Chambre 13

Pour son travail, Jenn doit se rendre à Londres, où elle séjournera dans un hôtel prépayé par sa compagnie. C'est la première fois qu'elle va en Angleterre, alors elle attends le voyage avec impatience.
Sur le point de prendre l'avion, elle ne tient plus en place.

Quand son patron lui avait annoncé la nouvelle, elle avait d'abord cru à un canular, mais c'était bien réel. Elle allait faire un stage d'un mois dans une entreprise partenaire de la sienne. Elle avait été sélectionnée parmi une quinzaine de candidats, plus ou moins motivés, mais c'était elle. La chance lui souriait ! Mais comme on le dit souvent, la roue finit toujours par tourner...

Jenn se leva lorsqu'elle entendit la voix l'appeler. Elle devait présenter son billet, passer par le chemin défini par des fils reliés entre eux par des poteaux noirs.

"Une bien piètre sécurité", elle pensait. Après la tonne de portiques anti métaux qu'elle avait dû passer,  -auxquels elle avait d'ailleurs abandonné son fer à cheval fétiche, à contrecœur- elle s'attendait peut être à trouver des murs en acier trempé et des vigiles de deux mètres de haut pour un mètre de large. Au lieu de ça, des hôtesses avec un grand sourire :

"Merci d'avoir choisi notre compagnie, nous vous souhaitons un agréable voyage !"

Jenn hocha la tête et se dirigea vers l'extérieur en suivant consciemment  les panneaux indicateurs. 

Elle faillit faire une attaque en sortant du grand bâtiment ; des ouvriers étaient en train de laver les carreaux au dessus de sa tête. Un détail, me direz vous ? Pour Jenn, c'était tout sauf ça. Ils étaient sur une échelle. Et il en était fallu de peu pour qu'elle ne passe en dessous par mégarde. De quoi gâcher tout son séjour, ou pire, faire crasher l'avion dans lequel elle allait monter.

Elle réussit à sortir en passant à côté de l'échelle, poussée par les grognements mécontents des usagers derrière elle. 

Elle arriva enfin devant l'avion ; il était gigantesque. Elle monta lentement les marches en prenant soin de sauter la treizième, et présenta son billet à l'hôtesse qui lui indiqua sa place, au deuxième rang de la classe économique. Elle s'assit du côté opposé au couloir, appuyant sa tête sur le hublot pour observer l'extérieur. Des agents étaient en train de charger les valises dans la soute.

Elle ferma les yeux un instant. Dans un peu plus d'une heure, elle serait à Londres.   Elle était arrivée saine et sauve dans l'avion, alors tout se passerait bien.

C'était sans compter sur sa voisine de rangée, une vielle dame qui portait une caisse. Une caisse contenant un chat. Un chat NOIR. 
La jeune femme était très tentée de quitter l'avion sur le champ, mais c'était hors de question. Il fallait qu'elle aille à Londres, ou bien elle pouvait dire adieu à son emploi.
Une autre solution était de changer de place, mais elle voyait ses possibilités se réduire au fur et à mesure que l'avion se remplissait. La pauvre allait devoir rester coincée entre cet objet de malheur et un hublot trop petit pour lui permettre de s'évader.