L'envoyée des Elfes - Tome 1- Tarisar [Edité]

L'étang.

Au final, Maura avait décidé de passer sa journée à l'étang. C'est pour cela qu'en sortant du château, elle prit la route du village et continua de marcher pendant près d'une heure. Durant ce temps, elle en profita pour regarder autour d'elle, d'observer son environnement si beau qu'elle avait le bonheur de voir tous les jours. Enfin, elle finit par arriver devant une étendue d'eau, surplombée d'une petite cascade. Cet étang n'était pas très grand, mais elle adorait venir ici. Cela faisait longtemps, d'ailleurs, qu'elle n'y était pas venue se baigner. Elle posa son panier sous le saule pleureur qui le bordait, et sans attendre, elle commença à y entrer. L'eau d'automne n'était pas très chaude et elle eut un peu de mal à avancer. Seulement, une fois à l'intérieur, elle s'y abandonna et plongea. Elle se mit sur le dos, ses longs cheveux flottant autour d'elle. 

Elle était tellement bien. Hormis les petits clapotements de l'eau et la cascade, tout était calme. Pas un bruit ne se dégageait de la forêt. Elle n'avait ni froid, ni chaud. Elle se sentait tout simplement à sa place, et n'aurait aimé être nul part ailleurs. Doucement, tout en se laissant porter par l'onde faible, Maura ferma ses yeux, et s'intéressa à ses autres sens. D'abord, elle huma l'odeur agréable de la nature, elle perçut la délicate fragrance des fleurs, elle crut même reconnaître le parfum fin de la violette des bois. Elle se promit qu'elle ferait un beau bouquet pour le mettre dans sa chambre. Toutes les odeurs de la forêt se répandaient jusqu'à elle, et la jeune elfe ne put que respirer ces enivrantes senteurs. 

Puis, elle se concentra de nouveau sur son ouïe. Elle appréciait énormément le son de l'onde et de l'eau remuante, ça la berçait. Elle avait l'impression d'être englobée par une force protectrice, et elle avait envie de lâcher prise. Alors, elle s'endormit quelques temps, toujours dans l'eau sur le dos. Ce n'est que les courants d'airs, devenant frais, qui la firent sortir des bras de Morphée. Elle se redressa aisément, ayant pied, et nagea en direction de la cascade. Elle se posta juste en dessous, et y resta un bon moment, avant de se reculer et d'être dans l'étroit espace entre la roche et la chute d'eau. C'était son petit jardin secret à elle, personne n'y venait, elle pouvait donc y réfléchir tranquillement.  

Quand elle regagna la terre ferme, Maura chercha le soleil et de par sa position, en conclut qu'elle était en plein milieu de l'après-midi. Son ventre, criant famine, le confirma. Elle s'assit sous le sol pleureur, les racines lui créant un siège de fortune et saisit son panier. Les cuisiniers lui avaient préparé une salade de légumes, accompagnée de viandes séchées, et avaient ajouté des fruits. Elle dégusta son repas, soupirant de bien-être. Les rayons du soleil perçaient les feuilles de l'arbre, et elle put se réchauffer. Les gouttes d'eau perlaient sur sa peau, ainsi que sur sa robe, et elle attendit patiemment de sécher. 

"- Que c'est apaisant ! déclara Maura à voix haute. D'un coup, les arbres se mirent à gigoter, envoyant à l'elfe une grosse rafale d'air. Oui, très apaisant ! leur confirma t-elle. "

Un peu plus tard, elle se releva et commença à se promener, en suivant un petit cours d'eau. Ses pieds foulaient avec grâce le lit de feuilles rougeâtres. Elle était sereine, rien n'aurait pu la rendre moins radieuse qu'en cet instant. Ses pensées s'égaraient sur bien des sujets. Elle pensa à ses parents, se disant qu'elle avait plutôt de la chance de les avoir. Parfois, certains parents pouvaient être durs avec leurs enfants. Les siens ne l'avaient jamais été. Ou du moins, Maura savait que c'était pour elle, pour qu'elle s'épanouisse. Ils lui donnaient tout ce qu'elle voulait, et ne l'obligeaient à rien. Elle pouvait faire ce qu'elle souhaitait, quand elle le désirait. Aussi, elle n'était pas une enfant compliquée. Elle se contentait de peu, et prenait ce qu'on lui donnait sans rechigner. Il suffisait juste que ses proches soient heureux pour qu'elle le soit également. Ses parents, de ce qu'elle se souvenait, ne l'avaient jamais disputée une seule fois, en seize années.

De temps à autre, elle avait quand même l'envie de se rebeller. Elle ne leur en avait pas parlé, mais Maura était friande d'aventures. Elle voudrait tellement voyager en dehors de son royaume pour en voir d'autres. Or, elle ne savait même pas à quoi ressemblaient les frontières, et encore moins, celles des autres peuples. Elle comblait ce manque en lisant et en regardant les cartes et les croquis qu'on faisait du monde et des étrangers. Cependant, elle ressentait que ça ne lui suffirait bientôt plus. De plus en plus, elle sortait et elle ne restait que très rarement au château. Un unique voyage pourrait la requinquer, mais elle savait que ses parents seraient contre cette idée. Ils la protégeaient beaucoup et ne voulait pas trop qu'elle s'éloigne. D'ailleurs, ils n'aimaient pas qu'elle aille seule à l'étang. 

Remarquant que la lumière du soleil s'affaiblissait, elle retourna sur ces pas, et comme promis, elle composa trois bouquets de violettes. Elle en donnerait un à ses parents, un à Maëlle, sa meilleure amie, et un pour sa chambre. Puis, elle navigua, posément, entre les arbres. Lorsqu'elle les touchait, elle avait toujours la bonne surprise de les voir s'agiter sous ses caresses. Les elfes des bois avaient cette particularité de croire que tout être méritait la même considération, qu'ils étaient tous vivants. Maura sentait la vie dans la forêt et s'en réjouissait. 

Sur son chemin, elle croisa un petit hérisson. Le pauvre était coincé sur le dos, et se dépatouillait pour pouvoir se remettre droit. L'elfe ria devant cette vision attendrissante et elle ne put s'empêcher d'aller l'aider. 

"- Attends. Ne bouge pas, lui dit-elle, en le prenant entre ses mains pour le retourner. Voilà, tu peux continuer ta route maintenant."

L'animal la regarda quelques secondes dans les yeux, comme pour la remercier, puis il se remit en route. Elle fit la même chose, partant de l'autre côté, un sourire magnifique aux lèvres. Quelle belle journée venait-elle de passer !