Chapitre deux

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Les rayons du soleil viennent caresser mon visage. Je me réveille, gênée par cette lumière. Il fait clair dehors, mais il doit être encore tôt car je ne vois presque personne dehors. Je me lève et descends. Maman et Papa sont déjà en train de déjeuner.

"Oh bonjour ma chérie" Maman m'adresse son éternel sourire.

"Bonjour Maman, Bonjour Papa" Je les embrasse tous les deux sur la joue puis je m'installe à table et prends mon petit déjeuner.

Papa me demande si je peux aller chercher du pain pour ce soir. J'accepte, de toute façon c'est pas comme si j'avais grand chose à faire, puis comme ça je rendrai service.

Une fois mon petit déjeuner fini je monte dans ma chambre pour me préparer puis je sors de la maison.
Le trajet se passe bien, en général le matin les enfants ne sont pas encore de sortie. En général.

À peine arrivée devant chez le boulanger, je vois les enfants d'hier qui me regardent. C'est pas bon signe... mais je décide de les ignorer et j'entre dans la boulangerie.

La boulangère me voit entrer et m'adresse un sourire avec un "Bonjour".
Je lui réponds poliment.
Elle me demande ce que je veux, je lui réponds et elle me donne ce que je lui ai demandé, c'est à dire une baguette. Je lui donne l'argent que je lui dois et lui dis "Merci" et "au revoir" avant de sortir. Mes parents m'ont toujours dit d'être polie et respectueuse.

Je trouve qu'elle est gentille la boulangère, nous n'avons jamais vraiment parlé, sauf quand je viens lui acheter du pain, mais c'est la seule personne qui ne me fait pas de réflexion sur mon physique ou qui ne montre pas de dégoût lorsqu'elle me voit. Enfin, d'après ce que j'en sais et ce que j'en vois. Peut-être que le soir avec son mari elle dit des choses sur moi. Parfois dans son regard je vois la peine et la pitié. Peut-être qu'elle arrive à se mettre à ma place et qu'elle comprend ma douleur et ma solitude dues au sort qui me rend laide aux yeux de tous. En tout cas ce qui est sûr c'est qu'elle ne me dit rien qui pourrait me blesser et elle me sert comme si j'étais une cliente normale. Elle me sourit aussi, ce que peu de personne fait. Je crois même qu'elle est la seule avec mes parents à le faire.
Je sais très bien que je ne suis pas normale pour elle. Mais elle, au moins, elle est gentille.

Son mari par contre je ne l'aime pas du tout, lui il ne se gêne pas pour montrer son dégoût. Il me traite un peu comme si j'étais un chien. Parfois il ne me sert pas quand je lui demande quelque chose, il m'ignore. Heureusement que sa femme est là pour me défendre un minimum et remettre les choses en ordre.
Parfois ça me dégoûte de manger le pain que fait cet homme. Il est tellement méprisant et méchant...

Je prends le chemin pour rentrer chez moi. Malheureusement les enfants que j'ai vu avant d'entrer dans la boulangerie m'attendent sur la route.

J'essaie de les contourner et de ne pas me faire remarquer mais l'un d'eux me voit puis il m'interpelle et m'insulte. J'essaie de ne pas y faire attention et continue ma route. Mais le plus âgé qui a mon âge m'arrête et me pousse par terre. Je laisse un petit bruit de douleur s'échapper de ma bouche.

"Bah alors ? Le monstre fuit ? Tu sais, ce n'est pas poli d'ignorer les gens quand ils te parlent. Mais bon on ne doit pas te parler souvent. Avec ton visage difforme je suis sûr que tu fais même peur au plus horrible des monstres ! Tu aurais dû mourir à ta naissance, ça aurait épargner ta laideur à tes parents et au reste du monde."

Ma gorge se noue... et ces paroles résonnent dans ma tête... Peut-être qu'il a raison...

"Pourquoi tu ne réponds pas ? Ah mais oui... tu es un monstre j'avais oublié... tu ne parles pas notre langage !"

Ses amis rient, tout le monde rit, le garçon essaie de mimer un autre langage pour me ridiculiser.. ils se moquent tous de moi, encore une fois...
Ils me lancent des petits cailloux. Je n'arrive pas à bouger, je me sens tellement mal... Je suis comme paralysée par la peur et le mal-être que je ressens... Je me sens terriblement triste... Seule face à eux je ne peux rien faire.
Les insultes fusent:

"Tu devrais mourir !"
"Tu es laide ! Plus laide que toi ça n'existe pas !"
"Retournes avec tes amis les monstres ! Ah mais non c'est vrai, tu n'as pas d'amis ! Personne ne veut de toi, même pas eux !"

Ils rient tous... alors qu'il n'y a absolument rien de drôle à dire du mal à quelqu'un...

Je vois un enfant aux cheveux noirs et un peu désordonnés s'approcher. Lui aussi va sûrement vouloir participer à mon lynchage... Il a un bandage sur ses yeux et il se promène avec un chien en laisse... il est aveugle ? Il a sûrement dû entendre les enfants crier et rire...

Il arrive à notre niveau, les autres se taisent. Ils ont... peur ? Peut-être parce qu'il est plus âgé ? Il doit avoir environ quinze ou seize ans. Eux n'ont qu'entre dix et quatorze ans.

Il prend la parole et s'adresse aux enfants:

"Pourquoi les rats sont-ils si détestés ?"

Ils ont tous ri : "C'est parce qu'ils sont sales ! "

"Alors, répondez-moi, pour moi qui suis aveugle. En fermant les yeux sur cette discrimination déraisonnable, qui de vous ou des rats sont les plus sales ? "

Alors là... ils ne savent plus quoi dire. Ils s'en vont le plus vite possible en voyant le chien leur grogner dessus et devenir menaçant.
Il crie alors à l'adresse des enfants qui sont en train de partir:

« Ne dites plus jamais ça ! »

C'est la première fois que quelqu'un prend ma défense... Le chien se calme et s'approche de moi. Il tire un peu sur la laisse et le garçon s'accroupit près de lui et le caresse. Il se tourne vers moi, je vois qu'il ne comprend pas où je suis exactement.

"Tu vas bien ? Ils ne t'ont rien fait ? Excuse moi si je ne te regarde pas vraiment, je ne peux pas voir où tu te trouves"

J'ai du mal à articuler je sens ma gorge se nouer. Les sons se bloquent et ont du mal à sortir...
"Ça, va... Merci, pour m'avoir aidée..."

"Tu t'appelles comment ? Moi c'est Kiseki et toi ?" Il sourit. Il a l'air tellement gentil et... rassurant. Le chien s'approche et vient me lécher la main, il n'a pas l'air d'avoir peur de moi.

" Je m'appelle Yuri..."

Je suis soulagée qu'on soit venu m'aider. Cette situation était insupportable et ça aurait pu dégénérer. C'est aussi la première fois qu'un enfant se montre gentil avec moi... Les larmes me montent aux yeux et des sanglots se font entendre... je ne peux plus me retenir...

Bien que je suis heureuse...

...je me demande bien pourquoi...

...mes larmes coulent de nouveau.

Tsumi No NamaeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant