Journal de bord (1)

394 4 4
                                    


Peut-on s'introduire dans le cerveau des gens ?

Notre esprit, cet espace que l'on considère comme le dernier rempart de notre individualité, comme le jardin secret bien dissimulé et sacré qui nous tient à distance du monde, est il vraiment impénétrable ? Avant que tout ceci ne commence, je pense que j'en étais persuadé.

Persuadé aussi qu'il était un espace bien défini, carré. Que l'on pouvait le développer en apprenant, certes, mais qu'il possédait des caractéristiques figées depuis notre naissance. On était « intelligent » ou non. On « avait de la mémoire » ou non. On était « rapide » ou non.

Enfin, j'étais persuadé que la plus grande aventure qui nous attendait était dans l'espace. Ou au creux de la terre. Ou au fond de la mer. Bref, hors de nous. A l'extérieur.

Jamais je n'ai eu la sensation de me tromper autant que depuis ces quelques semaines.

Mais je ferais mieux de commencer par le commencement, en l'espèce par mon métier : journaliste.

Bon, journaliste est un grand mot. J'écris des articles que j'essaye de vendre aux journaux. Ceux que je ne vends pas je les poste sur un blog. Parfois je prends des commandes. Contrairement à ce que l'on pourrait penser, un tel boulot n'est pas du tout solitaire : il faut au contraire un grand réseau pour tomber sur la bonne personne, le bon angle de vue, le bon reportage... au bon moment !

Je passe donc un temps considérable sur les blogs, les réseaux sociaux, mais aussi dans les expos, les cafés, les vernissages, les conférences-débat, les cinémas, les théâtres...

Bref, je fais probablement partie de ces types sûrs d'eux, qui ont tout vu, tout lu, connaissent tout, et fatiguent tout le monde.

Pour moi tout a commencé à la lecture d'un billet sur un blog de développement personnel. Généralement j'évite ce genre de blogs qui ont une tendance à me gonfler de fleurs, de papillon, d'énergie vitale et de transcendance très rapidement. Mais là, c'était un blog tenu par un type sérieux, qui présentait généralement des choses étayées. Alors j'ai lu.
Et le billet parlait d'hypnose. J'ai donc rigolé en imaginant un grand type moustachu, une montre à gousset à la main, proférant d'une voix grave « dorrrrrmez je le veux » en roulant les R.

Mais j'avais du temps, j'étais lancé, j'ai quand même lu.

Et le sujet m'a intéressé.

Il parlait des potentialités de notre cerveau, qui n'attendrait qu'un signe de notre part pour nous aider à développer nos compétences.

La théorie étant plaisante, j'ai décidé de creuser le sujet.

La curiosité est la plus grande arme de l'aventurier du XXIème siècle.

Pour aller plus loin sur le sujet de l'hypnose, je disposais de plusieurs moyens : interroger mes connaissances, continuer les recherches, ou attendre que quelque chose se présente. Mais j'ai choisi un autre angle d'attaque : l'appel à témoignages.

C'est une stratégie très pratique qui permet de meubler pour pas cher n'importe quel article sur n'importe quel sujet : on remplit le tout de récits d'expérience. Ca fait sérieux sans se palucher trop d'articles scientifiques, et les gens s'identifient sans trop réfléchir ce qui fait des lecteurs facilement captifs et avec un peu de chance des débats furieux qui font parler de l'article.

Le top pour un journaliste en herbe.

J'ai donc laissé un message sur mon blog, un petit encart ainsi rédigé.

« Pour article sur l'hypnose, je recherche des témoignages. Toute expérience est intéressante. »

Je me disais que je parviendrais peut être à récupérer deux ou trois informations, voir même une histoire sympathique.

Mais je ne m'attendais absolument pas à cela.


HypnotiseursOù les histoires vivent. Découvrez maintenant