Le fardeau_ Améthys II (TERMINE)

58 b

― Le grand-père de Flame, Calion Aegnor était un grand scientifique. Il y a de cela une cinquantaine d'années, les terriens ont eu des difficultés pour coloniser une planète, elle était habitée par une forme extraterrestre animale qu'on appelait les Ghémas. Et nous étions incapables de les combattre tous. Il fallait inventer une nouvelle arme. Calion a voulu modifier nos gènes en les mêlant aux Ghémas. Il l'a fait en collaborant avec les boudjelaihs. Ils ont réussi à élaborer le gène Sty-G qu'ils ont introduit dans les embryons de femmes au sang pur volontaires pour l'expérience. Sa femme était l'une d'entre elles et, Agni, le commandor, ainsi que neuf autres types dangereux sont nés. Nous les appelions les Stygéros à l'époque. Ils faisaient partis d'une classe spéciale, comme tu t'en doutes, seuls les sangs purs pouvaient s'approcher d'eux, car ils sont eux-mêmes des sangs purs aux gènes modifiés.

― Et les guérisseurs, j'ai rencontré une fille qui...comme moi...

― Fara, sa mère lui a fait un mind control pour qu'elle ne se rappelle pas de ses pouvoirs. Tout comme on t'a fait un mind control pour oublier ta vie avant tes six ans. Elle est bien comme toi, c'est juste qu'elle n'en a pas conscience.

― Mais, il y a autre chose que je veux savoir, si je peux m'approcher de n'importe quel type dangereux, pourquoi j'ai failli devenir un glaçon ou brûler quand j'ai touché d'autres types dangereux ?

― C'est parce qu'il t'a imprégnée.

― Imprégner ? Qui ? Flame ?

― Les hommes cirthians peuvent... marquer leur compagne. En d'autres termes, Flame t'a choisie et t'a liée à lui.

― Comment ?

― Je ne sais pas, c'est quelque chose que font seulement les hommes.

Elle me révèle alors une légende selon laquelle il existe pour chacun d'entre nous un être que nous ne pouvons ni lire les pensées, donc ni le contrôler. C'est le signe qu'il est fait pour nous et c'est à ce moment que nous pouvons l'imprégner.

― Avec le temps, les hommes imprégnaient leur femme après qu'ils se soient mariés. Lorsqu'une personne est imprégnée, elle reçoit une partie de sa force, de son énergie et de son odeur. Je doute que l'imprégnation existe encore sur Cirth. Seuls les sangs purs et les Stygéros en sont capables de nos jours.

― Mais je ne vois toujours pas le rapport... pourquoi je ne peux plus toucher les autres ?

― Ça c'est une particularité des Stygéros, une fois qu'ils ont choisi quelqu'un, plus aucun autre type dangereux ne peut les toucher. Son pouvoir agit sur toi. Tu peux toucher les masterminds mais pas les autres types dangereux. C'est comme un message qui disait, « désolé mais elle appartient déjà à un Stygéros ! ». Il l'a fait sans s'en rendre compte parce que tu étais la première personne à le toucher et qu'il avait certainement peur qu'un autre type dangereux te découvre.

Tout s'éclaircit, je comprends mieux pourquoi je m'étais mise à brûler d'une flamme rouge dès qu'Oilossë et Ashes m'avaient touchée.

― Est-ce que ça implique autre chose que je sois imprégnée ?

― Il existe maintenant un lien très fort entre vous. Mon intention était de tout faire pour te garder ici, mais maintenant qu'il t'a imprégnée, ce n'est plus possible. Tous les deux, vous ne supporteriez pas d'être séparés à des milliers de kilomètres. S'il meurt un jour, tu le ressentiras et tu auras envie de le rejoindre, tu perdras espoir, ta vie n'auras plus aucun sens.

Je l'écoute, et j'ai le sentiment qu'elle me raconte sa propre expérience douloureuse.

― Vous avez connu cela ? demandé-je même si je connaissais la réponse.

Elle reste un moment silencieuse avant de s'approcher de la fenêtre et regarder le coucher du soleil.

