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À la base, je suis allée voir Karen pour qu'elle me conseille à propos de ce que je ressens -pas- quand je fais l'amour -ou devrais-je dire, baise comme un animal-, mais au final, tout ce qu'elle a fait, c'est me dire qu'avec Ana, tout se passait bien. Bien que ça n'était pas le sujet principal de la conversation, je me sens satisfaite de sa réponse... peut-être parce qu'en fait, le sujet principal de ma venue, c'était pour parler d'Ana. Et Karen l'a mieux compris que moi-même.
Je sais vraiment pas ce qu'il m'arrive. J'ai jamais été comme ça, j'ai jamais eu à me confier à Karen, et rien que ça, c'est inhabituel. Malgré tout, je ne peux pas m'empêcher de rejeter la faute sur Ana : c'est depuis qu'elle est arrivée que j'ai commencé à me prendre la tête, seule, ou avec quelqu'un, en l'occurrence, elle.

Aujourd'hui, nous sommes Lundi, et même si je ne le dirais jamais à personne, ça me stresse d'aller en cours. Pas pour les homophobes emmerdeurs habituels, mais surtout, je sais pas ce que je suis censée faire en voyant Ana.
J'attends que le métro arrive et vois sur le panneau que je vais devoir attendre encore cinq minutes. Je souffle un bon coup et vois arriver un groupe de deux mecs et trois meufs que je connais -trop- bien.

- Hey la lesbienne, hâte d'avoir ta p'tite conversation matinale avec... nous ?
- Vraiment pas. Lâchez-moi.

Le grand bronzé rit en regardant ses amis.

- Tu fais la maligne, tout ça, mais toute seule contre nous cinq, t'es rien.
- Pourquoi j'aurais peur d'une bande de lâches qui n'ose pas venir seule en sachant pertinemment que dans ce cas là, je vous éclaterais tous ?

Il fit mine de s'essuyer le menton d'un revers de main et s'approcha de moi. Le mec derrière qui est lui aussi là tous les matins, mais plutôt du genre passif envers moi prit le bras du bronzé.

- Mec, il reste plus que deux minutes, dit-il en montrant le panneau.

Le bronzé me regarda du coin de l'œil.

- La prochaine fois, viens plus tôt, qu'on ait le temps de voir qui est le plus fort entre le baiseur et la lécheuse de chattes.

Sa misogynie me donne envie de gerber. Quand le métro apparut, je fus soulagée de ne pas avoir à les supporter une seconde de plus et entrai dedans. Ils se dirigèrent, comme d'habitude, vers une autre rame. Comme s'ils voulaient évités d'être vus avec moi. Je m'en fous un peu, de toute façon, ça doit faire deux ans qu'ils me menacent, et je suis encore en vie. Je me dis que je devrais prendre un peu plus ma moto, mais l'essence, c'est cher, et l'abonnement illimité au métro est carrément moins cher. Et pour moi, même les petites économies comptent.
Le métro arriva à la station de Ana. Quand elle entra dans le métro, je regardai ailleurs. Le métro est blindé et il n'y a plus de places assises. Elle jeta un coup d'œil vers moi mais détourna rapidement le regard. Elle réussit avec difficulté à passer son bras à travers les autres bras pour atteindre la barre en fer, et jeta un autre coup d'œil vers moi.
Deux mecs, à priori potes étaient de chaque côté de Ana et se regardaient en souriant et en jetant des regards furtifs vers elle. Quand j'en vis un faire semblant d'avoir été bousculé pour se coller à elle, et l'autre rire comme un demeuré, j'eus beaucoup de mal à me retenir d'éclater.

- Ana ! l'interpellai-je.

Elle se retourna et fut très surprise que je lui parle.

- Prends ma place, dis-je.
- Oh, euh, non, t'embête pas, dit-elle gênée.

Les deux mecs semblaient peu heureux de ma proposition. Je les fusillai du regard tout en me levant et tirai la main de Ana pour la forcer à s'asseoir à ma place.

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