Chapitre 27.

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27.

«Qui se nourrit d'attente risque de mourir de faim.»

Nathan

Les vacances passent, et les cours reprennent. Doucement, lentement pour moi. J'ai l'impression d'avoir seulement un trou dans l'estomac, qu'Eli m'a enlevé une partie de moi en partant.

J'adorerais pouvoir combler ce trou par sa présence.

Ne pas savoir si elle reviendra un jour rend les choses encore plus horrible. Car cela crée en moi un espoir empoisonné. Certains disent que l'espoir fait vivre. Moi il me tue. Lentement. Mais mon esprit, incontrôlable, l'attend sagement.

Chaque fois que la porte d'entrée s'ouvre, je me précipite pour voir si elle est revenue. Mais ma déception est immense à chaque fois.

Alors je tente simplement de l'oublier. De me focaliser sur ma petite sœur, sur les amis, et sur ma vie. Pour la première fois depuis longtemps maintenant, je tente d'être hypocrite, de ne penser qu'à moi, d'oublier les autres et de me considérer comme le centre du monde. Cela ne me ressemble plus, mais pourtant tout est si simple comme ça. On a pas besoin de se soucier en permanence du bien notre entourage, mais seulement du sien.

Eli est partie, et moi je me referme à nouveau. Elle était mon ancre, et maintenant je dérive.

***

Alors qu'une nouvelle journée commence, je tente de me réveiller totalement. Le saut du lit à six heure et demi du matin, ce n'est pas vraiment mon truc. Mais pourtant, je suis obligée de supporter cette torture chaque matin, en attendant le week-end. La fatigue s'accumule entre le lundi et le vendredi, puis je récupère comme je peux pendant les deux cours jours de repos de fin de semaine, en enchaînant sieste et sorties.

Mes notes chutent dès la rentrée des deux semaines de vacances, mais ça n'a plus d'importance. J'essaye juste d'exister, vivre on verra plus tard.

Je gare ma moto dès mon arrivée dans le parking du lycée. Un groupe de seconde fument, à l'abris de la pluie, tandis que j'essaye de me frayer un chemin vers le grand portail vert. L'eau dégouline dans mes cheveux, mais je n'accélère pas le pas pour autant. De toutes manières, mon trajet pour venir ici m'a suffi pour être trempé delà tête au pied, si bien que j'ai l'impression que je pourrais m'essorer.

La pluie a formé de grandes flaques en tombant tout le week-end, So bien que le sol légèrement en pente est quelque peu glissant. Je fais attention à chacun de mes pas, mais mon regard est très vite détourné lorsque une blonde glisse non loin de moi. Je tends le bras pour la rattraper, et j'y parviens non sans penne.

Elle relève la tête vers moi, puis ouvre grand la bouche en me reconnaissant.

- Nathan... Euh merci beaucoup, elle s'exclame.

- De rien Flavia, j'hésite, sans savoir quelle attitude adopter.

- Non mais sans toi, je me retrouvais couverte de boue jusqu'à ce soir ! Je te dois une fière chandelle.

Sa joie de vivre me redonne le sourire, et je suis heureux de retrouver ma meilleure amie. Ses yeux sont de nouveau brillant et étincelant de joie et ses cheveux, d'habitude lisses, sont ondulés et plaqués contre son visage à cause de la pluie. Je sais très bien qu'elle déteste ses cheveux naturels, et qu'elle va passer sa journée à tenter de diminuer leur volume en leur tirant inutilement dessus.

La voir près de moi me fait un bien fou, et je prononce les premiers mots qu'ils me passent par la tête.

- Ça te dirait de te joindre de nouveau à nous ce midi ?

Ses yeux se fixent directement sur ses pieds et elle hésite quelques instants, avant de me donner une réponse positive.

Lorsque j'arrive en cour de philosophie, je me rends compte que je suis de meilleure humeur que depuis plusieurs jours. Même si il continu de pleuvoir, j'ai l'impression de pouvoir de nouveau distinguer le ciel devant moi, et non un mur plus solide que du diamant.

***

«Je pense donc Je suis.» voilà à quoi se résume les pensées de Descartes. Cet homme est un des plus grand, et pourtant, on le résumé en seulement cinq mots. Des mots choisi avec soin par le grand homme, comme s'il avait deviné que un siècle après, nous parlerions encore de lui.

J'aime la philosophie de Descartes. Etre quelqu'un, ne pas dépendre des autres. Pourtant, je n'applique absolument pas sa philosophie. Mais j'essaye. Je veux y arriver.

Souvent, nous ne sommes absolument pas la personne que nous souhaitons être.

J'aimerais être quelqu'un de grand. Pas grand en taille - ma hauteur me suffit largement, et je ne pense pas que quelques centimètres de plus ou de moins changeraient le cours de ma vie - mais je voudrais réaliser de grandes choses. J'adorerais que, comme Descartes, on ne m'oublie pas. J'aimerais réussir quelque chose d'important, pouvoir être fière de moi-même. J'aimerais ne pas dépendre autant des autres, d'Eli.

- Nathan, tu as écouté ce que je viens de dire ?

Je relève la tête, surprit.

- Euh... Pas vraiment. Je suis désolé, j'étais ailleurs.

- Remet toi au travail Nathan, les cours ne vont pas t'attendre, c'est toi qui doit les attraper au vol.

J'hoche la tête sans grand engouement, avant de me pencher sur la table. Du bout de mon stylo, je parcours les bords des inscriptions gravées au compas dans le bois. Certaines formes ne sont pas reconnaissables, d'autres forment des lettres et parfois des mots.

Je m'imagine un instant le nombre de personnes qui se sont assises sur cette chaîne, qui ont lu ces inscriptions, qui ont écouté un professeur ici même, parler pendant des heures. Et je me sens tout petit. Beaucoup trop petit à mon goût.

Je suis une personne parmi des milliards d'autres. Mon existence est en réalité totalement futile par rapport au monde et à l'univers. Tout comme Eli. En réalité, elle n'est rien. En tous cas, je dois m'en convaincre.

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À votre avi, quelle va être la suite ? 🙄😘

Accroche Toi [terminé]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant