Chapitre 1

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La blancheur qui envahissait le lieu dans lequel je me trouvais me fit penser au paradis

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La blancheur qui envahissait le lieu dans lequel je me trouvais me fit penser au paradis. Des êtres aux sourires d'anges étaient à mon chevet. L'un de ces lumineux spécimens s'approcha de la fenêtre dont les pales rideaux tissaient un étendard sous le souffle chaud du vent. Cette ambiance chaleureuse se refléta également sur mon visage et afficha un prolongement croissant à ma bouche. Un autre de ces inconnus, ou devrais- je dire une autre, s'approcha de moi et il me sembla qu'elle voulait me parler. Je dus me tromper car aucun son ne parvint à mon tympan et ma vision était encore brouillée par l'image éblouissante que me renvoyait cet endroit. Après avoir enlevé toute hypothèse de danger de mon esprit, je me mis à regarder à quoi je ressemblais. Ce fut une redécouverte. C'était comme si je possédais le corps d'une autre personne. Ma peau râpée semblait vivre sous le diktat de mes os, qui, menaçaient de la faire disparaitre totalement si elle ne leur laissait pas une place hors de mon être. Je sentis une sorte de pression sur ma tempe qu'une multitude de tentacules enserrait. Je les parcourais de mes mains longues et bleuies, pour finir par essayer de m'en extirper. L'un des êtres de lumière me regarda, horrifié. Il se précipita vers moi, tandis que de mon côté je tentais de me lever de mon lit. Mes jambes flageolantes, raides comme des bâtons, parvinrent à fuir pendant quelques pas avant de fondre et de me projeter ainsi sur le sol froid de ce lieu étrange et mystérieux. Finalement, ma respiration se coupa, et malgré maintes tentatives de me raccrocher au lit, je perdis connaissance.

Lorsque je rouvris les paupières, une dame d'une soixantaine d'années me veillait. Je m'assis alors et tentai de lui poser plusieurs questions sans savoir vraiment que dire. Mais, aucun son ne sortit de ma bouche ! J'avais beau pousser sur mes cordes vocales, mes mots semblaient s'évaporer dans une atmosphère pesante. La femme prit alors mon visage entre ses mains et m'allongea en prenant soin de positionner mes oreillers de manière à ce que je me détende. Elle prit un marqueur et m'écrivit sur un petit tableau les mots suivants : « Bonjour Mademoiselle Ruehlam, je suis votre doctoresse ». Je n'étais finalement donc pas dans l'un de ces mondes étranges des contes que l'on décrit aux enfants lorsqu'on leur vend du rêve. J'étais dans un hôpital. Elle saisit mon inquiétude sur le vif et tenta de l'apaiser par maintes caresses dans mes cheveux hirsutes. Quelques instants plus tard, elle écrivit une phrase avec son Velléda. Une phrase qui bouscula à tout jamais mon existence : « J'ai l'immense regret de vous informer que vous vous trouvez dans un état de surdité aigu ». Mon sang ne fit qu'un tour. Une pulsion de colère profonde s'échappa de mon âme, remonta le long de ma trachée, pour finir par se perdre dans un silence total. Mon médecin avait sursauté et immédiatement mit ses mains fripées sur ses oreilles tandis que moi, je sombrais dans les abysses du vide. La fureur impétueuse qui me possédait se relâcha, cédant immédiatement à une stupéfaction intégrale. Cette dernière bloqua tous mes muscles et me coupa la respiration. Finalement, quelques instants plus tard, je me détendis et la pression s'évacua sous la forme de larmes noircies par la souffrance.

Les mots qui me venaient à l'esprit étaient léthargie ou bien coma. C'était à peine si le silence se mêlait à l'obscurité. Le monde m'apparaissait fade et insipide, éteint de toutes couleurs. Il me semblait pourtant que la surdité n'entrainait aucune forme de perte de vision. Pire que cela, le contact de mes pieds nus sur le sol glacial de l'hôpital ne me procurait aucune sensation. Lorsque j'entrais dans le cabinet de Madame Stenfield, ma doctoresse, mes parents affichaient une mine cauchemardesque à en faire pâlir les morts. Le visage de mon père s'illumina en me voyant paraitre. Il apporta un peu de chaleur à ce décor morbide. Au plus profond de moi je pouvais comprendre le corps stoïque de ma mère. Car, oui, en effet j'ai oublié de vous préciser un élément essentiel qui forge mon existence : je suis une violoniste soliste et ma mère en fut également une par le passé. Elle avait ainsi placer de profonds espoirs en moi. Je vous laisse ainsi imaginer la ruine que je sème autour de moi.

La Sensation Des SensWhere stories live. Discover now