Ce conte commence comme tous les contes : dans une contrée lointaine, il était une princesse connue et aimée de tous pour sa beauté sans pareille. Des hommes et des femmes venaient du monde entier pour l'admirer. Chaque jour, des dizaines de princes lui venaient rendre visite, lui proposant des montagnes d'or en échange de sa fidélité. Mais la princesse refusait chaque demande en mariage. Ses parents s'en désespéraient, car elle avait depuis longtemps dépassé l'âge de se marier. Chaque jour, sa nourrice l'implorait de choisir un mari, mais elle refusait.
« Il n'en est donc aucun à votre goût ? désespérait la servante. Celui-ci est un des plus riches de tout le continent ; et celui-là, tous pourront témoigner que l'on n'a jamais vu si belle figure. Ne les trouvez-vous point beaux ? Êtes-vous tant habituée à votre propre beauté que vous ne parvenez pas à apprécier celle des autres ?
- Détrompez-vous, nourrice. Je les trouve tous très beaux. Mais je ne les aime pas. »
Après plusieurs mois sans succès, les parents furent découragés. Puisque la princesse ne parviendrait pas à choisir, ils ne lui donneraient pas le choix. Ils firent venir leur fille et lui dirent avec fermeté :
« Ma fille, tu as dépassé l'âge de te marier, et tu as maintenant reçu tant de propositions qu'il devient indécent d'en refuser une de plus. Nous te laissons trois jours. Passé ce délai, si tu n'as pas choisi ton mari, nous le choisirons pour toi. »
La princesse fut troublée par l'assurance des propos de ces parents qui, l'aimant plus que tout, n'avaient pas l'habitude d'élever la voix et cédaient à toutes ses requêtes. Elle se retira dans sa chambre et pleura toute la nuit, dévastée par le choix impossible qu'elle était tenue de faire.
Au matin, elle était décidée à céder à la volonté de ses parents. Mais elle ne put se résoudre à accepter une seule des propositions qu'elle reçut ce jour-là.
Le lendemain, parmi tous les hommes qui vinrent lui rendre visite, aucun ne fut à son goût.
L'après-midi du troisième jour, elle désespérait de voir arriver un homme qui lui plairait, et était prête à supplier ses parents de lui accorder un nouveau délai. Mais elle savait que ses parents, cette fois-ci, ne céderaient pas.
Alors que le soleil commençait à décliner, un homme entra dans le palais. Lorsqu'elle lui demanda de quelle contrée il était le prince, il répondit qu'il n'était le prince d'aucun royaume. Mais il se montra si charmant avec elle, et avait un si beau visage, qu'elle se sentit immédiatement attirée par lui et accepta de l'épouser.
Ses parents ne furent pas heureux de son choix, mais l'acceptèrent, car ils souhaitaient le bonheur de leur fille. Le mariage fut célébré quelques jours plus tard.
L'intérêt de la princesse pour cet homme ne faiblit pas. Son mari était attentionné et l'aimait lui aussi avec ferveur. Leur mariage connut de longs mois heureux.
Un an plus tard, cependant, alors qu'elle cousait une étoffe pour son mari, un phénomène étrange se produisit. Elle ne voyait plus les doigts avec lesquels elle tenait l'aiguille. Celle-ci semblait flotter dans le vide, à quelques centimètres de sa main droite dont on ne voyait plus que la paume. Elle inspecta sa main gauche, qui connaissait la même anomalie. Prise d'effroi, elle alla voir sa nourrice, qui devint très pâle à la vue de ses mains.
« C'est l'œuvre du diable, Madame, annonça-t-elle d'une voix pleine de frayeur. Avez-vous péché ?
- Je... Non. Nourrice, qu'est-ce qui m'arrive ?
- Je ne sais pas. Il vous faut cacher ces mains. Personne ne doit découvrir ce qui vous arrive, pas même Monsieur votre mari. »
La femme lui tendit des gants noirs, que la princesse enfila. Son inquiétude redoublait à la vue de l'agitation qui s'emparait de sa nourrice.
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Nouveaux Contes des Particuliers
FanfictionDepuis plusieurs siècles, le recueil des Contes des Particuliers est transmis de génération en génération dans les familles de Particuliers. La plus récente version de ce recueil, éditée par Millard Nullings, réunit quelques-uns des contes les plus...