Elle faisait les trottoirs, vêtue de sa jupe trop courte, de son haut révélateur et de son sac contrefaçon GUCCI. Elle avait des yeux bleus aux pupilles dilatées et aux reflets hypnotiques encadrés par ses cilles habillés de mascara en pâté. Elle marchait élégamment tout en tordant exagérément le derrière de son corps, elle séduisait les passants et les véhicules dont les roues ralentissaient progressivement. Elle enamourait la nuit, devenait une de ses nouvelles étoiles, d'ailleurs c'est comme ça qu'elle se faisait appeler : Star. Elle aimait dire à ses clients que c'était parce qu'elle venait du ciel et que ce qu'elle avait à donner était interstellaire, lorsqu'on lui demandait d'expliquer elle répondait par un clin d'œil. Seul ceux l'ayant suivi connaissaient le fin mot de l'histoire de la jolie Star.
Elle était populaire, du genre à se faire jalouser par ses voisines de trottoir, elle avait peu d'amies parmi elles mais elle n'en avait pas besoin, ce qui la nourrissait c'était le désir qui consumait le corps des hommes, ce qui l'apaisait c'était de pouvoir l'apaiser à son tour. Elle marchait dans les rues en faisant claquer ses talons aiguilles, parfois ils étaient noirs, d'autres fois rouge ou encore brillants. On disait que son sourire était ce qui faisait d'elle la meilleure, qu'il y avait des promesses et du mystère derrière celui-ci. On avait peur de Star parce qu'elle appâtait les clients et qu'ils revenaient inlassablement, comme si elle était une drogue dont ils ne pouvaient plus se passer. On avait peur de Star car elle semblait être la nuit, on avait peur de Star car le jour semblait attendre son départ pour pouvoir briller. On avait peur de Star parce qu'on ne la connaissait pas.
Star attirait tout le monde, des voitures déglinguées à celles à plusieurs centaines de milliers d'euros. Certains soupçonnaient Star d'être la femme d'un grand dirigeant et qu'elle donnait rendez-vous aux amis de son mari ici. D'autres disaient seulement qu'elle avait ce truc, comme un don et qu'il fallait l'accepter, qu'après tout une fois dans la voiture elle libérait le trottoir pour d'autres personnes expérimentées. Il y avait beaucoup de supposition sur Star, c'était presque un mythe. Quelques fois entres les allées mal éclairées on entendait les murmures de ceux cherchant à savoir si Star avait vraiment existée. Certains hochaient la tête négativement, d'autres positivement, au final personne n'avait vraiment de certitude quant à son existence. Pourtant, Star avait existé, elle était belle et bien réelle. Ses cheveux flamboyants marquent encore les iris de ceux l'ayant vu passer, ses baisers sont encore imprimés sur les lèvres de ces messieurs charmés, ses caresses font toujours frissonner ceux qu'elle a touché. Star a été tout ce qui a été de plus réel, mais Star s'en est allée.
Star un soir est rentrée chez-elle, a retiré sa jupe et son haut, a dénudé son visage de ses artifices. Elle a rangé ses talons aiguilles au fin-fond d'un placard, elle a ôté sa perruque et son soutient gorge beaucoup trop rembourré. Star s'est mise nue et s'est contemplée dans le miroir de sa salle de bain, elle a observé les légères cernes bleutés en dessous de ses yeux, le reste d'eye-liner qu'elle avait mal retiré. Elle a observé ses larges épaules un peu plus musclées que la moyenne, son torse et son ventre puis son entre-jambe qui restait le plus grand de ses secrets, le plus précieux de ses atouts. Star regardait la chose qui, elle l'avait choisis, jamais ne la définirait. Star a souris à son reflet puis est allée se coucher.
Le lendemain, dans son costard cravate, Star a été mutée dans une autre ville. Elle avait atteint les hautes sphères du monde économique et elle voyait devant elle s'étendre un peu plus les possibilités de sa vie rêvée. Star est rentrée chez-elle, elle a fait sa valise. Elle y a rangé ses jupes et ses hauts, ses talons et ses chaussures. Elle a soigneusement plié ses divers costumes, astiqué ses mocassins.
Star a quitté la ville et ses trottoirs, ses clients et les passants. Elle est partie vivre sa vie dans une ville qui dorénavant voit naître Star le soir et vivre Hary le jour. Elle est partie et, il n'y a aucuns doutes que, là-bas aussi elle est devenue celle que l'on appelle Madame.
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Madame
Short StoryElle n'était comme personne, elle était unique. Elle vivait la nuit sans vraiment mourir le jour. Elle est de ceux que l'on dit inoubliables. Couverture: Francis-Olivier Brunet