Chapitre 44

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Chelsea pût rapidement sortir de l'hôpital et ce fut un véritable soulagement pour elle. Elle n'en pouvait plus de ces médecins qui insistaient pour qu'elle reste allongée sans faire le moindre geste car de toute manière, selon leurs dires, elle ne pourrait probablement plus jamais marcher.

Elle aurait volontiers tiré la langue à tous ces incapables lorsqu'elle avait quitté le hall d'entrée sur ses deux jambes ! Certes, elle ne pouvait pas sautiller partout comme un lapin, mais elle était capable de mettre un pas devant l'autre sans utiliser de canne.

L'inspecteur Daniels avait garé la voiture devant l'hôpital et l'aida à mettre sa valise sur la banquette arrière. Il l'aida également à monter dans la voiture et s'installa à côté d'elle, derrière le volant.

- La gare de Chicago ? Suggéra-t-il, comme une évidence.

- S'il vous plaît, inspecteur. Sourit-elle.

Il démarra et s'introduit dans le trafic qui était plutôt dense à cette heure de la journée.

- Est-ce que ça va ? Demanda-t-il face à son silence songeur.

- Je crois. Répondit-elle après une courte hésitation. Il est temps pour moi et ma famille de faire des obsèques dignes d'April et de faire notre deuil tous ensembles. Et il y a... des affaires que je dois régler. Rapidement.

- Je comprends. Vous allez garder la maison que votre sœur a achetée en Louisiane ?

- C'est une belle demeure...Elle représentait quelque chose d'important pour April. Ce serait bien si elle restait dans la famille. On pourrait s'y installer. Ajouta-t-elle, soudain rêveuse. Il y a beaucoup de place, un grand parc, de belles chambres. Je crois que mon père, Alma et Victor s'y plairaient.

- Vous quitteriez Milwaukee ?

- C'est la meilleure solution qui me soit venue à l'esprit. Soupira-t-elle. Les parents de Damian font partie d'une famille riche et puissante qui ne tolère pas les personnes qui souillent leur réputation. Et j'ai irrémédiablement tâché la leur en révélant que leur fils unique était un assassin. Ils vont nous mener la vie dure. Nous n'avons pas besoin de ça...

- C'est une sage décision, en effet. Approuva l'inspecteur. Et ensuite ? Qu'est-ce que vous allez faire ?

Chelsea lui sourit d'un air espiègle :

- Qu'en sais-je ? L'avenir me le dira ! Je crois que j'ai besoin d'espace. Et de temps pour réfléchir et me ressourcer. Cette enquête m'a mise à rude épreuve et a fait soulever des questions que je ne m'étais jamais posé avant. J'aimerais beaucoup voyager et découvrir de nouvelles cultures et d'autres paysages. Je pense que cela me fera beaucoup de bien.

- Je l'espère pour vous.

Il gara la voiture devant la gare, l'aida à descendre et lui porta sa valise jusqu'au quai. Dans quelques minutes, le train pour Milwaukee allait partir. Chelsea allait revenir auprès de sa famille et l'inspecteur retournerait à ses enquêtes.

Ils se firent face durant quelques secondes, se regardant droit dans les yeux et se souriant avec une certaine tristesse.

- Eh bien, je crois que cette fois, ça y est ! S'exclama-t-elle. Nous nous séparons pour de bon.

- Pour mon plus grand plaisir ! Raya-t-il.

- Vos paroles sont d'une cruauté ! S'exclama-t-elle, faussement peinée.

Il éclata de rire :

- Vous savez bien que je plaisante ! Mine de rien, je pense que vous allez me manquer.

- C'est vrai ?

- Un peu. Avoua-t-il. Mais ce n'est pas une raison pour que vous veniez me voir toutes les semaines ! Vous n'allez pas me manquer à ce point !

- De toute manière, je n'ai pas l'intention de dépenser des fortunes pour des billets de train uniquement pour vous voir ! Répliqua-t-elle. Vous non plus, vous n'allez pas me manquer à ce point !

Ils éclatèrent de rire. L'inspecteur lui tendit une main qu'elle serra avec plaisir.

- Bon voyage, mademoiselle Russell. Portez-vous bien. Vous êtes une jeune femme qui mérite que quelque chose de bien vous arrive.

- Je ne vous savais pas aussi sentimental. Commenta-t-elle en arquant un sourcil, narquoise.

L'inspecteur se renfrogna :

- Pour une fois que j'essaye de faire preuve de gentillesse ! Montez dans ce fichu train, débarrassez-moi le plancher, retournez à vos petites affaires insignifiantes et ne revenez plus m'emmerder ! Et j'ajoute même que je n'éprouverai aucun plaisir à vous revoir !

- Ça, ça vous correspond déjà mieux.

- Je pense tout ce que je dis, mademoiselle Russell. Grogna-t-il.

- Je vous crois bien volontiers. Déclara-t-elle avec un sourire.

Elle prit sa valise, lui sourit et monta dans le train. Elle alla s'assoir du côté de la fenêtre pour encore observer à travers la vitre l'inspecteur qui n'avait pas bougé. Ce dernier lui fit un signe de main en guise de salut auquel elle répondit. Le train s'ébranla doucement puis prit de la vitesse et quitta la gare de Chicago, laissant l'inspecteur Daniels seul sur le quai.

Chelsea continua à regarder par la fenêtre jusqu'à ce que la ville sorte de son champ de vision. Elle se cala plus confortablement contre le dossier de son siège et se perdit dans ses pensées, ne songeant à rien de bien particulier.

La porte du compartiment s'ouvrit soudain et elle sursauta. Une femme, accompagnée d'un petit garçon qui ne devait pas avoir plus six ans, lui demanda poliment si elle pouvait s'assoir, tous les autres compartiments étant occupés. Chelsea leur sourit et leur désigna la banquette libre. Le petit garçon s'assit en face d'elle et la regarda avec attention.

- On ne regarde pas les inconnues dans les yeux, c'est très impoli ! Le rabroua sévèrement sa mère.

- Il ne me gêne pas. Intervint Chelsea avec un sourire.

Elle sortit de son sac à main un petit cornet rempli de caramels qu'elle avait reçu à l'hôpital et le lui tendit :

- Tu en veux ? Proposa-t-elle.

Le garçon regarda d'abord les caramels avec gourmandise, puis sa mère avec un air interrogateur. Elle lui sourit.

- Prends-en un, si elle te le propose. Mais un seul ! On ne va pas tarder à dîner et après tu auras mal au ventre.

Son fils glissa une main dans le cornet, en sortit sagement un caramel et le glissa dans sa bouche en murmurant :

- Merci, mademoiselle.

- Je t'en prie. Comment tu t'appelles ?

- Daniel, mademoiselle.

Chelsea tiqua. Mais elle se reprit bien vite et murmura gentiment :

- C'est un très beau prénom. Complimenta-t-elle. Il me fait penser à celui d'un ami.

- Merci, mademoiselle.

Le petit garçon et sa mère descendirent du train à l'arrêt suivant, la laissant à nouveau seule. Puis, le train reprit sa route et Chelsea retourna à ses pensées, le front collé à la vitre, le regard perdu vers la ville de Chicago qui avait disparu du paysage depuis longtemps.

Ses lèvres frémirent et elle se sourit à elle-même.

A elle aussi, cela lui ferait plaisir de le revoir.


Deux SoeursOù les histoires vivent. Découvrez maintenant