Chapitre 18.

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18.

«Ce n'est pas la distance qui sépare les gens. C'est le silence.»

Eli

La rue est totalement vide. Aucun mouvement n'apparaît devant moi. Les bruits de mes pas résonnent bien plus qu'ils ne devraient, créant ainsi une atmosphère inquiétante. Les lampadaires, qui devraient permettre de me rassurer, incruste pourtant sur le caractère froid et tremblant de cette simple ruelle. Mon ombre ne cesse de s'agrandir et de diminuer au fur et à mesure de mon assertion dans la ligne droite qui me semble infinissable.

Certaines personnes disent que dire que l'on a peur de son ombre signifie que l'on est faible ou trouillard. Mais moi je pense que dans certaines situation, avouer nos peurs est une marque de force.

Combattre les autres est une chose, mais combattre ses démons en est une autre. Ce second combat est le plus compliqué, le plus difficile et le plus éprouvant. Et je ne suis pas sure d'être assez forte pour y parvenir.

J'ai peur de me retrouver seule. Mais j'ai également peur de mon passé. Sans lui, je ne sais pas qui je suis, je suis perdue, je ne suis pas entière. Mais malgré le fait que je veux le connaître plus que tout, j'ai également peur de le découvrir. Peur de comprendre pourquoi je me suis retrouvée inconsciente dans la ruelle où Nathan m'a trouvée. Peur de ne pas me reconnaître moi-même. Peur de redécouvrir mon histoire avec le mystérieux garçon au tatouage qui fait battre mon coeur. Peur de mon ancienne vie, tout simplement.

Absorbée par mes pensées, je ne remarque pas tout de suite que je suis devant chez Théo depuis quelques minutes déjà. Je toque doucement à la porte, avant de m'adosser au mur adjacent. Les yeux fixés sur mes pieds, je me ronge les ongles en repensant à ce qui s'est passé entre Nathan et moi. Le sentiment de culpabilité d'avoir trahit Flavia me ronge comme du poison.

Au bout de quelques minutes et voyant que personne n'a réagit, je décide d'appuyer sur la sonnette pour tenter de me faire entendre par mon ami. A peine quelques courtes secondes après que avoir fait résonner le dong, la porte s'ouvre sur une jeune fille rousse. Ses traits sont similaires à ceux de Théo malgré leur couleur de cheveux totalement différente.

- Salut ! Il est tard mais je suppose que tu n'as pas sonné chez nous par hasard. T'as besoin d'aide ?

Elle s'adresse à moi comme si nous nous connaissions et que nous étions amies depuis longtemps. Son naturel me plaît et je lui rends son sourire.

- Je viens voir Théo. J'aurais besoin de lui, je lui réponds.

- Ok je l'appelle pour toi la miss !

Elle se retourne vivement, faisant virevolter ses cheveux mi-longs autour d'elle.

- Petit frère ! elle crie. Une jolie jeune fille pour toi ! elle ajoute en me faisant un clin d'œil.

- Ok j'arrive Laurène !

J'entends des pas décaler des escaliers, puis Théo apparaît au bout de couloir. Son visage s'illumine quand il m'aperçoit. Je me jette dans ses bras rassurants pour tenter de trouver du réconfort. Sans me poser trop de questions, il m'emmène dans sa chambre et attend simplement que je prenne la parole tout en me caressant les cheveux. Au bout d'un moment, j'ose enfin ouvrir à bouche et tout avouer à Théo.

- J'ai trahi Flavia. C'est mon amie et je l'ai trahie.

Devant le regard interrogateur de Théo, je trouve le courage de continuer. Il faut qu'il me comprenne et qu'il m'aide. J'ai besoin de lui.

- Je... Nathan et moi, nous nous sommes embrassés...

Apres ces paroles, des larmes coulent de mes yeux sans que je puisse les arrêter, comme si avouer à vérité accentue encore plus la douleur que je ressens en ce moment.

Il me serre plus fort encore dans ses bras, comme pour montrer son soutien. Après quelques secondes de réflection, il me répond enfin.

- Tu ne peux rien faire Eli. Attend de voir comme les choses vont évoluer. Ce n'est pas ta faute. Je sais très bien que tu ne veux du mal de personne. Tu es quelqu'un de bien. Arrête de t'en vouloir autant, tu te fais beaucoup trop de mal.

Nathan

Les yeux fixés sur le plafond, je laissais les minutes défiler depuis maintenant plusieurs heures. Le tic-tac régulier du réveil posé sur ma vieille table de nuit en bois rythme chaque seconde, faisant de ces heures une lente attente comme une agonie presque sans fin.

Je pense à deux filles. Deux simples filles, mais pourtant si importantes pour moi aujourd'hui.

Flavia.

Eli.

Deux personnes tellement différentes. Tellement attachantes. Tellement importantes.

Je ne veux en blesser aucune. Et pourtant, sans le vouloir, j'allais les blesser toutes les deux. Je vais devoir avouer la vérité à Flavia. Je ne veux rien lui cacher. Notre couple ne tient plus qu'à un fil, mais je ne peux m'en vouloir qu'à moi-même. Et je m'en veux. Les remords me submergent, sans que je puisse lutter.

Je tends la main pour attraper mon téléphone, posé rapidement sur la table de nuit à côté de mon lit seulement une demi-heure auparavant. Le côté de mon lit où Eli était est encore chaud, me rappelant sa fuite précipitée.

Mon coeur bat douloureusement dans ma poitrine. J'ai l'impression de pouvoir entendre le moindre battement. Après quelques minutes d'hésitation, j'appuie enfin sur le bouton appel de mon téléphone. Quelques sonneries retentissent avant qu'elle décroche.

- Allo ?

- Flavia... C'est moi.

Ma voix vacille et je perds mes mots.

- Salut Nathan ! Je suis heureuse de t'entendre. Même si l'on s'est quitté il y a à peine quelques heures, tu me manques tu sais ?

Ses paroles heureuses me fendent le coeur, car je sais que ma révélation va la faire souffrir. J'espère tellement qu'elle va me pardonner. Je ne peux pas la perdre.

- Flavia il faut que je te parle. Il faut que je t'avoue quelque chose d'important.

Elle ne me répond pas directement, comme si elle commence à comprendre que quelque chose cloche, que je ne suis pas dans mon état normal.

- Euh... Je t'écoute. Tu me fais peur Nathan !

- Je... Flavia ne m'en veux pas s'il te plait. Je m'en veux tellement si tu savais. Mais il y a quelques minutes, Eli et moi, nous nous sommes embrassés. C'était une erreur, je ne voulais absolument pas que ça se produise. Je... S'il te plait Flavia pardonne moi.

Je chuchote mes derniers mots et ma voix déraille totalement. Mais elle ne me répond pas. Seul le bruit de son souffle contre son téléphone me permet de savoir qu'elle m'a entendue.

Je ferme mes yeux en écoutant le bruit accéléré de l'air qui sort de ses poumons, à quelques kilomètres de chez moi, mais qui me semble si proche actuellement.

Démuni face à son silence, je cherche quoi dire. Mais rien ne me vient. Et elle fini par raccrocher, sans avoir prononcé le moindre mot, ni m'avoir fait part de la moindre réaction.

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Accroche Toi [terminé]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant