Chapitre IV : Au cœur de la cybersphère

6 0 0
                                    

Stress. Choc émotionnel. Sous les yeux hallucinés du terrien, à travers ses lunettes R.A., le monde change d'humeur et de couleur. Il s'assombrit. L'espace se déforme. Le spectre lumineux des lampes plasmiques dévie vers le bleu. Les hologrammes disparaissent. Les textures des murs se couvrent de suites de un et de zéro. Ces successions de chiffres deviennent de plus en plus petits jusqu'à se transformer en de minces filaments cyans. Puis, sortant de nulle part, des cubes bleutés de différentes tailles apparaissent soudainement. La cybersphère se mêle à la réalité. Cet espace le plus profond du Réseau se dessine sous le regard de l'inspecteur. Seuls les technocybrides peuvent normalement y accéder, manipulant directement les paquets et les trames d'information via l'interface neuronale de leur cybercerveau.


Mais naviguer dans le monde des intelligences artificielles n'est pas sans risque. Cela requiert un entraînement particulier et les technocybrides peuvent y perdre la raison s'ils n'y prennent pas garde. Tout comme certains autistes férus de mathématiques voient les opérations et les chiffres comme autant de formes et de couleurs mentales, l'interface neurale des technocybrides construit une représentation psychique des données informatiques dans l'esprit de leur propriétaire. Ces plongeurs de la cybersphère ont alors la possibilité d'évoluer dans ce monde virtuel tout comme les humains lambda le font dans la réalité. Cela dit, Charles n'a jamais entendu parlé que des individus ne possédant pas de cybercerveau puissent avoir un aperçu de la cybersphère et ce, juste à travers de simples lunettes de Réalité Augmentée.


Petit à petit, des milliers de liens se créent et disparaissent entre les formes cubiques bleutées. Le terrien suppose qu'il est en train d'observer les systèmes et les serveurs cybernétiques du nœud local du Réseau. Il jette un coup d'œil à sa coéquipière. Agenouillée, cette dernière tient toujours sa tête entre ses deux mains. Elle semble souffrir terriblement. Alors que Du Hautoy s'apprête à lui porter secours, un hologramme aux allures fantomatiques apparaît dans son champs de vision, à vingt mètres juste devant lui. L'inspecteur plisse les yeux. Il distingue deux bras, deux jambes mais pas de visage. La forme humaine est de couleur blanche et semble immatérielle. Elle est immobile. Instinctivement, le terrien se tient prêt à dégainer son pistolet lourd, bien qu'il sache pertinemment que ses tirs n'auront aucun effet. Quelques secondes s'écoulent avant que l'hologramme translucide n'effectue un premier geste.


Dans les mains de la forme fantomatique, un longue épée légèrement courbée se matérialise. La lame de l'arme semble étinceler de mille feux.


Un katana ?, se questionne le terrien.


Tout d'un coup, en un battement de cil, l'hologramme humaine de deux mètres cinquante se téléporte à moins d'un mètre du terrien, brandissant son arme de mêlée. D'un geste instinctif, Charles se protège le visage alors que la longue lame s'abat sur lui. Mais à sa grande surprise, le katana le traverse de part en part sans difficulté, et sans qu'il ne souffre d'aucune manière. Les attaques immatérielles n'ont pas de prise sur son corps ancré dans la réalité. Ce n'est qu'en entendant le cri terrible lancé par sa coéquipière que Du Hautoy comprit qu'il n'était pas la cible de l'attaque. Derrière lui, fauchée de plein fouet, Titania perd connaissance.


L'agresseur se téléporte à nouveau à vingt mètres devant les deux policiers. Son attitude suggère qu'il va lancer une seconde attaque. Soudain, une demi sphère dorée parcourue de zébrures jaunes extrêmement lumineuse se matérialise, entourant les deux policiers du secteur vingt quatre.

Péripéties MartiennesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant