Rapport n° XXIV de la Faculté,
Carnets du professeur Charles Lawrence Grey, porté disparu.
JOURNAL DE C.L. GREY 11.04.86
Je suis à bord du Sonia, un caboteur en partance de L. Nous sommes partis à 18h00 du port alors que la brume commençait à tomber. John Porshe, le capitaine, semble assez jeune sous son épaisse barbe brune. Il m'a confié avoir vu mon père il y a un peu plus d'un an. Il cherchait un bateau qui aurait pu l'emmener au large des côtes, plus au nord, en plein milieu des eaux internationales. C'est l'un des amis de Porshe, un certain James Klark qui a fini par consentir à aider mon père. J'ai bien tenté de retrouver ce Klark, mais il fut porté disparu en mer depuis le 03.02.85.
Porshe m'a confié que lui et mon père avaient pris le large quelques semaine avant cette date. C'est un bon gars, un peu bourru et son penchant pour le whisky n'ira pas en s'arrangeant, mais il m'a fait une très bonne impression. Il n'a rien laissé paraître, mas je crois qu'il nourrit le même espoir que le miens, aussi faible soit-il de retrouver un être cher disparu.
Je doute que l'on retrouve ni l'un ni l'autre, mais je saurai ce qui est arrivé à mon père.
Nos devons faire quatre escales avant de poursuivre notre but. Sonia dessert les petits villages côtiers les plus difficiles d'accès. Mon père n'a pas suivi cet itinéraire, d'après l'une de ses lettres, il explique avoir fait le trajet d'une traite. C'est d'ailleurs en montrant quelques uns de ces courriers à Porshe que je l'ai convaincu que mon père avait survécu à son voyage, même s'il ne faisait mention de personne d'autre.
Je ne ferai pas cette erreur et je tenterai de retranscrire les faits avec le plus de véracité possible. Je ne peux pas en vouloir à mon père, c'était un scientifique, un chercheur, qui ne vivait que pour son travail. Il était obnubilé par sa découverte et s'il retranscrivait des informations étrangères à ses recherches, c'était bien malgré lui. Je vais donc tenter de reprendre le cours des évènements présents avec précision.
Il est 21H07 à ma montre et nous allons bientôt repartir de notre troisième escale. Nous ne sommes plus que quatre sur le bateau. Porshe, le capitaine, Mr. Fake et sa femme, ornithologues amateurs et moi-même. Fake est pharmacien dans une bourgade dont le nom m'échappe et sa femme, Georgia, le seconde dans sa tâche.
Ils m'ont dit être mariés depuis dix ans, ce sont des gens aimables mais peu coutumiers d'embarcations du type de Sonia. Mr. Fake, Patrick de son prénom a été incommodé une bonne partie du voyage. Mrs. Fake n'a, de son côté, aucunement le mal de mer et m'ayant pris d'affection, s'est sentie très obligée de me tenir compagnie. Fort heureusement, la conversation ne s'est presque exclusivement concentrée sur la passion qu'elle partage avec son mari pour les oiseaux.
Je n'éprouvais aucunement le désir de parler de mon projet, ni d'entamer aucune conversation intéressante. Je restais donc à écoter les paroles que Mrs. Fake déversait avec beaucoup de bienveillance. Je n'avais pourtant pas quitté des yeux un homme à l'aspect singulier qui est descendu du cargo à notre seconde escale.
Il avait une lueur étrange au fond des yeux, qu'il essayait de dissimuler sous une casquette noire. Il portait un pardessus usé et sale, ainsi qu'une longue barbe poivre et sel qui lui mangeait une bonne partie du visage. Je n'ai pas aimé ce qui se dégageait de lui, ni la façon dont il détaillait Mrs. Fake. Je n'étais pas mécontent de le voir quitter le bateau, mais j'eus le sentiment désagréable de ne pas avoir pensé à assurer ma défense.
J'étais en vérité, parti en expédition à but scientifique et le fait d'emporter une arme ne m'avait pas effleuré l'esprit. Tout ce que je possédais en ce sens, c'était l'Opinel que mon oncle m'avait offert à mes quatorze ans.
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Les carnets de Charles Lawrence Grey
AventuraSuivez les aventures d'un ancien professeur d'archéologie, parti sur les traces de son père. Convaincu d'avoir retrouvé une ancienne civilisation oubliée, il n'a laissé derrière lui que des lettres énigmatiques. Le journal de son fils a été retransc...