J'ai vu notre futur rouler entre ses doigts. Je savais, tout le monde le sait, comment cette histoire se finirait. Ça se finit toujours de la même façon. Pendant une poignée de seconde, j'nous ai vus sur ces lits blancs, ces lits qui puent la maladie et la mort.
Pendant une poignée de seconde j'ai été lucide. Ça ne m'était pas arrivé depuis notre rencontre, je crois. Au début c'était ses mots. Ayesha, elle avait des mots qui me transportaient dans d'autres mondes, d'autres galaxies dont je n'avais même pas idée qu'elles puissent exister. Ses mots, sa voix. Puis je me suis imaginée, avec ce qu’elle me proposait. Des manières nouvelles de rêver, de toucher du doigt l’exaltation du bonheur de la vie. Je la voyais, très vite s'immiscer entre nos lèvres qui devenaient blafardes et nos joues qui de jours en jours, devenaient creuses. On penserait avoir le contrôle au moment où on le perdrait. D'un seul coup, on n'aurait plus accès aux freins.
Et il perdurait, malgré tout ça. Son rire qu'elle masquait sous un épais brouillard de fumée. Pendant un instant, un seul.
J'ai vu ce que nous deviendront si l'on commençait. Et on a beau dire ne pas s'aimer, ne pas savoir marcher, être exaspéré, se détester
Ce n'était pas ce que je voulais pour nous, pour elle et le reste des planètes qui surplombait nos tête.
Alors d'un geste doux mais ferme, d'un regard éloquent qui en disait long, j'ai écarté de la flamme du briquet. Je l’ai écrasé de mon pieds gauche. Et j’lui ai souris, parce que je sais qu’elle comprendrait sans que j’ai besoin de lui expliquer.Parce que ce n'est pas l’avenir que l’on mérite.
Parce que l’on a bien mieux à faire.
Parce qu’il y a d’autres manières bien plus belles de voyager.