Chapitre 1 : Un nouveau départ

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 J'avais passé des jours entiers dans mon lit. Je ne savais même pas combien de temps s'était écoulé depuis la dernière fois où j'avais englouti quelque chose. Je ne faisais rien, je restais là, allongée dans mon lit, à attendre. Attendre quoi ? Je ne le savais pas. Je n'en avais aucune idée. Peut-être que j'attendais d'être assez forte pour passer à autre chose ? Mais est-ce que j'allais y arriver ? Comment pouvais-je ? Je n'avais jamais été proche de ma mère, mais elle était la seule personne qui me restait, hormis Mary. J'entendais les voitures rouler à toute allure dans la rue, le bourdonnement sans fin d'une mouche qui volait, des voisins qui sortaient de chez eux. Et moi, je passais mes journées à être immobile dans ce lit. Mon visage sans doute pâle et inexpressif n'avait été vu par personne ces derniers jours. Je contemplais le désordre autour de moi. Impossible de ranger tout ça. Je n'en aurais jamais eu la force, ni l'envie. L'envie. Je n'avais plus envie de rien. Si j'avais été quelqu'un de mauvais, je me serais peut-être réjouie de ce qui était arrivée. Cependant, je n'étais pas comme ça. Même si elle n'avait jamais cessé de me faire des reproches, elle tenait à moi, et je tenais à elle.

Jour. Nuit. Jour.

Je ne me levais de mon lit que pour mes besoins vitaux. Je ne parlais à personne et je ne sortais pas de chez moi. De toute façon, personne n'était venu voir comment je me sentais. Je ne blâmais personne pour cela. Chacun de mes voisins avait sa routine. J'entendais souvent ma voisine d'à côté se disputer avec son mari à propos des courses, ou encore mon voisin du dessus avoir des rencards tous les soirs. Chacun sa vie, chacun ses problèmes. Une odeur nauséabonde avait commencé à s'émaner de mon appartement, alors je m'étais décidée à sortir les poubelles. Je me dégoûtais moi-même d'avoir tout laissé traîner. Chaque jour qui passait me faisait encore plus regretter d'être en vie. Allais-je continuer cette vie qui ne menait à rien ? Je me posais parfois tant de questions, et d'autre fois, mon esprit était vide. Est-ce que je devais abandonner ? Est-ce que je devais me donner la mort, comme elle l'avait fait ? Non. Non, je savais pertinemment que je n'en serais jamais capable. Est-ce que j'allais un jour surmonter tout ça ? Moi qui était à l'origine quelqu'un de plutôt optimiste... La vie avait fini par me changer. Cela faisait quelques temps que je ne ressentais plus aucune joie. Je n'avais pas discuté avec Mary. Je n'en ressentais pas l'envie. Je ne voulais parler avec personne. Du moins, pas pour le moment.

***

Dans ce quartier modeste, mon appartement parmi beaucoup d'autres se révélait occupé en pleine journée. Un silence interminable s'étant installé là depuis longtemps, finit par être brusquement perturbé par quelques bruits qui se firent entendre. Chacun d'entre eux me sortant un peu plus de mon sommeil, je commençais à me sentir agacée. Quelqu'un cognait violemment sur le bois de la porte d'entrée. À peine réveillée, je me retournais dans mon lit. Une femme se mit à crier : « Anna ! Anna Gellem ! Ouvre-moi !»

Je soupirais. Je reconnus immédiatement la voix de la propriétaire de mon appartement à San Francisco, qui a la cinquantaine. Les coups qu'elle donnait torturaient mes tympans. Je lui répondis, encore un peu endormie : « J'arrive ! »

Je me levais rapidement et me dirigeais vers la porte. Je lui ouvris. « Bonjour Lucinda, balbutiais-je.

— Anna, je sais très bien dans quelle situation tu es, ta mère est... partie. Je sais que ça ne va pas, mais tu as un loyer à payer, je te rappelle. Ce n'est pas en restant chez toi que tu vas pouvoir me donner ce que tu me dois. »

Lucinda, très sérieuse, me regardait avec ses grands yeux noirs, attendant que je réagisse. Elle ne se fichait pas de mes émotions, elle y donnait peut-être un peu d'importance... Cependant, elle voulait simplement me rappeler à l'ordre et elle avait bien raison. Cela faisait trois mois que ma mère était morte. J'avais arrêté de travailler et de sortir de mon appartement depuis quelques semaines. Je n'étais pas si proche que ça de ma mère. Pourtant, le fait de me souvenir de tout ce qu'elle me reprochait, me faisait me sentir mal. J'avais cette impression d'inachevé et je me sentais si coupable de n'avoir rien fait. Je pris une grande inspiration avant de lui répondre. « Ne vous inquiétez pas, je vais vous payer.

— J'espère bien. »

Oui, j'avais une semaine de retard, mais je n'étais pas endettée. J'allais lui donner son argent, et je me demandais intérieurement pourquoi est-ce qu'elle s'emportait comme ça... J'avais reçu un message de Mary, mon amie de toujours, qui était allée vivre à Los Angeles un an auparavant. « Salut. Ça va ? ». J'ai décidé de l'appeler pour lui parler un peu. Quelques instants plus tard, elle me disait : « Si tu te sens si coupable que ça, pourquoi est-ce que tu n'essaies pas de tout recommencer ?

— Quoi, qu'est-ce que tu veux dire par là ? lui demandais-je, intriguée.— Je ne sais pas, essaie de faire autre chose. Change tes habitudes.

— Mary, ce n'est pas mon truc. Je n'ai pas très envie de les changer... lui expliquais-je, en penchant la tête sur le côté, pour pouvoir consulter mes mails en même temps.

— Bon, sinon... Et ton travail ?

— Eh bien, il semblerait que je n'en ai plus... constatais-je, lisant le mail de licenciement de la part de mon boss.

— Quoi ? demanda-t-elle choquée.

— Écoute, je ne sais plus quoi faire. Je n'ai vraiment aucune inspiration, aucune idée en tête... S'il y a quelque chose que je peux te dire, c'est que je suis totalement perdue... lui avouais-je en passant ma main dans mes cheveux châtains.

— Tu sais quoi ? Viens.

— Comment ça ?

— À Los Angeles ! Tu pourrais vivre en colocation avec moi, ça ferait un montant moins cher à payer et puis ça te changera les idées. Je suis certaine que c'est le genre de nouveau départ qu'il te faut, m'affirma-t-elle, sûre d'elle.

— Et le travail ? Je viens de me faire licencier, comment est-ce que je pourrais trouver du travail ? Et à Los Angeles en plus...

— Tu peux très bien travailler avec moi à l'hôtel ! Un poste vient justement de se libérer. En plus c'est celui de barmaid et ça tu maîtrises, n'est-ce pas ? »

Je réfléchis un instant à ce qu'elle venait me dire. Elle n'avait pas complètement tort. C'était vrai, ce serait un nouveau départ pour moi. Je devais peut-être suivre les conseils de ma mère, essayer de faire quelque chose de ma vie. Je fus un instant complètement perdue dans mes pensées, je m'imaginais habiter à Los Angeles. D'un côté, ça ne me ressemblerait pas et d'un autre je pourrais commencer quelque chose de nouveau...

Et, parce que je sentais au fond de moi qu'il fallait que je fasse quelque chose, je lui répondis : « J'accepte ! J'arrive la semaine prochaine. » avais-je lancé, semblant sûre de moi. Je pouvais entendre l'excitation et la joie dans sa voix, lorsqu'elle me répondit : « Oh, c'est génial ! Je suis trop contente ! ...Hum, je dois te laisser, je te rappelle ! ». Elle raccrocha, et je sentais réellement que j'avais fait un pas en avant. J'étais vraiment décidée à aller à Los Angeles.

Un Amour Glorieux - Tome 1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant