vois bien que ça va pas, hein. Si tu veux me parler, je suis là.
- Ouais, ouais. C'est sympa.

Je pris le verre d'alcool qu'elle m'a servi. Je le bus d'une traite et crus que j'allais vomir. C'est écœurant au possible. Karen riait derrière le comptoir.

- Bah alors ? On fait des demandes sans réfléchir ? dit-elle en se moquant gentiment de moi.
- N'importe quoi. J'adore.

Je finis alors le verre pour appuyer mes propos. Elle semblait amusée. Je ne suis pas une alcoolique, loin de là. Je dois même pas boire une fois par semaine. Allez, peut être deux, puisque je vais souvent en soirée. Mais la plupart du temps, je passe mes soirées sobre.
Je vis un groupe arriver : trois mecs et deux filles. Je fixais la blonde qui semblant être plus ouverte que l'autre. Sa gestuelle me disait qu'il y avait possibilité entre nous deux.

Une heure après, je tiens cette belle créature par la main et l'emmène dans les chiottes du bar sous les yeux amusés de Karen. Elle croit que je fais ça encore par plaisir, mais si elle savait. J'essaye plutôt de pas me faire chier. J'ai l'impression d'en être obligée, maintenant.

- Tu as déjà testé les filles ou pas ? lui demandais-je en la plaquant contre le mur des toilettes.
- Non, vraiment pas. J'aime les hommes.
- Dans cinq minutes, tu vas jurer être lesbienne.
- Voyons ça, alors.

Elle est en effet ouverte. Tant mieux. J'ai hâte de la faire hurler pour remplir un peu plus mon égo. Je la poussai dans une cabine de toilettes. J'aime bien faire ça dans les toilettes car c'est calme et impersonnel. Tout ce dont j'ai besoin.
Je relevai son t-shirt moulant au dessus de sa poitrine. Je remontais son soutien-gorge et commençais à peloter ses seins. Je ne ressens rien. Je fais ça comme un jeu. Comme un élève à qui en demande de lire le premier paragraphe du texte. C'est ni cool, ni pourris. On s'en fout, donc on le fait.
À ce moment, je m'imaginais voir les seins de Ana et pouvoir les toucher à la place de ceux de cette inconnue, et je me dis inconsciemment que je ressentirais peut être quelque chose.

Soudainement, je retirai ma main et m'éloignai de la fille qui semblait n'attendre que moi.

Je ne ressens rien alors pourquoi je continue ? Car c'est facile. C'est facile de faire ça car personne me fait chier. Y'a pas d'embrouille car tu t'engages pas. Tu le fais une fois et c'est fini. La personne te fait pas chier.

- Tu fous quoi là ? Je suis toujours pas lesbienne.

Je regardai la fille dans les yeux. Je me sens désolée pour elle. Mais pas assez à voir, puisque je lui redescendis son t-shirt et m'en allais.

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