― Ça fait 16 ans maintenant que j'ai perdu mon mari. Nous nous connaissions depuis l'enfance. Il m'a imprégnée lorsqu'il avait 17 ans, il ne voulait pas que les Stygéros s'approchent de moi... Avant j'avais une vie, une famille, et lorsqu'il est mort, tout s'est brisé. Plus rien n'avait d'importance jusqu'à ce que... (Elle se tourne vers moi et me prend la main.) Maintenant j'ai une mission, te protéger...

Je regarde ses mains, nous avons la même couleur de peau, mais je me demande à quoi elle ressemble sans son masque. Si elle veut me protéger est-ce qu'il y a quelque chose qui nous lie ?

― Votre masque... pourquoi vous en portez ?

― Parce que je suis une combattante. C'est pour mieux me protéger des germes. Il y a encore un an, ils nous attaquaient en nous lançant des germes. Ça a changé cette année, une simple morsure et c'est fini.

― Mais ici, il n'y a pas d'infectés.

Elle baisse la tête.

― C'est devenu une partie de moi. Je me sens mal à l'aise lorsque je l'enlève. Je le retirerai uniquement quand ils n'existeront plus.

Je suis déçue, je ne pense pas que je verrai son visage.

― J'ai... j'ai connu tes parents, nous étions de grands amis, me dit-elle d'une voix basse, les mains toutes tremblantes. Tu es le portrait de ta mère et tu as les yeux de ton père. Tu veux que je te les fasse voir ?

Mon cœur se met à battre, je la regarde et j'acquiesce, jamais je n'aurais imaginé voir à quoi ressemblaient mes parents que j'en suis émue. Je fixe ses yeux verts et, d'un coup, je me retrouve les pieds nus sur du sable blanc fin. Mes mains ont rétréci. Le vent souffle et je porte une petite robe blanche. Les vagues montent et mouillent mes pieds, on dirait que c'est réel. Je lève les yeux et devant moi, il y a une île flottante.

― Améthys ! crie la voix d'un homme avec un ton affectueux.

Je me retourne. Il a les cheveux blond-blanc, coupés à mi longueur, ramenés sur un côté en vagues souples et disciplinées, des yeux violets, je l'ai déjà vu dans un magazine. C'est le fils de l'Archiduc Lorgan, le Sénateur. À ses côtés, une femme porte une longue robe blanche décolletée, elle a le teint aussi blanc et rosé que le mien, ses yeux sont vert turquoise, et ses cheveux aussi longs que les miens sont noirs avec quelques reflets verts. Elle me sourit. Le Sénateur Lorgan me tend les bras. Je m'approche d'eux timidement et il m'attrape. Je suis redevenue une petite fille de cinq ans, et je suis dans les bras de mon père ! Il me sourit, passe ses mains dans mes cheveux et m'embrasse sur le front avant de me tendre à ma mère. Elle est aussi magnifique que dans mes rêves. Quand j'étais au primaire et que les parents venaient voir leur enfant les jours de visite. Je m'imaginais toujours une maman ! Je la voyais avec des yeux en amande de toutes les couleurs, les cheveux violets et le teint blanc rosé. Je me suis trompée sur tout sauf pour la forme de ses yeux et son teint. Je lui touche le visage et elle me sourit. Elle m'enlace ensuite. Mes larmes se mettent à couler. Je pleure d'une joie mélancolique. Brusquement, je suis dans la réalité serrant Emeraude contre moi. Elle me caresse les cheveux comme l'a fait ma mère dans la vision.

Nous restons un moment comme cela, puis je m'écarte d'elle.

― Mon père... c'était...

― Shuut, fait-elle en pressant son index sur mes lèvres. Tu ne dois pas le dire. Et encore moins une fois sur Cirth. Ils croient tous que cette famille est morte, seule les Anciens, et quelques-uns d'entre nous savons qui tu es. Tu es la petite fille de L'Archiduc, tu es de sang royal, ce qui fait que tu as le droit de restaurer notre Constitution. Tu deviendras notre Archiduchesse. 

UPDATE: tous les mercredis