Just a dream

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  • Dédié à A ceux qui s'aiment
                                    

« Je t'aime »

Ce fut le dernier mot de la femme que j'aimais.

Lorsque le jour J arriva, j'enfilai mes habits noirs. Jour de deuil. C'est la chose la plus simple dit-on, de faire son deuil lorsque on est encore jeune car on a encore toute notre vie pour combler ce trou créé par le décès d'une personne. Sauf que voilà, je viens d'avoir quatre-vingt-sept ans. Soixante-sept ans de vie commune. Soixante-sept ans d'amour. Soixante-sept ans tombant d'un coup et laissant place à un futur bien maussade. Longue fut cette journée, les gens venaient en nombre rendre un dernier hommage ma défunte femme. Quelques jours après, elle fut enterrée. Et chaque jour, je vins sur sa tombe. Je lui apportais ses fleurs préférées. Des amarantes. Oui, ça peut être des mauvaises herbes mais, les rouges, sont les préférées de ma femme. Ces fleurs signifient un amour durable. Un jour, alors que je me rendais sur sa tombe, je levais les yeux vers le ciel bleu. Les oiseaux volaient haut, très haut. Vieux et ne tenant plus sur mes jambes, je m'asseyais à côté de la tombe et j'attendais. Je passais mes journées à attendre. Sans raison. Peut être que j'attendais un signe? Quelque chose ou quelqu'un qui puisse me dire: « Votre femme est là! Elle vous attend, dépêchez-vous! ». Oui, elle m'attendait certes, mais pas dans ce monde-là. Dans un monde bien différent du nôtre. Ou peut être que ce monde, n'est pas si différent de celui qui nous entoure? Chaque jour, le ciel était bleu comme la mer, ça me rappelait notre rencontre.

Nous nous trouvions sur l'île d'Hokkaidō. Un voyage, un amour qui dura toute une vie.

Un soir, on s''était retrouvé à la plage. Nous étions jeunes à ce moment là. Elle avait dix-neuf ans et moi vingt. On avait dansé toute la soirée, sur du rock puis des chansons plus calmes. Nous les avions faites ensemble. Peu après, nous nous étions retrouvé seul. Sur cette plage immense, sans un bruit, à part celui des vagues. Elles résonnent encore dans ma tête. Oh oui je m'en souviens. Nous nous étions assis et nous avions regardé l'horizon.

« Loin! Je voudrais aller loin. Et voler. Être libre comme un oiseau. »

Je l'avais regardée:

« Qui te dit qu'un oiseau ne voudrait pas être comme un humain? Avoir un endroit stable, et surtout pas une cervelle de moineau! »

Elle avait ri. J'aimais son rire. Il était beau. Ses sourires me faisaient sourire. Oui je l'aimais. De tout mon coeur et plus que tout.

« Justement, ils ont un petit cerveau, ils ne penseront pas à ce problème. »

Elle avait toujours les répliques pour me contredire et je trouvais ça charmant.

Plus tard, nous nous sommes mariés. Mais nous n'avons pas eu d'enfants. Nous ne pouvions pas en avoir. Ma femme avait pleuré, pendant des jours et des jours. Quand la personne que vous aimez pleure.. ça vous fait mal. Mais nous en avons adopté un. Hikari. Tel est le nom que nous lui avons donné. Il a grandi. Maintenant, il est marié et a deux enfants. C'est une plutôt belle histoire.

Mais voyez-vous, ce garçon a peur de la mort. Et la mort rattrape ceux qui la fuient. Mais ceux qui n'ont pas peur de la mort, c'est qu'ils l'attendent. Et elle ne viendra les chercher que très tard.

Un jour, alors que j'étais dans mes pensées, près de la tombe de ma femme, ça faisait un an qu'elle était morte, une petite fille se planta à quelques mètres de moi. Elle me fixait. Ses yeux gris me faisaient penser au ciel avant un orage. Ses cheveux courts, noirs, me faisais penser à de l'ébène. Elle avait une fleur dans les cheveux, un lys. Un lys blanc.

Elle s'approcha de moi et regarda la tombe.

« C'est ta maman qui est morte? »

Elle toucha la pierre.

Just a dream [Terminé]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant