Juliette

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Le sommeil fut rude cette nuit là, comme toutes les autres nuits en fait...
J'étais rentrée de cette première journée au Lycée Napoléon exténuée, physiquement et psychologiquement. Tous ces stimulis, toutes ces interactions incessantes avec tant d'inconnus m'avaient lessivée. Mon corps avait subis toute la journée le courroux de mon stress intérieur, que je tentais de dissimuler au mieux, mais sans grande fin. C'est pourquoi, cette nuit, les cauchemars s'étaient avérés plus difficiles à supporter, plus acérés, plus violents, mais surtout, plus réels.
J'étais retournée là-bas, là où j'ai perdu Juliette, et toutes les autres, nous étions six. J'étais retournée dans ce couloir, couloir où j'ai cru abandonner Juliette et les autres, fuyant seule avec Fleur. Fleur, notre petite Fleur, la plus jeune d'entre nous, elle était devant moi, elle pleurait autant que moi, l'espoir de sortir de cet enfer, le désespoir d'abandonner les autres. Je lui avais pris la main. Je lui avais parlé, elle était là, devant moi, elle était là.

"Fleur, qu'est-ce qu'on fait là ? demandais-je, On était partie!
- Qu'est-ce que tu raconte? elle se tourna vers moi, Nous ne sommes jamais sorties d'ici."

Et tout d'un coup nous étions de retour dans cette pièce, elle était là, sur le sol, j'hurlais, elles pleuraient, tout de déchirait en moi. Juliette me serrait pour ne pas que j'y aille, puis elle me lâcha, son regard devint insupportable, plein de haine. Les autres la suivirent, Manon, Elena, Léopoldine, Juliette, et même Fleur maintenant, toutes me devisageaient avec haine.

"Traitresse !
- Non!
- Traîtresse!"

J'hurlais, me debattais, mais les muscles ne me répondaient pas, c'était comme si je m'enffonçais dans de la glue, comme si je le noyais, mes mouvements, quand j'étais capable de bouger, étaient douloureux et ralentis, quelque chose m'empêchait de bouger, de fuir, mais quoi? La drogue! Oui, ils m'avaient drogué, ce devait être cela. Alors j'allais mourir ici? De nouveaux cris emplirent ma tête, des hurlements, stridents, à en détruire les tympans. Ce n'étaient pas des hurlements, c'était le chant des balles qui sifflaient dans tous les sens, plusieurs m'atteignirent, mais je n'en sentais pas de douleur, pourtant je savais que j'aurais du avoir mal. Je continuais de courir, avant de tomber, encore et encore, une chute sans fin, jusqu'à ce que j'atterisse sur le sol de ma chambre et me cogne sur le bord de mon lit.
Je restais là, penaude, sur le sol. Les images tournaient en boucle dans ma tête, sans que je puisse en arrêter le flux incessant, sans même que je ne prenne la peine d'essayer de l'arrêter. Avec le temps j'avais compris que j'étais impuissante face à ces cauchemars, ces souvenirs, qui me harcelaient depuis deux mois bientôt. J'avais compris que ça ne s'arrêterait pas, et surtout que JE ne l'arrêterai pas. Je décidai enfin de me lever mais rechignai a retourner au lit. J'avais besoin d'air. Je regardai l'heure, 23:51, génial... Mes parents dormaient déjà, alors je troquai mon pyjama pour mes vêtements de la journée, pris mon téléphone et mes clés et sortit de la maison dans un bruit.

Je marchais depuis deux heures, dans la fraîcheur nocturne de fin d'été, lorsque j'arrivai devant un petit square que je cru reconnaître. Mais non, il ressemblait pourtant au square de mon enfance, celui ou quelques mois plus tôt j'avais encore rejoint Juliette pour parler et organiser notre été en se balançant sur les jeux d'enfants. Ce square avait représenté tellement pour nous, nous l'avions toujours connu, toujours cru unique et notre. Mais en voilà un autre, semblable presque en tout point, qui doit aussi représenter un point de repère pour les enfants de ce quartier qui viennent y jouer. Je m'assis sur l'une des balançoires, et donnai une petite impulsion qui fit grincer les chaînes. Ne pas se balancer était plus prudent, je ne voulais pas réveiller les résidents endormis. Ou étais-je seulement? Je ne connaissais pas encore la ville, et je n'avais pas prêté attention pendant que je marchais au chemin que j'empruntais, surtout, j'avais marché pendant deux heures! Il était presque deux heure du matin.
Je ne pouvais pas appeler mes parents, ils auraient paniqué s'ils savaient, de toute façon ils dormaient. C'est donc moi qui commençai à paniquer... Chaque bruit me faisaient sursauter, je me retrouvai vite sur les nerfs, les mains crispées sur mon téléphone. J'hurlai presque lorsque ce dernier vibra pour me notifier la réception d'un nouveau message.

(Alerte spoilers)

Cheveux-violets (Aka la Queen) :
Wtf!! Tu te rend compte que Daenerys résiste au feu?! Genre la meuf passe la nuit dans un brasier et au matin sa peau est toujours aussi blanche, même pas elle bronze !

Son message me rassura, et le fait qu'elle soit éveillée aussi.

Moi :
T'en es que là ? Je suis à la dernière saison moi
T'aurais pas une voiture?


Cheveux-violets (Aka la Queen):
Chut! J'ai commencé la semaine passée
Non pourquoi?

Moi :
Disons que je suis perdue quelque part en ville 😶


Cheveux-violets (Aka la Queen):
Qu'est-ce que tu fou dehors à 2h du mat'?

Moi :
J'avais besoin d'air mais j'ai pas fais attention, j'ai marché pendant deux heures...


Cheveux-violets (Aka la Queen):
Hahaha dis-moi où t'es, je t'envoie le taxi 😉

Moi :
Square Apollinaire le Grand (ils l'ont vraiment appelé Apollinaire le grand?), c'est la seule info que j'ai; un taxi?!

Cheveux-violets (Aka la Queen):
Tkt et oui, à la base ça devait être Alexandre le Grand et Apollinaire c'était la rue, sauf qu'un adjoint a tout mélangé et c'est resté Mdrr
Ton taxi arrive ma jolie 😉😊

Moi :
Merci t'es un ange 😘

Elle me notifia ensuite qu'elle retournait à sa série, et que je devais lui dire lorsque je serais chez moi. En attendant, je repensais à Juliette, à toutes les fois où nous nous étions retrouvées au square pour parler, jouer, rire, et pleurer. Je me souvenais de notre première rencontre, de sa première rupture qui m'avait brisé le coeur autant qu'à elle, la voir dans cet état m'avais détruit. Elle pleurait, convulsait presque. C'était son premier amour. Je me souvenais également de ma première déception amoureuse, MON premier amour m'avait mis un râteau phénoménal, je n'avais pas été son premier amour visiblement, ni même aucun amour du tout. Tous ces souvenirs enchevêtrés me firent sourire. Une voiture noire s'arrêta devant le square, une décapotable, avec un style vintage américain. Celui qui la conduisait m'avisa, avant de soupirer, dans le noir, j'avais du mal à le reconnaître, et mon cœur s'emballa, il n'avait pas l'air de vouloir partir.

"Bah alors, tu monte?"

Sa voix me sortit de ma torpeur, j'essuyai rapidement une larme qui avait coulé en pensant à Juliette et m'installai sur le siège passager. Mon cœur battait toujours la chamade, pouvais-je lui faire confiance ? Je ne le connaissais pas. Il était trop tard pour se poser des questions. Lorsqu'il me la demanda, je bredouillai mon adresse, et le ronflement du moteur emplit la nuit.

Si seulement tu étais là...Où les histoires vivent. Découvrez maintenant